Oui, l'Ange blanc respirait... si faiblement, mais il respirait. Quelque part, il oscillait encore entre le réel et le néant. Juste à la frontière des mondes, juste au rebord du gouffre. Lui seul peut opter de lutter, pour revenir en haut, ou de se laisser doucement sombrer dans le grand sommeil.

Que choisir?

Peut-être aurait-il fallu réfléchir. Mais nous nous trouvons en des lieux que même l'esprit ne peut atteindre, où l'âme elle-même devient floue et mal définie. Qui est Archael? Plus grand-chose. Ni une personne, ni un cadavre, ni un corps inconscient, ni un intellect, rien! Juste une flamme. Une petite flamme qui ne pense même plus, qui ignore même sa propre existence, mais qui va pourtant devoir décider si elle conserve celle-ci ou non.

Seuls comptent ici les sentiments à l'état brut. Et celui qui colore toute la flamme d'une couleur gris ardoise n'a pas de nom. Nommons-le fatalisme ou lassitude pour s'en approcher un peu. Son reflet est terne, neutre. Indifférent... totalement indifférent. A ce qui l'attend dans l'une ou l'autre des solutions. Egalement au fait que s'il ne choisit pas, il restera pour l'éternité entre la vie et la mort. Et même aux voix diverses qu'il entend, je ne sais par quel miracle. Toutes deux l'appellent, l'engagent à revenir. L'une est infiniment douce, l'autre terriblement vindicative. Mais ni l'une ni l'autre n'atteignent la flamme.

Archael! Accroche-toi! Bats-toi! Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir! Réveille-toi!
Fous. Vous ne comprenez pas. Qu'importe au fond ce qui arrivera? Quand on parvient au bout du chemin, et que le regard plonge dans la Grande Nuit, tout le reste paraît petit et insignifiant. Je sais que vous aimeriez que je revienne. Mais, franchement... A quoi bon? Je ne vois rien qui en vaudrait la peine.

...

"Ce n'est pas parce que tu ne peux pas le voir... que cela n'existe pas, n'est-ce pas?"

Hein? Qui a parlé? Ce n'est pas une voix comme les autres. C'en est une autre, plus lointaine, mais pourtant infiniment plus claire. Une voix qui vient de quelque part dans le passé. Qui a prononcé ces mots, jadis?
La flamme jeta un faible éclat...
Oui... oui... il y a longtemps, dans ces Monts Décharnés sauvages... la voix dure et douce, la voix amie, la seule que tu aie véritablement aimée.
Le feu follet renaissant d'élargit, gagne peu à peu en clarté
Et il y avait une chevelure de lait, si semblable et si différente de la tienne... et puis, oh! il y avait aussi deux pierres rouge sombre, deux escarboucles qui n'avaient pas de reflets. Oui... Au milieu d'un visage enfantin, mais tellement pâle...
La lueur gagne soudain en ampleur.
Le nom est maintenant tout près, car "c'est ainsi que je me nomme" avait dit la voix...
Du feu de la vie naquit peu à peu un soleil...
"ou plutôt que l'on m'a nommée..."
Les blancs rayons nimbèrent le corps d'Archael.
"R..."
Et l'Ange bougea un doigt.

Oui, ami Chilk, le compte est juste. Il reste cinq secondes. Et malgré le temps qui fuit, le combat va donc reprendre.

Cela s'était produit au moment où le fouet ensorcelé du Chacal le saisissait par le mollet, pour un nouveau trajet incontrôlé dans les airs. Un frémissement infime agite les muscles, juste avant que le corps de l'ange retombe à terre. Oui, il a bougé, légèrement, ramené miraculeusement par une voix. Car le miracle que ne pouvaient accomplir ni la douceur de Lorelaï, ni la combativité de Chilk, une voix l'avait fait. Cette voix, c'est celle d'une femme... celle d'un amour.
Ô grande originalité! Mais au fond, tous les combats sont un peu pareils, vous savez? Quand le gentil de toutes les bonnes séries télé se réveille après avoir entendu les voix de ses amis, et que son Cosmos explose pour sauver sa déesse avec une Ultime Comète de Pég... (euh... ahem... vous avez compris la suite. Ouais, j'ai pas envie d'encourir les foudres du démon majeur Copyright, celui qui fait trembler de peur même les plus puissants seigneurs de l'enfer.)
Et puis surtout, vous vous attendiez à autre chose de la part d'un ange romantique en train d'agoniser?

"C'est vrai... Ruby..." murmure-t-il à mi-voix en se relevant peu à peu.
Et les yeux bleus s'ouvrirent à leur tour. Alléluia! Résurrection! Les yeux de saphir viennent de croiser les yeux de jade! Sonnez trompettes, un combattant est de retour, pour la passe d'armes finale! Pour le point culminant de ce combat!



Mais...
Une minute, attendez...

Juste avant que le fouet de Chilk ne fende l'air à nouveau.... les mèches de l'ange sont retombées sur son visage. Ses yeux sont à nouveau invisibles, à peine apparus pour un court instant. Mais dans ce court laps de temps, Archael a souri une dernière fois. De ce sourire vide qu'il a eu de plus en plus souvent, ces dernières semaines.

"... est partie."

Tchac.
Le fouet de Chilk est passé.
La longue chevelure de l'ange a été coupée net.
Les mèches immaculées tombent lentement, comme des plumes d'oiseaux.
C'est une douce averse blanche qui tombe sur le pavage de la Fontaine, avec la douceur d'une caresse.

L'ange n'a pas bougé, plus figé qu'une statue, les bras le long du corps. Trois centimètres d'écart et sa tête sautait, mais il est toujours immobile. Les yeux invisibles sous la frange qui a échappé au massacre. Les seuls choses qui ont changé chez lui depuis qu'il est revenu à la vie, ce sont ses vêtements et son aura. Ses vêtements blancs et bleus se sont imbibés de son sang argenté. Et en se mélangent aux motifs bleus, ce sang donne au tissus une couleur plus sombre, bleu sombre... presque noir. Quand à son aura, elle n'est plus cyan, elle non plus. Depuis qu'elle est revenue du néant, elle brille d'une lumière blanche dans les ailes. Sur Archael, le bleu n'existe plus. Il est l'ange blanc, brillant, souligné par quelques lignes noires.

Une rafale passe... un pan déchiré de sa cape s'enroule autour de ses épaules, lui faisant une capuche blanche et noire. Le professeur ne bouge toujours pas.

Même l'aura blanche et lumineuse qui l'entoure est comme pétrifiée. Elle brille juste, mais n'émet plus de pouvoir, plus rien. Le Son ne vibre plus autour de lui. L'orage qui gronde au-dessus de la Cité ne lui prête pas sa force. Il semble ne même plus sentir le vent qui souffle sur la place. L'esprit de conservation, la volonté de se battre, tout semble l'avoir abandonné. Il se contente de regarder Chilk, silencieusement. Comme si son adversaire n'était pas là. Enfant meurtri, où es-tu?

Face à toi est le Chacal. Debout comme toi, et comme toi blessé grièvement. On pourrait croire que vous êtes à égalité. Mais il a deux choses que tu n'as pas. La première est l'endurance due à son physique et à son habitude du combat, qui lui permet de conserver une vitalité qui t'a abandonnée. La seconde, c'est quelque chose d'indéfinissable. C'est un feu dans les prunelles, qui brûle et qui dévore. Volonté, détermination, motivation, conviction absolue de continuer le combat, pour le meilleur et probablement pour le pire.

C'est même plus que cela. C'est une lueur au fond des prunelles d'émeraude, c'est le rictus au coin des lèvres. ce rictus qui ne l'a pas quitté depuis le début du combat, même quand il semblait en position d'infériorité. C'est la souffrance et le plaisir, c'est la joie infernale qui fait hurler la Bête. Au fond des yeux flamboyants du Chacal, tu lis le plaisir de souffrir et de causer la souffrance!

Comment peut-il exister, ce mélange diabolique de sourire et de grimace de douleur? C'est quelque chose qui te perturbe profondément, n'est-ce pas? Qui te perturbe parce qu'il te rappelle quelque chose. Quelque chose qui lentement, sourdement, est en train de changer quelque chose en toi. Ce qui vient de s'allumer, c'est la mèche d'une bombe à retardement. Ce sourire en voyant souffrir... tu l'as déjà vu chez quelqu'un. Et fiévreusement, ton esprit commence à travailler.
Une partie de toi te hurle d'arrêter, affolée. C'est ton "moi" normal qui ne veut pas se souvenir : trop douloureux, trop rouge et trop haut au creux de la poitrine!
Mais depuis ton réveil, il y a ce quelque chose de froid et dur en toi, qui cherche implacablement dans ta mémoire où tu as déjà croisé un regard pareil.
Elle n'écoute pas les cris d'avertissement de l'autre - prends garde! dit-elle, ne cherche pas à te souvenir, ou tu ne pourras pas résister!

La mèche brûle. Quelque part au creux de ta poitrine, quelque chose de blanc et de brûlant a commencé à pulser.
Tes yeux sont toujours invisibles sous la capuche et les mèches qui te restent. Mais sans t'en rendre compte, tu viens de faire un pas en avant.
Droit vers Chilk.
Puis un deuxième.
Et un troisième.
A chaque pas, la lumière blanche qui t'entoure commence lentement à devenir plus froide, plus aveuglante.
Tu ne t'en aperçois pas.
Tu continues à marcher.
Qui t'a déjà regardé ainsi? Qui?
Lentement, la boule qui bat au creux de ton coeur s'emballe. Comme commence à s'affoler, lentement, la lumière froide qui t'enveloppe.
Un pas de plus vers Chilk.

Là-haut, l'orage est là. L'air bourdonne et s'emplit de tension électrique. Mais la foudre ne tombe toujours pas. Pourtant, vu le champ électrique qui bruit dans l'air, la tourmente s'annonce terrible. Qu'attend donc l'éclair pour s'abattre?

Dans ce calme inquiétant, que fais-tu, Chacal?

En boule sur le sol, son sac à dos renversé laissant ramper la Dionée sur les dalles, Elorri n'a plus L,intention de bouger. Ce son, ce bruit, peu importe ce que c'est, lui a vrillé les tympans et vibré dans tous son frêle petit corps, le laissant meurtri et douloureux. Elle ne regarde pas, ne se fiant qu'aux bruit qu'elle entend pour savoir que ce n'est pas terminé. C'était d'étranges bruits, des bruits qu'elle n'avait jamais entendu avant. Des sons qui n'étaient pas de son environnement, des sonorités étrangères.

À ce moment là, Elorri aurait voulu être ailleurs. Être à des centaines de kilomètres d'ici, dans la forêt luxuriante qui l'a vu naître, avec les dryades qu'elle connaît, les dryades avec qui elle a grandi. Des larmes, comme la sève, coulent sur le pavé, jusqu'à ce qu'une constatation s'impose à l'esprit de la gamine.

« Je ne suis pas une trouillarde... » murmure-t-elle d'une voix à peine audible.

Oh non, elle ne l'était pas. On la réprimandait pour sa témérité, chez elle. À à peine 60 saisons, elle avait affronté et créer, des dangers et des catastrophes beaucoup plus souvent que tout sa peuplade réunie. On la qualifiait de calamité et de peste. On lui avait prédit sa mort des dizaine de fois, ce qui n'était pas peu dire.

Cependant, elle n'avait jamais rien connu de tel. Tout était si étrange ici... elle devait trouver l'école...

Elle se relève, les joues barbouillées de larmes. Elle accroche la Dionée et la remet dans son sac à dos, ignorant les protestations sifflantes de la plante carnivore. Dos au combat, elle ne veut plus rien voir, mais elle entend.

« I’m still alive, for an all time and weary, still alive enough to stand my crown, so there is nothing to revive, I’m still alive. »

Still alive, Nocturnal Rites
Clip visible sur youtube, la chanson vous éclairera sur la situation.




Chilk Agony, fils de personne, se tenait en garde face à ce qui devait être encore son ennemi. Bien que celui-ci ait changé de nature, il restait un adversaire, un point fixe à vaincre avant de crier victoire. Néanmoins, les haies se dévoilent, se déroulent, et la tache sembla plus ardue que jamais.
Pourquoi l’ange s’effaçait il ?
Qu’est ce qui, dans son esprit faisait jaillir tant de puissance et de colère ?

Cet ange était à l’image de cette Cité. Une image de splendeur, rongé de haine et de mort, cracheuse de puissance incontrôlée.
A ce stade, Chilk ne savait pas qu’il allait mourir, aussi se jura-t-il de percer cette Cité à jour, de faire comprendre à ce Monde de spectateurs assoiffés que la Vérité n’était pas si loin, qu’ils leurs suffisait de la cueillir.
Qu’ils se libèrent de leurs chaînes d’hypocrisie et de haine joyeuse.

Kof, balivernes.
Tout avait une fin.
Et la sienne se profilait comme une lumière blanche face à lui.

Les foudres du Ciel se déchaînaient devant ses yeux, et la place perdait de la consistance devant la force de la Lumière. Jamais Chilk n’avait tel énergie, si ce n’était en levant le ciel vers Gan, le Dieu Soleil.
Il n’avait jamais cru en ce Dieu.
Peut-être était il encore temps…

Tout disparaissait.
Tout s’évaporait devant ses portes de mort blanches. Chilk luttait encore contre le souffle, les deux bras endoloris levés devant son visage. Déjà sa peau prenait une allure blanche inquiétante. Et malgré l’explosion de toute sa force, ses pieds lourdement bottés reculaient doucement.

Et pour la première fois, mon ami Chilk Agony, l’Increvable eut peur.

Enfin, comment dire ? Pas vraiment une peur comme vous et moi, une peur qui vous prend aux tripes, une peur comme je l’ai à cet instant ou mon vieil et moi-même allons disparaître, mais plutôt… Oh, puis regardez, vous comprendrez !
Chilk baissa les bras, alors que la lumière explosait et que la fontaine irradiait. Il se tint droit et fier, malgré les quelques plaies et blessures, malgré ses yeux verts aveuglés. Oui, voici la peur de Chilk une peur pas comme vous et moi, une peur comme celle de personne : celle d’un homme qui fait face à son ultime seconde de Vie sur ce Monde.

Et ce fut alors son sourire. Non pas celui que l’on lui connaît, fort et convaincu, mais..
Beau.
Oui, ce sacré Chacal fut alors extrêmement beau, le plus bel homme de l’univers dans cette lumière blanche. Un sourire à faire tomber toutes les dames, un sourire d’adieu et d’au revoir, doux et franc, devant les foudres blanches.
Le visage d’un homme qui en avait vu, avant de tomber…

Je te tire mon chapeau, Chilk. Tu m’as bien fait marré, et maintenant, tu sais que tu vas tomber, t’effacer, ne plus jamais te relever. Tu acceptes ta mort, fière et droite devant cette lumière qui va t’engloutir.
Adieu mon ami…
Adieu.

« Tu rigoles ou quoi… »

Hein ?
Non, mais attend, c’est fini ! Tu vas mourir, finis, tu…

Ta gueule, ma route, je l’ai toujours choisie seule.

Le Chacal se pencha en avant, bandant tous ses muscles de rage. De rage puissante, véhémente, infinie et inclassable. Son vrai sourire lui revint, et ses poings gantés de cuir et de métal se dressèrent, alors que sa Force, sa toute force explosa, une dernière fois.
Il s’élança d’un bond vers la lumière, alors que sa puissance monta, non droguée, mais énorme comme jamais.

« TOOOREEEEEEYAH ! RIEN NE M’ARRETE, JE SUIS CHILK AGONY, FILS DE PERSONNE, L’INCREVABLE, L’HOMME QUI SE JOUE DU DESTIN !!! »

Et dans ce cri, le poing en avant, Chilk pénétra dans les limbes blancs.






La lumière se dissipa doucement.
De cet aveuglement blanc, il ne resta plus rien qu’une place vide. Les têtes réapparurent. Se fut assez amusant de savoir que beaucoup d’entre eux avaient vu le combat mais pas sa fin. Et que beaucoup n’étaient en vie que parce que Chilk leur avait dit de dégager.
La place semblait reprendre vie –douce ironie- plutôt se réveiller d’un long sommeil.

Le seul son qui vint tinter aux oreilles fut celui de la fontaine, encore droite dans la lumière qui déclinait du jour, tandis que le second soleil s’éteignait…

Et au centre de cette place se trouvait l’Ange Archael.
Il avait bien combattu.
Il avait été digne de sa Cité, et avait donné plus qu’il ne pouvait. Le combat ne lui avait pas été donné, il l’avait choisi, et c’était en partie pour cela que ce duel avec Agony allait lui changer la Vie.

Les spectateurs le regardaient, ils revenaient comme les rats, juste pour voir la Fin de ce Monde, voir la fin du duel.
Car là où il y avait un combattant, le second, lui, avait disparu…

Kof.
Je ne vais pas vous la faire longtemps. Mon ami Chilk n’apprécierait pas. Je vais me taire quelques secondes, et le laisser vous montrer ce qu’il a réussi seul, comme à chaque fois.

Car de l’autre coté de la place, se tenait un homme, courbé, un poing tendu vers le sol.
Un homme blanc, aux habits ternes et aux cheveux blonds.
Il était immobile comme une statue.
Une statue de marbre.

Ce fut alors ce qu’on appelle un miracle. Lentement, les gens de la Cité virent se profiler leur vainqueur.

Un pas.
Lourd et pesant dans une semi brume de poussière.

Encore un.
Où ? Comment avait il fait ? Impossible !

Un autre pas.
Personne ne pouvait résister ! Non, il n’avait pas le droit ! Il ne pouvait pas !

Chilk s’immobilisa au dessus d’Archael, et s’agenouilla à ses cotés. Lentement, très lentement, il retourna l’Ange, et posa une main sur le cœur caché sous le torse du professeur.

Le Chacal resta ainsi une seconde, à genou, une main sur le cœur de son adversaire, dans le souffle final de la foule.
Il leva son visage maculé de sang séché, et ses yeux jusqu’alors clos s’ouvrirent sur ses iris verts et brûlant. S’éleva alors un murmure sombre et rauque, mais qui résonna dans l’ensemble de la ville silencieuse. Un souffle comme le premier, mais pas de rage, de défi ou autre : juste annonciateur de pure vérité.

« Tu ne peux plus bouger, Archael du vent. Ce qui fait de moi le vainqueur de ce duel, selon nos lois… »

Il resta une seconde de suspend, et les quelques spectateurs encore sous le choc de cette fin restèrent sans voix.
Ce fut une victoire silencieuse.
La plus belle victoire de Chilk Agony, aussi loin que son cerveau malade en ait eu le souvenir.

Lentement, il se releva, l’Ange dans les bras.

Il s’approcha de la foule, d’un pas traînant, et personne ne compris à quel point il était blessé, personne sauf la jeune femme devant qui il déposa le corps blessé de l’homme aux cheveux blancs coupés.
Chilk avait repoussé la jeune femme pendant le duel.
Elle devait maintenant rentrer en scène.
C’était à son tour de combattre, si elle voulait sauver l’ange, sa seule chance de lui prouver qu’il devait vivre pour elle.

Chilk Agony ne la regarda pas dans les yeux. Il se détourna, ramassa sa veste ternie par les foudres des cieux et la renfila. Il avança doucement, vers les ruelles, tandis que les gens qui l’avaient regardé combattre s’écartèrent devant ses pas.
Une marche silencieuse pour un gagnant silencieux.

Il n’oublierait pas ce duel. D’autres oui, mais celui là non, pas même avec toutes les drogues du monde.

Personne n’était là pour féliciter le Chacal, pour le guérir ou le réconforter.
Tu n’as pas de destin, Chilk, c’est sur. Tu choisis seul, et avance seul…
Mais tu es si seul mon ami…

Peu à peu, l’ombre du Chacal s’estompa, alors qu’il titubait, et la parenthèse dans la vie d’Elament s’acheva.


[Merci Archael, vraiment, pour ce duel. Grand merci à tous.]

Dos au combat, elle ne veut plus rien voir, mais elle entend.

Oh oui, elle entend. Elle entend des choses grandioses, des choses terribles. Il n'est pas question qu'elle se retourne. Elle ne veut rien voir, elle n'est pas chez elle. Elle est Elorri du Sud, elle vient du Sud, des grandes forêts du Sud. Elle se tient droite, tenant contre elle son sac à dos où est confinée la Dionée.

Elorri ne se retourne pas, mais elle ne ferme pas les yeux. Les yeux grands ouvert sur la foule, elle suit le déroulement à travers leurs expression stupéfaite. Elle, elle ne bouge pas, elle ne se retourne pas.

Pourquoi ne veut-elle rien voir ? Elle n'est pas chez elle... Ces sons, ces bruits ne la concernent pas encore... elle n'est pas chez elle. Elle ne sait même pas où elle doit aller.

Elle ne bouge pas, mais ne se retourne pas, de peur d'être changée en statue de sel en voyant quelques chose qu'elle ne doit pas voir. elle n'est pas d'ici, certaines choses ne douvent pas lui être révélées.

Elle attend, elle attend qu,il n'y ait plus de bruit. D'une immobilité digne des grands chênes du Sud, elle ne bouge pas d'une feuille, ou presque... le tronc ne bouge pas, mais le vent souffle sur les veuilles, faisant bruisser ses cheveux, faisant s'agiter sa tunique, mais elle, elle ne bouge pas.

Le bruit, les lumières, le souffle, tout s'arrête... enfin... elle attend, peut-être est-ce un intermède... tout pourrait recommencer... elle attend encore... elle regarde les gens... ils semblent sortir d'un mauvais rêve horrifiant... c'est finit. Oui, il n'y a plus de bruit...

Elorri ferme les yeux, puis se retourne face à la scène, mais ne regarde pas. Elle reste un moment sans bouger, face à la place, puis ouvre les yeux.

Le professeur d'Elament est sur le sol, face à une femelle... l'autre, s'éloigne. Elle a assister à tout ça pour que le professeur lui indique où est l'école...

Un jeune mâle s'approche et s'agenouille devant le professeur. Il fredonne une mélodie... une berceuse ? Elle jette un oeil à celui qui s'éloigne. Pourquoi ressentait-elle une telle attirance pour celui qui s'éloignait ? Elle n'en savait rien... mieux valait ne pas foncer... le devait-elle ?

Elle s'approche du trio, derrière la femelle. En avançant, elle remet son sac sur ses épaules, sourdres aux sifflements de la Dionée. Elle vient se poster justeà droite de la femme.

" Il va s'en sortir, hein ? Il fait que dormir, n'est-ce pas ? "

Elle regarde l'être inanhimé sur le sol, n'adresse aucun regard à la femelle.

Lorelaï avait suivi le duel en tremblant, se demandant sans arret si elle devait s'en mêler, repoussanr chaque fois l'envie de se jeter dans la mêlé. Son amour s'y trouvait mais c'était son combat à lui.

Agenouillé à l'endroit meme ou elle était tombé après que Chilk l'eut éloigné de force. Elle attendit, le coeur en morceau, l,esprit tourmenté, souffrant avec Archaël avec chaque coup qu'il recevait.

De plus en plus, elle craignait de ne plus le revoir, de n'avoir jamais la chance de lui dire ce que son coeur ressentait pour lui. Elle revit en pensée la visite qu'il lui avait fait à son bureau. La beauté et la pureté de ce moment.. la douceur de l'Ange appuyé à la fenêtre... son sourire... ses yeux... elle avait envie de caresser ses cheveux, de le prendre dans ses bras.

Des larmes roulèrent sur ses joues à la pensée de ces moments qu'on lui volait, elle pleurait silencieusement, pendant que Chilk rouait de coups son seul amour.

Elle baissait la tête, les épaules affaissées, incapables d'en supporter plus, souffrant les maux de l'Ange, et sa douleur de le perdre. Elle tremblait de tout son corps, frissonnante. Elle ferma les yeux un bref instant, et c'est àce moment-là que le silence se fut, brisé par le chuintement de pas...qui s'arrêtèrent devant elle. Elle ouvrit d'abord les yeux, une paire de jambes devant elle... elle releva lentement la tête, Chilk posa Archäel devant elle et s'en fut.

Elle reprit vie en un éclair, se redressa et l'examina. Son coeur battait toujours, mais faiblement. La vie le quittait à chacune de ses inspirations... Elle voulut le soulever pour courrir à l'infirmerie, elle essaya une fois, deux fois, trois fois...mais même sous le coup de l'adrénaline, elle n'avait pas assez de force...

Elle se retourna, scrutant la foule des yeux pour trouver de l'aide, le visage défait, dépité...

Suite à l'intervention de l'inconnu, le regard suppliant de Lorelaï se transformant en muet remerciement. La gorge noué d'avoir tant pleuré, elle ne pouvait en sortir aucune parole. Ses sanglots y étaient toujours pris formant une boule douloureuse dans sa gorge.

De sa manche, elle sécha ses larmes, et tenta de se maîtriser. Elle rejeta fermement les épaules en arrière, redressa le dos et prit une grande inspiration avant d'acquiscer à la question de son sauveur qui lui demandait si elle pouvait l'aider. Elle ressemblait maintenant à une petite fille qu'on a grondé parce qu'elle a pleuré sans raison.

Elle glissa alors ses propres bras sous le corps de l'Ange et pensa:

* À nous deux, nous pourrons le transporter jusqu'à l'infirmerie. *

Elle ravala sa salive et dit d'une voix éraillée par l'émotion et qui traduisait toute son angoisse et l'énergie déployée à la maîtriser:

" Nous allons l'emmener à l'infirmerie (sanglots refoulés), j'y travaille, là-bas j'aurai tout le nécessaire pour le soigner... et ( sanglots) le garder parmi nous..."

Elle le regarda et lui fit un signe de tête pour lui signifier qu'elle se mettait en marche. Elle partit à reculons vers l'infirmerie. La situation étant quelque peu étrange, elle décida de faire la comversation pour un, se changer les idées, et deux, alléger l'atmosphère après ce qu'ils venaient de vivre.

" Je suis Lorelaïé, l'infirmière et psychologue de l'école...et vous êtes?"

Lossëhelin regarda sans mot dire cette jeune femme, aux yeux rougis par les larmes. Elle lui semblait si fragile et instable, à la manière d'une petite fille, et cela le laissait perplexe de penser qu'une personne qui paraissait si faible puisse soigner un être qui avait développé une énergie incommensurable.
Mais, l'être ailé était inconscient à présent, et dans un trop piteux état pour prendre lui-même soin de sa propre vie…

Tandis qu'ils se mettaient en route, il eut un petit regard en arrière pour la fée qui s'était inquiété du sort du blessé. Il ne la connaissait pas, et il n'était même pas sûr de la recroiser un jour. A moins qu'elle ne les accompagne à l'infirmerie, il ne pourrait certainement jamais l'informer de l'état de l'inconnu qu'il portait. Mais ils n'avaient pas le temps de s'attarder à discuter. Aussi reporta-t-il rapidement son attention sur le blessé, et sur ses pas que guidait, à reculons, la jeune femme.

Tout en suivant l'inconnu, il réfléchissait. Elle avait parlé d'infirmerie, non pas d'hôpital, ce qui lui aurait semblé plus normal dans une telle situation. Infirmerie signifiait établissement administratif, quelque chose du genre. Etait-ce l'école, dont Arcamenel lui avait parlé? Il n'osait trop y croire : trouver le lieu précis qu'il recherchait par un tel hasard, et surtout dans une telle situation, l'échelle de probabilité était basse. D'un autre côté, au vu des événements récents, il se gardait de faire le moindre pronostic d'avenir. N'importe quoi d'inattendu pouvait survenir à tout moment, il l'avait (trop) rapidement compris.

Il avait tellement dérivé dans ses pensées qu'il eut du mal à revenir à la réalité, et à comprendre que c'était bien à lui que la jeune femme s'adressait. Mais après tout, à qui d'autre?

"Je suis Lorelaï, l'infirmière et psychologue de l'école…"
Lorelaï… Un joli prénom, chantant et glissant sur les lèvres comme du lierre sur le sol, à la résonance vibrante, tel le nom d'un minerai que l'orfèvre taille avec justesse. Lossëhelin redressa légèrement la tête, croisant son regard émeraude teinté d'un éclat de lune. Des yeux qui même rougis par les larmes gardaient une pureté sans égal…
Un élan de poésie, et comme toujours l'esprit de Lossëhelin s'était égaré en oubliant l'essentiel. Infirmière et psychologue de l'école. Cette jeune femme travaillait donc dans le lieu qu'il recherchait : le hasard était partout. Psychologue… Une telle école nécessitait-elle ce genre d'emploi? Peut-être, au vu de ce qu'elle enseignait. Après tout, n'était-ce pas les sentiments qui agissaient sur les éléments, bien avant la raison? La magie venait du cœur, c'était cela qu'il convenait de soigner.
Le cœur de cet être ailé était-il atteint? Pourrait-elle lui redonner un souffle?...

"…et vous êtes?"
Le cœur de Lossëhelin rata un battement, tandis que son pied buttait contre le sol, menaçant de lui faire perdre l'équilibre. Il raffermit sa prise sur le blessé et parvint à éviter la chute, néanmoins il resta un instant sans réponse.
Qui était-il? En effet, dans cette sombre histoire c'était lui l'étranger. Pourquoi s'était-il mêlé de tout cela? Ca ne le regardait pas après tout. L'instinct et ses idées stupides, ce besoin de protéger, d'aider tout être dans le besoin, l'attente de réponse ; qu'est-ce donc qui l'avait poussé à agir? Il n'en savait trop rien. Il avait agi. C'était tout.

"Lossëhelin Fëanàro, répondit-il au bout d'un instant plus court que ce qu'il ne lui apparu. Je viens d'arriver dans le cité… je ne pouvais pas rester sans rien faire."

Un mensonge? Peut-être. Il aurait pu faire abstraction de ses sensations en pénétrant dans la cité. Il aurait pu se détourner à l'instant fatidique. Il aurait pu fuir en voyant le corps inerte.
Il aurait pu. Mais il ne l'avait pas fait.

Ses yeux se posèrent de nouveau sur cet inconnu qui reposait dans ses bras. Il était beau, il avait la grâce d'un ange. Une magnificence nullement altérée par son état d'inanition. Au contraire, ses traits relâchés lui conféraient un air doux et apaisé.
Une apparence sereine qu'Arcamenel avait eu lui aussi, le jour de sa mort…


[Je te laisse le soin de nous faire arriver à l'infirmerie. Laisse moi juste un lien dans ton prochain message, ou bien envoie-moi un MP si tu veux répondre directement là-bas, merci]