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 Au crépuscule... { privé Ruby }

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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptySam 12 Jan 2008 - 1:48


La couleur rouge
Est répandue dans la pluie
Qui tombe au printemps.
Sakuzo Takada


Il courrait plus vite. Toujours plus vite, dans cet infini d’espace qui lui était offert vers l’horizon sans fin aucune. Au loin, le soleil brillait d’une infime lueur virant au rougeoyant, bordé de sa couronne dorée entremêlée de fils orangées. Cette vision lui arracha un mugissement et un son rauque rappelant de vagues cris primitifs animal sortit d’entre ses crocs, se répandant hors de sa bouche en une écume repoussante. Ses griffes s’enfoncèrent dans la terre et un crachat de minces graviers s’envola dans l’atmosphère du soir s’annonçant. Il fallait aller plus vite. Toujours plus vite.

Le crépuscule apportant ses premiers présents de lumière faiblissant, les minces particules d’or pleuvait sur les habitations peuplant la Cité entourée de fortifications. Droite et fière dans le lointain, Elament se dressait, majestueuse face au vent, au soleil de lave, aux montagnes et aux rivières environnante. De partout résonnaient des cris, de légers filets de voix, mais pourtant bien présent, émergeant dans la nuit guettant à la porte. Les parents rappelaient les enfants qui se hâtaient de les rejoindre pour se blottir contre eux, insouciant des affaires se traquant au dehors. Dans les rues, les bruits secs de volets claquant et de porte se fermant indiquaient clairement que ça allait venir. Ce n’était plus qu’une question de minutes. On se risquait encore à une ou deux plaisanteries entre voisins puis, on jetait un regard par-dessus son épaule et on rentrait bien vite, après un dernier bonsoir.

Vint la pénombre pénétrant peu à peu la surface nuageuse, cela devint un ballet de taffetas et de soie, au tissu doux et léger, se superposant et s’alliant en un singulier patchwork aux tons chauds et froid. Un bout de rose par là, un duvet de magenta par ci, le tout baignant dans une étrange clarté de lumière se confondant dans le ciel jouant dans les gammes, du turquoise à l’indigo, oubliant un point minuscule qui se teintait de blanc et se mettait à reluire dans l’écrin de ténèbres. Le vent se leva en une brise passagère, les branches s’agitèrent et un murmure parcourut la verdure. Les animaux retinrent leur souffle en observant ce qui se faufilait si hardiment entre racines et buissons. Celui que le ciel auréolait d’un arc-en-ciel devenu coton.

C’était un bâton. Un bâton de bois solide, brillant de force et de jeunesse, s’enfonçant dans la terre pour mieux s’y extirpant, flânant avec les cailloux et courbant face aux racines, les caressant pour mieux les amadouer, traçant un léger sillon derrière lui pour laisser une trace de son passage vigoureux. Le bâton écarta une feuille, alla taquiner un ver de terre, virevolta dans la poussière, y soulevant un nuage sableux, avant d’arrêter sa promenade. Le bâton s’immobilisa, profita de l’air régnant dans la plaine, vint tapoter un mollet nu et bronzé par des journées de marche. Une voix s’éleva avec l’assurance de la jeunesse, à l’image du bâton qui avait repris place dans la terre et s’y cachait.


« C’est bientôt près… »


Alors, le bâton recommença son manège, avec plus de sureté cette fois, plus d’audace et de cabrioles.

Puis, le bâton eut un petit sursaut.

Le bâton s’envola.

Le bâton se dit qu’il avait été bien bête de s’être fait avoir…

Ou plutôt son porteur se dit que se faire attaquer à un moment pareil, si près du but, était un manque de chance flagrant.

Lui, il le contemplait, la bave aux lèvres, broyant de ses doigts crochus un assemblage de fer et de bois, le tout assorti de piques acérés, dardant ses iris sanguines sur l’être au sol. Un mauvais sourire étira les canines de la créature tandis qu’un ricanement secouait ses grossières épaules rehaussées de plaque lui collant à la peau, alors qu’il contemplait sa victime, triomphant et jubilant d’avoir pu la jeter si facilement à terre. Car c’était pour lui un bien plus grand exploit en ce jour où il n’avait attrapé personne. Aux premières approches du printemps fertilisant, chacun préférait se terrer chez lui que de s’aventurer au dehors. Quel était ce fou qui avait osé sortir ?

Le fou en question était à présent à quatre pattes, tâtant le sol d’une main, et finalement, avisant qu’il ne parviendrait pas à retrouver son fidèle compagnon de bois pour le moment se redressa sous les yeux étonnés de son agresseur. Celui-ci croisa le regard de l’autre et soudain comprit parmi le peu de lucidité qu’il possédait. Deux gouffres sans fond s’imposaient à lui, l’y faisant plonger et l’y engloutissant. C’était une obscurité grave et profonde, elle ne ressemblait pas à la sienne, et il s’en sentit tout troublé.


« Ca se fera sans alors… »

L’inconnu laissa son pied errer dans la poussière avec une dextérité qu’il aurait été difficile de deviner chez un aveugle. Le démon serra plus fort son arme contre lui dans un geste de provocation que l’handicapé ne vit pas, mais perçut néanmoins à travers l’atmosphère qui s’épaissit sous le souffle devenu plus bruyant du monstre. Les bras s’écartèrent dans un geste ample, offrant leurs paumes au ciel. Un sourire s’afficha sur le visage basané tandis que des cheveux d’un blond pale venait le frôler.

« Allez. Viens. »

Un grognement s’éleva de sa gorge. Il se moquait de lui ou quoi ? L’acier tournoya dans les airs alors qu’il ployait les muscles de ses jambes avant de s’élancer vers lui dans un rugissement, poussant au maximum ses capacités, levant les bras ancrés dans le bois, les yeux injectés de sang, la bouche révélant des crocs avides de mordre. Les pieds du démon martelèrent le sol tandis qu’il accourait au devant de son adversaire dont la cécité lui procurait un avantage certain. Pour qui se prenait cet avorton sans aucune chance ? Pour pas grand-chose en vérité. Pour Dwenös Way tout simplement. Ce dernier ferma ses paupières, sa peau frissonna et un frémissement parcourut la plante de ses pieds qui calquèrent leurs tremblements sur la résonnance de la terre.

Le nymphe s’écarta en une pirouette acrobatique. Ses doigts, semblant tout à coup agités de mille fourmillements, semblèrent saisir une force invisible entre eux puis, la contenir, serrant leurs jointures à en saigner. Leur possesseur fronça les sourcils avant de les déplier brusquement. A la seconde même une plaque de roc et d’argile s’éleva du plateau et frappa le Nash qui alla s’écraser un mètre plus loin. Cependant, la créature habituée aux nombreux combats de son existence se rétablit bien vite parterre et se redressa pour mieux foncer à nouveau, crachant et soufflant comme un bœuf. L’adolescent ne bougea pas d’un poil, il perçut l’haleine de l’autre le frôler, l’air siffler au-dessus de lui sous la pression de piques de fer. Il n’eut que le temps de se baisser pour balayer les jambes de son ennemi. Avant de sentir une décharge au cœur et hoqueter de stupeur.

C’était un tremblement de terre, un soulèvement des monts et des vallées. Non. Ses oreilles se firent plus fines et son odorat s’affina. Il eut un petit reniflement de colère. C’était vraiment trop bête d’être retardé.


« Je me doutais bien que tu ne serais pas seul… »

Mais « tu » ne lui laissa pas le temps de répliquer davantage et le jeune homme se retrouva à nouveau projeter, nez dans la poussière, par un violent coup de pied sur la tempe. Dans un cri, il accusa le choc, avant de reprendre ses esprits, réalisant que l’autre allait de nouveau à lui, mais plus lentement, savourant déjà sa victoire, certain d’avoir gagné à l’avance avec en plus ses deux partenaires qui arrivaient. Deux autres Nash qui accouraient pour l’aider et recevoir leur part du butin eux aussi. Et Dwen avait suffisamment étudié pour savoir que le butin c’était lui. Prestement, il se redressa, les jambes étalées, arrondissant les doigts, les joignant entre eux, tel un chef d’orchestre commandant à la roche qui s’abattit en trois canons qui frappèrent successivement le démon aux jambes, au ventre et au menton le combattant maléfique. Le nymphe eut le temps de se relever à son aise pendant que l’autre, sonné, reposait quelques mètres plus loin.

Il y avait une ancienneté de fer et de sang dans l’air. Un reste de cuivre gratté de saisons passées mais encore présentes. Et il en prit conscience, tandis que ses yeux qui ne voyaient plus contemplaient le lointain d’où les ombres s’élevaient, envahissant le vaste monde, crachant sur lui deux créatures affamées et une autre qui ne tarderait pas à reprendre des forces elle aussi. Et alors que dans un élan désespéré où une appréhension sournoise germait dans son esprit, alors que ses bras et ses jambes agissaient d’eux-mêmes pour le protéger dans un ultime instinct de survie, sans tenir compte de la fraîcheur se répandant imperceptiblement dans la plaine, fusait la question en son esprit, telle un bouquet d’étincelles allumant les feux d’alarme.

Que s’était-il passé pendant tout ce temps où il n’avait pas été dans la Cité, auprès de ceux qui lui étaient les plus chers au monde ?


Dernière édition par le Mer 16 Jan 2008 - 18:08, édité 2 fois
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Ruby
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyDim 13 Jan 2008 - 16:45

Elle m'apparaît
dans un tourbillon de neige
et puis tout bascule

- Obin -

*¤*



Vers le nord, toujours.
Vers le froid, la neige, le verglas. Vers le givre, la nuit, les blizzards. Vers la glace, la bise et les étoiles. Vers les steppes, les plaines, les montagnes. Vers les déserts glacés, bien plus loin qu'un pied humain ait pu laisser sa trace.
Vers le nord, encore.
Droit vers le mystère, vers ses racines, vers sa nature. Plus proche des forêts encroutées de neige, bien plus loin, encore, vers l'oubli, le néant. Vers sa vie.

Elle ne fuyait, ni ne chassait. Mais courrait pourtant. Le vent dans ses cheveux de lait, la tièdeur de l'air printanier comme un brasier contre sa peau. Elle n'était qu'une ombre d'une blancheur absolue sur l'ourlet sombre de la terre. Vêtue de blanc, et de blanc faite en dedans (un enchantement de pureté), mais invisible aux yeux des êtres sombres pourtant. Son pas, lui, gelait la terre profondément, ne laissant de son passage qu'une vague tâche recouverte de givre, qu'une vague marque facilement repérable.
Mais personne ne la traquait, pourtant. Personne ne suivait sa course.

Un instant, elle se campa sur une branche haute, accroupi au dessus du vide, les yeux vers la vallée qu'elle ne regarderait plus jamais de sa vie. La brise traversa les feuillages, fit de sa chevelure l'oriflamme de son royaume. Celle-ci descendit, bannière abattue et jamais plus relevée. Perdue, la créature observa le soleil se lever, admira la nuit céder le pas au jour, regarda mourir les étoiles et s'éteindre la lune dans le matin frais. Hypnotisée, elle s'amusa avec la brume, joua avec le brouillard du matin, marionnetiste habile. Juste d'une réflexion, juste par sa volonté. Quelques heures, encore, elle s'endormit, le dos contre le tronc, dans une position instable. Elle ne réagit pas lorsque les oiseaux vinrent picorer près d'elle, ni lorsqu'un écureil s'avisa de sa chevelure comme d'un nid l'espace d'un temps. Elle rit, même, oubliée et oublieuse, dans son sommeil, avant que le plomb du réveil ne prenne sa conscience et que de l'arbre son corps naturellement ne glisse pour retrouver le sol bien ferme sous ses pieds.

Elle flana un peu, le soleil presque dans son zenith, mangeant ici des feuilles, là des oeufs d'oiseau non surveiller. Un lièvre servit de fin de repas. Du sang frais autour de la bouche, ouverte à tous les bruits de la vie, elle évita un bûcheron, joua à suivre un chasseur sur une demie lieue sans qu'il ne la repère, puis se retrouva non loin d'un chemin, de vagues bruits parvenant à ses oreilles.

Certains font parfois les frais de leur faiblesse, d'autres de leur inconscience. La Louve ignora le boucan et commença à reprendre sa route. La nature est ainsi faite : les plus faibles meurent, les plus forts survivent. Le fort chasse le faible. Même un cerf peut tuer un loup. Personne n'échappait aux lois naturelles.

Le vent se leva, plus fort qu'ordinaire, détâchant d'un arbre une feuille pourtant verte. Signe du destin ? Ruby se figea. Car, plus que cela, c'était l'odeur de la sueur, de la pisse et de la peur que lui apportait la brise et, dans tout cela, un léger fumet lui était familier.

Le sol attira vers lui son nombril, la nausée la prit. Le souvenir revint, fugace, mais d'une force indescriptible, plus vrai que nature. La blondeur, le vide dans les yeux, la suffisance.

Alors, elle devint tout. Eau, neige, vapeur, tourbillonnant dans un vent inexistant, seulement mue par sa volonté, et le chemin se déroula sous ses yeux comme une langue hors de la bouche. Le froid imposa son royaume, glaçant, formant du verglas sur le sable et la poussière de la route.

Trois. Deux puants la mort, le meurtre et la douleur. Un replié, habitué d'un orgueil qui ne le ferait pas mourir aussi pitoyablement.

Reprenant sa forme entière et solide (et lavée du sang du lièvre), elle se réceptionna sur le sol avec souplesse, semblant venir du néant (mais vers le nénat se dirigeant). Le temps se figea, elle s'accroupit pendant qu'ils la regardaient tous deux, la peur s'incrustant instantanément dans leurs yeux.

Le froid, la blancheur, la position, l'apparente faiblesse. Et ces yeux, ces yeux... D'un rouge plus rouge que le rouge, tellement vivant que le feu n'était qu'une faible braise dans le plein jour. Ses cheveux voletèrent doucement vers le sol, tombant dans la poussière sans pourtant s'en salir.

Le temps reprit son cours. L'un des démons (ils étaient tous des démons à ses yeux, leur race ne changeait rien) recula d'un pas, trébucha, se reprit, se retourna et commença à courir.
Il ne sentit que la caresse de la brise et une ligne glacée le long de son cou avant de tomber à genoux, ses mains encerclants sa gorge d'où le sang, épais et brun, s'échappait à gros bouillon. Un râle s'échappa de sa bouche, il hoqueta. Ses yeux emportèrent comme dernière image le regard inqualifiable de la Chasseresse de Glace avant que la glace ne recouvre totalement son cadavre. Le sang coula le long de ses griffes, gouttant sur le sol avec régularité.

L'autre ? Ah, l'autre, elle ne le tua pas... Il faut parfois savoir laisser un souvenir net et fermement ancré dans les mémoires pour qu'à jamais la peur demeure et pour que surtout, on ne s'approche plus de ce chemin avant un temps...

Le pas lourd du monstre s'évanouit tels les battements d'un coeur agonisant alors que, curieuse, la Cristalléenne s'approchait de l'innocente victime. Ruby s'agenouilla devant lui, ne le touchant ni le lui parlant tandis que, tels deux pieux, ses yeux accrochaient le regard vide des prunelles mortes.
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyMer 16 Jan 2008 - 18:05

Le monde a tourbillonné, encore et encore…
Dans un écrin de couleurs et de parures…
Si magnifiques…


Et au fin fond des ténèbres si profondes et si délicieuses, il lui semblait sombrer à l’infini, dans un cercle de répétitions qui auraient duré pour l’éternité. Coincé au milieu de cette chambre noire, il voyait tant d’images passer devant ses yeux qu’il ne savait plus comment les saisir et les faire glisser entre ses doigts pour mieux les examiner. Il n’y avait qu’une seule musique, battant à ses oreilles, cette musique de barbare tellement charmante, des tribus anciennes, contée depuis la nuit du temps. Ce tambour immortel qui ne cessait de frapper, appuyant un peu plus sur son myocarde… Encore… Encore… Tournez encore les flux et reflux de sang parcourant cette enveloppe vide… Ruisseaux écarlates d’adrénaline dans ce circuit complexe qu’est cette créature… Cet homme abandonné ici et là…

Ainsi allait-elle, grimpait en lui, escaladant ses muscles, se frayant sournoisement un chemin parmi sa chaire, picotant son épiderme de frissons multiples, aussi douloureux que mille piqures d’opium. Il aurait voulu s’évader, fuir cette réalité qui soulevait un pan de rideau bien trop cruel pour lui qui jusqu’à ce jour n’aspirait qu’à la chaleur et à au souffle frais de la quiétude qui l’aurait amené au tombeau… Paisible… Il aurait fermé ses beaux yeux de nuit et aurait enfin pu dormir. Oui, c’était ce qu’il pensait à présent, au sommeil, à la beauté de la plaine environnante s’ouvrant au printemps, au paysage rougeoyant, laissant la scène aux forces démoniaques, puisant dans les lointains visions qu’il avait pu avoir. Le petit enfant tremblant, recroquevillé entre ici et ailleurs se demandait bien ce qu’il avait à faire là, perdu dans ce monde d’adultes où il n’avait pas sa place, trempé d’innocence des pieds à la tête.

Mais si.
Il a tout à y faire.


Alors, le petit garçon aux grands yeux d’amande observa le plus grand. Et il découvrit la peur et ses conséquences, si magnifiques et si horribles à la fois, faisant commettre de telles prouesses et maladresses. C’est de cette manière qu’il évolua, devenant une bête féroce, un mur solide et inébranlable dont les lianes cadenassaient ses faibles les plus puériles. Il devint lui. Lui qui se confondait dans ce décor noir et rouge, pianotant une tendre mélodie dans les airs aux effroyables répercutions sismiques, faisant se dresser de toute part des tours et des remparts, forteresse de pierre et de terre séchée. Les yeux vides et nuageux assombris et braqués sur un tout entre le monde et l’au-delà, il pouvait tout observer en son for intérieur. La défaite. La réussite. Le futur. Les stratégies à adopter pour mieux gagner. Et le passé, dans un coin poussiéreux et oublié qu’il avait préféré délaissé. Un cri. Deux cris. Le vent glacial qui s’allonge tout à coup en une nappe phréatique. L’eau qui s’écoule pour mieux se durcir et en glace pure et blanche se métamorphoser. Et le sang. Le sang qui s’infiltre et se perd. Le sang gâché. Bâclé.

Stop.
Pourquoi t’es-tu arrêté ?
Ca sent le sang.
Le monde a cessé de tourner.
Les couleurs ont disparus.
Et moi, perdu.
Je ne vois plus rien.

Il y eut un éclair qu’il ne vit pas. Ce qu’il vit, ce fut l’obscurité, la mort, un démon devant un arbre tordu blanchit par l’astre lunaire. Il lui sembla mettre un des assaillants à terre dans un dernier réflexe, avant que la tempête ne retombe et que le monde ne se remette à tourner. Normalement. Car tout pour lui c’était accéléré à partir de l’instant où sur le plateau du monde il avait été mis en échec et sa vie menacée. Il entendit un bruit sourd, celui d’un corps au sol, avant que lui-même ne sente son propre choc, au creux de l’estomac. Une pluie d’étincelle déferla en même temps que le réveil des blessures qu’il avait reçu et qu’il n’avait jusqu’alors senti en rien. Un liquide jaillit d’entre ses lèvres et il reconnut la texture poisseuse et pourpre, celle-là même dont l’odeur planait dans la plaine. Elle était advenue comme une lumière dans son monde obscurcie. Ses narines la reconnurent. Ses oreilles eurent son écho familier. Il s’écroula au sol et ne put plus bouger, les jambes écartés, la tête à la renverse, contemplant des étoiles invisibles, il vécut ce qui suivit semblable aux morts dissimulés dans les entrailles du monde.

Les sifflements de l’air lui parvinrent. Il entendit tout et ne vit rien. Il perçut la mort et sa sauveuse. Yeux fermés, dérivant dans un espace connu de lui seul, il laissa le reste de ses sens encore vivants s’imprégner de tout ce qui lui inspirait l’être survenu. La neige. Le froid. La glace. La bestialité. La mort. Il avait connu tout ça. Les sons, le parfum, la finesse du tissu et des cheveux, il s’en souvenait encore, aussi loin que remontaient les bribes de mémoire qu’il allait chercher à présent au plus profond, entre les deux mondes, tentant de ne rien perdre du combat dont il était la cause. Une autre dimension se créa, avec un matin de jours plus sereins et moins en danger, quelque chose sans chose particulière aucune. Un cours avec son ancien professeur qu’il était venu retrouver. Les feuilles qui tombaient et qu’il ramassait. La terre qui résonnait sous ses plantes de pieds qui à l’époque s’habituaient encore à ses vibrations. Puis la chute. Réflexe, Dwen. Réflexe.

Plus personne ne doit mourir.
Plus jamais.
Pourquoi ?
Parce que la mort ne sent rien
Ni ne produit aucun son.
La mort vit et meurt.
La mort…
Personne ne doit la vivre.


Et ce fus le néant. Plus aucune résonnance sous sa peau. Plus aucun chant dans la brise. Il crut qu’un oiseau s’envolait, et s’éveilla. Le nymphe se redressa, le sang sur le menton, le manteau en lambeaux et le corps encore attisé par le combat et la haine, le regard perdu dans le vague. La sensation se fit plus légère et il y eut une caresse qui transperça l’intégralité de ce qu’il avait pu être et de ce qu’il n’était plus. Trop remué par les souvenirs remontant à la surface. Il la revoyait donc après tant de grains écoulés dans le sablier ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi ici ? Cette personne qui n’avait été qu’une touche de peinture dans la toile de sa vie, pourquoi prenait-elle de l’ampleur ? Elle n’était pas comme les autres, elle était différente et ça le fit trembler en même temps que rêver, car Dwenyös Way aime tout ce qui sort de l’ordinaire. Et en ce moment, tout son être aspira à connaître celle qui se tenait accroupie devant lui, le détaillant avec une curiosité aussi enfantine qu’étrange.

Qui jouer le rôle de l’adulte et de l’enfant ? Quelles étaient les positions ? Qui donc était le supérieur ? Sûrement pas lui… Non, car lui il était à terre, et elle, blanche comme la neige, le contemplait de haut. Un mélange d’anxiété, de honte et d’un autre sentiment qu’il n’aurait su définir tant il lui faisait perdre la tête s’anima en lui. Tout autour d’eux était coupé, et lui ne savait plus quoi penser. Elle était dangereuse et d’un charisme des plus terrifiants. Qu’aurait-il pu espérer, lui qui n’était rien ? Perdu dans ce noir infâme, face à toute cette blancheur… Ses doigts s’enfoncèrent dans la terre remuée quelques secondes auparavant. Les iris noires soutinrent celles sanguines sans y plonger car la vue lui était coupée. Dwen, fils d’Anowen, revêtit l’impassibilité, ignorant les battements et le monde qui tournait. L’appel des sens. C’était tout.


« Nous nous sommes déjà croisés avant… »

L’eau cristalline. La forêt. Les bêtes. Les loups. La louve.

« La dette est réglée, n’est-ce pas ? »
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Ruby
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyDim 27 Jan 2008 - 0:23

Là, ici.
Tant d'ombres, tant de noirceurs ! Tant de douleurs et de peines. Un regret, lointain, aussi, qui sait. Et la peau, dorée comme du miel, un de ces rayons d'abeille si difficile à avoir, qui coule dans la bouche, sucré, plein des saveurs de la nature. Ecoeurant. Ce petit scintait le massacre, observateur des conflits, des pillages, d'une guerre aussi qui sait ? Dans le morne de ses yeux ne semblait venir d'aucune blessure et, dans le fond de l'immense mémoire de la jeune femme, il résidait un bloc d'amnésie tenace, si facile à effriter...

Elle saisit à bras le corps le gratoir et, du bout du poignard, écorcha un peu la vive carapace, et il ne resta sur sa langue qu'un goût acide de citron ainsi que par delà, la saveur vague du réconfort.

Des tours brisées, des linceuils blancs, des trames de lin des dépouilles... De tout cela, que le vent, que l'absence. Et lorsque la brise emmena avec elle les paroles du jeune aveugle, Ruby, élémentaliste de glace, maîtrsse absolue de l'élément eau, habitante de l'hiver, elle, frissonna, et sa peau s'hérissa. Une sueur froide coula le long de son échine et, soudain, elle regretta sa peau presque nue, son exhubérante provocation. Juste un instant, un battement de paupière, de coeur, une vague de frissons. Rien.

Letement, elle se releva, ne faisant pas sous ses pieds crisser les graviers du chemin, ni ne faisant craquer la moindre de ses articulations. Pourtant lorsque, courbant le dos elle salua le jeune homme, les frôlements du tissu se firent entendre.


« Plus qu'aucune autre ne pourrait l'être. » murmurèrent ses lèvres, retrouvant l'intonation exacte que possédait une jeune fille, des siècles, des millénaires plus tôt. Et la seule marque de ce changement de ton était un cadeau plus précieux que la lune elle-même.

Puis elle se releva doucement, la brise fit voleter ses cheveux. Sur elle, autour de lui, contre lui. Sous le ciel d'ombres d'une nuit si sombre que cette lune si précieuse pouvait y faire office de soleil, les étoiles les observaient. Pas un flocon pour la perfectionde l'instant, malheureusement, plus même, maintenant, l'aura de glace imprimant le sol. Juste elle, et lui, et le silence. Plus pesant que mille baisés.


« Tant de temps... » finit-elle par murmurer « Tant de lunes, de combats, de douleurs... » Se mentait-elle à elle-même en étant soulagée de le revoir lui ?

C'était il y a de cela des vies, lui sembla-t-il, des vies, donc, qu'il avait soutenue sa main, empêcher son état de la retrouver morte, noyée, ou tuée, ou pire. Si faible, alors, était-elle. Gamine pleurnicharde, exilée, paria, loin, bien éloignée de ses terres, de ses us, des siens. Perdue au fond d'une forêt, ou d'un lagune, prête à tomber du bord d'une falaise... Que lui importait la raison... Il lui avait alors sauvée la vie.

Un acte bien innocent, si important. Une guerre qu'elle avait fait gagner, des vies qu'elle avait sauvée, d'autres qu'elle avait prises. Des mots prononcés. Et tout cela... Tout cela, si elle n'avait pas existé, serait-il autrement ? Mais elle était morte. Puis avait vécue de nouveau. Puis était retombée encore. Et un ange l'vait sauvée. Là, entre ses longs doigts si fins et si blancs, elle avait pu tenir dans sa paume le froid doré d'une vie chérie et, se faisant, avait trouvé le signe, trouvée la raison de rester. Entre ses doigts s'écoulait le sable brûlant de ses résolutions. Grace à lui, à cause de lui.


« Où étais-tu ? »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyDim 10 Fév 2008 - 0:36

Quelque part. Ailleurs.
Dans un endroit où j’aurais voulu être.
Et ne pas exister.


Au-dessus, les étoiles, lointains astres aux mille et une nuances de lumière changeantes, piquées dans le velours noir du ciel dont se drapait le monde en ces heures obscures et révélatrices. Il ne les voyait pas. Au-dessous, la terre sèche tout autant que boueuse, les forêts, les mers et les montagnes, les villes et les royaumes qui déployaient eux aussi leurs éclairages pour faire fuir les entités maléfiques guettant les tendres occasions. Mais ça non plus, il ne le voyait pas. Il aurait pu ignorer beaucoup de ce qui se tramait en cet instant. Il aurait pu ne rien savoir. Mais le fait était qu’il était parfaitement au courant.

Pour ça, il lui suffisait de pas grand-chose… Le vent soufflant dans la plaine, faisant voleter les douces mèches à la couleur de pureté près de lui, le souffle épart de celle auprès de lui se mélangeant à l’air du monde, et même sa simple présence se confondant dans un tout. Un tout noir et incertain, où Dwenyös Way avait appris à classer et étiqueter chaque chose. Savoir avancer, buter, tomber et se relever. C’était un cycle infini, même pour les gens non handicapés comme lui. Un cycle où tout devait se répéter indéfiniment. Peut-être était-ce pour là que la beauté nocturne et l’étendue terrestre ne pouvaient rien lui cacher.

En vérité, la seule chose qu’il y avait à redouter sur cette planète, c’était bien ces occupants. De ses souvenirs d’autrefois, il ne gardait que les traces que les humains y avaient laissées. La haine. La vengeance. L’ascension jusqu’au pouvoir. Il n’y avait eu que sa mère qui, dans toute sa folie, avait eu un comportement un tant soit peu différent. Les êtres magiques restaient une fosse sans fond dans laquelle il ne se lassait jamais de creuser, constatait Dwen en contemplant sans percevoir ne serait-ce qu’un infime trait, de la jeune fille à ses côtés, être de neige et de sang au milieu de ces cadavres, et pourtant si loin d’eux. Elle était omniprésente, et il était en train de se rendre compte qu’il l’avait déjà constaté, avant même qu’elle ne se matérialise pour le sauver.

L’avantage d’un malheur sans doute. Tout réaliser rien que par les frémissements de ce qui entoure, sans le décerner parmi le brouillard incessant. Ses yeux n’avaient nul besoin de suivre ses mouvements pour la deviner, ses pieds lui suffisaient. Une imperceptible vibration dans le sol remonta jusqu’à ses plantes de pieds lorsqu’elle se courba, alors que ses cheveux l’atteignaient et l’électrisaient en le ravissant tout en même temps. Sa voix s’éleva et parvint jusqu’à ses oreilles, cristalline et mouvante, se courbant dans les airs pour mieux l’atteindre. Elle était fragile et forte. Glace inébranlable et eau dérivante. L’eau a la particularité de toujours trouver une issue pour s’y infiltrer sans peine aucune. Elle découvrit la sienne.


« Où étais-tu ? »


Et bien…


Une infinité de couleurs chatoyantes et sombres qui se mélangent, s’apprécient et se rencontrent, pour ne former plus qu’une et ensuite se séparer, se répandre dans les coins les plus oubliés… Une forêt apparaît, enchevêtrement de branches noueuses et rigoureuses, de feuilles verdoyantes pointées vers le ciel, d’humus composé d’os d’animaux et de pourritures d’écorce. Un cadavre. Des doigts blanchis au milieu d’une herbe sèche d’été, un crâne aux orbites vides tournées vers la terre. Il n’avait rien vu. Il n’avait pu que le sentir. Cet esprit régnant en ces lieux, et dont le rire faisait encore écho à travers les troncs. La rancœur était-elle encore persistante ? Il ne savait pas. Il lui semblait que son fantôme avait eu quelque part ce qu’il souhaitait. Leurs morts à tous. Vraiment, la mère de Dwenyös Way pouvait reposer en paix. Ou pas. N’avait-elle pas voulu sa mort à lui aussi, extrait de la semence de celui qu’elle avait le plus détesté au monde ?

Puis, ça avait été les régions aux alentours, les villes et les petits villages jusqu’auxquels il avait marché inlassablement, se souciant bien peu de l’état de ses pieds. L’aveugle avait voulu constater de ses propres yeux que la vie reprenait peu à peu ses droits sur la mort qu’avait engendré ses origines. Jeter un dernier regard sur son ancienne existence, puis se détourner, sans un regard en arrière, voilà ce qu’il avait souhaité faire. Et ce qu’il avait fait. Mais était-ce là la bonne solution ? Que fais-tu ici petit être ? Où te conduisent tes pas dirigés à l’aveuglette ? Il ne savait, et continuait sa route. Plus poussée, plus lointaine. Il voulait avancer encore. Pour ne pas laisser de regret. Pour ne pas culpabiliser. Ou le moins possible en tout cas.

Le nymphe avait cru oublier dans d’autres pays, d’autres contrées. Il avait espéré rencontrer des gens différents, de nouveaux horizons qui auraient élargis son but et sa destination, lui auraient fait oublier ce vers quoi il aspirait. Il ne comptait plus le nombre de jour où le soleil avait brûlé son dos des heures durant, voulant atteindre les prochains remparts sans faire de halte. Le nombre de brigands rencontrés et d’ennemis potentiels croisés. Il avait eu de la chance. Beaucoup de chance. Finalement, il était parvenu à tous les endroits où il avait désiré se rendre. Il avait grandi et accrut ses connaissances, ainsi que sa force, auprès de sages et autres, car il n’est pas besoin que l’autre soit vraiment érudit pour apprendre de lui. Le fils d’Anowen retournait à présent à Elament avec la perspective d’éradiquer la cause de toute sa haine. Du moins le pensait-il.

Et là, sous la voûte céleste, si près de la Cité tant chérie, bercé par le cri des quelques oiseaux résonnant au loin, se redressant tout en époussetant son manteau pour aller ramasser son bâton traînant dans la poussière, il songeait. L’atmosphère était trop chargée, trop remplie de rouille et d’acier pour ne pas deviner, ne serait-ce qu’émettre la possibilité que la paix avait été brisée pendant qu’il était ailleurs. Chacun de ses sens l’en informait. Et elle aussi, son murmure recelant de secret et vérité enfouis, ainsi que dans chacun de ses gestes. Cela n’était pas le hasard. Le hasard n’existe pas, il l’avait appris depuis longtemps.

Dwenyös Way fit face à celle dont la main avait rencontré la sienne en même temps leurs deux vies s’étaient frôlées. Celle dont le sort avait glissé entre ses doigts et qui en réponse avait retenu le sien quelques minutes auparavant. Une vie pour une vie, c’était la loi éternelle.


« Dans d’anciens endroits qu’il me fallait revoir. Et dans d’autres que je devais découvrir. Mais ça n’a pas d’importance, maintenant que je suis revenu, je vois bien que je n’aurais jamais dû m’y rendre. Que s’est-il passé ? Ca sent la mort… »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyMar 19 Fév 2008 - 19:16

Fallait-il plus de mot ?
Il était aveugle et sa voix aussi se faisait avare. Mais elle lui pardonna et, baissant les yeux et courbant le visage en signe de reconnaissance, elle accepta de même sa réponse. Il est des secrets qu'il ne faut révéler, d'autres qu'il ne faut pas même se remémorer. Elle-même, plus que quiconque peut-être, le savait. Cet enseignement avait laissé dans son âme plus que dans sa chaire de vives cicatrices qui, pour une fois, n'avait pas disparu sous la puissance de sa magie.

Ruby se releva lentement en flairant l'air, décryptant par ses narines tout ce qu'elle pouvait percevoir. L'odeur musquée d'une sente de proie, l'odeur de la lavande, des lys, des fraises et des mures des bois. L'odeur du sang, de la pourriture, de la sueur et, plus profonde et plus forte, l'effluve de la mort et des boyaux vidés, l'odeur des cadavres tout frais. D'une façon particulièrement malsaine, l'eau lui vint à la bouche à l'idée de la chaire encore saignante, des muscles glissants sous sa langue lorsqu'elle mastiquerai.

Mais la jeune fille détourna la tête face aux dépouilles et se concentra plus avant sur le sens véritable de la question. Il ne pouvait pas sentir comme elle les mêmes odeurs, il parlait d'autre chose. Seulement, trop habituée à la compagnie des bêtes, la jeune fille avait presque oublié le sens de la subtilité. D'un geste las, elle se gratta derrière l'oreille, et murmura pour elle-même, pour lui ou pour la nuit :


« Tant de choses mais si peu d'importante. Quelques conflits, des pertes. Mais la reconstruction a sonné depuis quelques temps déjà. »

Du gros orteils, elle déplaça une pierre, impatience de bouger, lassée d'être immobile, au bord d'un chemin fréquenté. Coulante comme un serpent, elle s'approcha néanmoins de son ancien sauveur et flaira son corps de façon presque sensuelle. Provoquante, toujours, et toujours sans s'en rendre compte. Ou, si elle en avait conscience, usait-elle de cette manie sans pensées négatives derrière.

Ruby recula, un sourcil interrogateur, le trouble dan la voix :


« Tu portes l'odeur des démons. » Puis, ignorante d'une réalité qu'elle ne pouvait connaître « Ce n'est pas la première fois que tu te fais attaquer, hein ? »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyJeu 6 Mar 2008 - 13:02

Theme musical

Le noir. Insondable.


Et dans le noir, de douces voluptés aux mille et une senteurs, antiques parfums pour unique moyen de repère. Elle, elle sentait la bête, la pureté, le sang, la neige humide, tout ceci à la fois, cristal translucide impossible à saisir, glissant entre ses souvenirs, la voilà qui avait ressurgit avec légèreté pour mieux le prendre de court. Chaque parole que sa bouche glissait pour combler l’obscurité était une ruche de secrets qui à cet instant bourdonnaient en lui, réveillant le goût amer de la défaite et du remord, l’étalant sur sa langue pour mieux lui en faire sentir l’acide texture. Il déglutit. Au loin, il écoutait les bruits de la nuit qui les abritait de son manteau étoilé, les garantissant à l’abri de la lumière éclairant au grand jour ce qui ne doit être dévoilé, mais ceci ne serait pas. Calfeutré dans son silence et dans ses ténèbres, il était en sécurité. Ne plus rien voir. Ne plus rien dire. Ne plus rien entendre. Ah, impossible de satisfaire cette requête, la privation d’un des sens avait déjà été comblée.

Masqué, son visage demeura clos à l’averse des sentiments qu’il aurait pu ressentir face à cette avalanche de flèches bien ajustées. Se fondre dans le tout et n’être plus, c’était en là qu’était la clé. Une vibration. Comme autrefois. Réflexe, Dwen, réflexe. Autonome, son pied à la couleur de miel effleura la terre, frôlant les tendres grains de poussières et les minuscules granulés. Il apprécia la douceur d’un pétale qui n’avait été qu’à quelques millimètres de lui, un bourgeon éclos aux premiers effluves du printemps, tendant pressement sa corolle à l’astre solaire pour mieux s’épanouir. Un orteil se replia, serait-ce pour flatter la jeune pousse ou son propriétaire se crisperait-il ? Qu’importe, ce n’est pas de son ressort, et voilà la plante de pied qui revient au sol, immuable.

Fauve gracieux et dangereux, elle évolua vers lui, plus blanche que la fleur rattachée aux racines de la terre, légère comme un vent d’ouest, des serres acérés dissimulés avec candeur sous un voile de pureté. Une charmante vision en vérité, pour ceux qui n’avaient rien à craindre de la louve, s’il en existait un tant soit peu en ce monde. Audacieuse, son flair le parcourut, comme on sent une proie, un autre animal, ou un autre être pour l’identifier, un être chétif tout simplement, car, craintif, il se laissa faire. Le mâle en lui respira l’odeur féminine qui s’émanait d’elle, une odeur de vierge se mêlant agréablement à celle du lys, des bois, et de la feuille humide de rosée. Le nymphe, quant à lui, ne put que contrôler un irrésistible frisson longeant sa colonne vertébrale et détourner la tête, fixant un point invisible dans le lointain, lui offrant le temps nécessaire pour satisfaire sa curiosité. Sa main serra plus fort ses doigts fins sur son bâton. Et elle s’évanouit, s’échappant à nouveau, le fuyant lui et son obscurité.

Et dans le noir, que se passait-il ?
Que se passait-il dans l’antre sarclée de pierre et coupée du monde ?
Que résonnait-il dans la grotte inébranlable ?


Dans les profondeurs insaisissables s’élevait le murmure d’une complainte sans nom et sans parole qui chantait des temps passés et immémoriaux, à la mortalité terrifiante tant ils ne reviendraient plus jamais. Le bruit naissant s’élevait pour venir frapper à la paroi grisâtre et se répercuter d’un bond à l’autre impasse rocheuse. Des syllabes se frayaient un chemin sinueux dans ce chaos de sons et de chœurs, formant des noms inachevés. L’étrange requiem modula encore quelques notes indéchiffrables, derniers souvenirs des défunts déjà oubliés et nourrissant l’humus saupoudré d’herbe neuve et de floraison déjà grandissante. Une vague légère de sang et de rouille passa, puis retomba, se chargeant d’une senteur nouvelle, irradiant de parfums floraux. Après la morsure de l’hiver, la douceur du printemps. Ainsi soit-il. Mais qu’en est-il de la mémoire qui elle, demeure intacte, semblable aux pierres inchangées à travers les âges ? A ces mots, la musique meurt. Un temps coule, larme unique et limpide. Et là, ça survient, clair et lumineux, goutte d’espoir dans le lac de la mélancolie. Layna. Blanc. Noir. Terré dans le noir à jamais, petit nymphe. Dans le noir elle repose, sereine, et toi prisonnier.

Un souffle manqua à Dwenyös, ou à la Terre entière.
Je ne sais plus.
Puis la vie reprit ses droits.


Et elle s’évanouir, s’échappant à nouveau, le fuyant lui et son obscurité. Fuyant le parasite accroché à lui comme l’aurait été un membre de trop. La présence pestilentielle de l’ombre et de la mort, et de la haine aussi. Il s’autorisa même un sourire, quoique forcé. Elle n’avait pas eu besoin d’en dire plus, il comprenait tout maintenant. Le spectre de la faucheuse avait traversé Elament, emportant autant d’âmes qu’il lui était possible, et son bon vouloir avait arraché à leurs misérables existences celle bien trop précieuse de celle qui avait été dotée de tous les dons. Ses pupilles de néant eurent une image brouillée de l’elfe élancée aux cheveux roux, celle qui s’était penché un jour sur un être insignifiant, déposé comme un paquet de linge sale aux abords de la Cité par un démon qui venait à peine de lui octroyer sa cécité. Elle avait touché sa souillure sans peur et n’avait montré aucune répulsion face aux gestes. Combien auraient reculé s’il leur avait révélé son essence profonde et la noirceur qui grimpait au fil des jours, entrelaçant son être des lianes de la vengeance et de la rancœur cumulées ?

L’être de neige l’observa de ses iris écarlates, il la sentait, le scrutant en l’attente d’une réponse face à son simple sourire sans sens pour elle. Conscient d’une ironie du sort que lui seul pouvait percevoir, il se détourna, admirant un horizon perçu uniquement par lui, où ici Elament au repos, préparée pour la nuit, miroitait, image de splendeur fragile mais bien présente. Puis, son visage se baissa, laissant couler autour les mèches blondes qui dissimulèrent son profil.


« Je ne pensais pas que cela pouvait se sentir… Pourtant venant de toi, ça ne m’étonne pas. »


Elle n’était pas comme eux, pas comme le reste. Elle, elle sentait la forêt et les animaux. Les animaux qui, mus par leurs instincts les plus primitifs, ne se fiaient qu’à leur odorat. Après tout, c’était de cette manière qu’ils s’étaient reconnus, émergeant du passé l’un de l’autre. L’odeur, une barrière de sécurité en soi. N’avait-il pas, dans une lointaine existence, grandi parmi les bêtes et celle qui lui tenait lieu de mère ?

« Vrai. Le chemin jusqu’ici n’est pas sans danger. »

Qu’est-ce que la confiance ? Il lui semblait qu’elle n’était basée que trop souvent sur des impressions. L’impression qui le régissait en cet instant même l’autorisait-il à lui faire confiance ? Dwenyös Way n’était pas un de ces êtres qui se confient. Trop de temps s’était passé sans qu’une oreille attentive ne se soit dressée sur sa route. Ses pensées, il avait appris à les garder pour lui. Cela valait mieux pour tout le monde à vrai dire. Pourtant, il se surprenait à s’intéresser à elle, à vouloir savoir… Elle n’était pas comme eux. Et le nymphe était réputé pour être intrigué devant tout ce qui sortait de l’ordinaire. L’être de glace le terrifiait tout en le fascinant. Quel était donc sa valeur ? Quel était la valeur de ce qui ne devait être révélé entre les mains d’albâtre ? De plus, il supposait pleinement qu’une simple excuse ne satisferait pas ses attentes, il se doutait que l’odeur sur lui était beaucoup trop présente et forte pour n’être due qu’au trajet qu’il avait accompli pour revenir à Elament. Iblîs le suivait depuis tellement de temps, son empreinte était marquée sur lui comme au fer blanc. Sans mouvement aucun, il parla à nouveau.

« Mais ton odorat ne saurait mentir, il est donc inutile que je le fasse. Ce n’est pas la première fois en effet, dans le passé un démon a trouvé bon de me suivre à la trace. »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyMar 22 Avr 2008 - 17:52

On pouvait passer par la mort et en ressortir plus vierge encore qu'un nouveau né.
On pouvait être blessé, torturé jusqu'à l'agonie terminée, et s'en sortir, le corps encore grogi par la douleur. La torture.. La torture véritable, Ruby aimait à se dire que c'était d'être un humain, de vivre, inconscient de la beauté de la vie, de la floraison, de l'avancée des saisons, du changement perpétuel de l'univers. D'exister, mû par le seul but d'exister. Mais une vie malsaine, pas de la qualité de celle d'un louveteau ou d'une perdrix, une vie de larve, de chrysalide.

De Chrysalide...

Enfermé dans un étroite prison, incapable de bouger, et se souvenir de tout. Du passé, de son présent. Et espérer un avenir, le prévoir, encore et encore. Jusqu'à ce qu'on se perde, finalement.
Une vie de chrysalide.

On ne pouvait pas apprendre à une chrysalide à ne pas bouger. On ne pouvait pas apprendre à Ruby à ne pas vivre. Aussi se moqua-t-elle un instant des secrets cachés derrière ces mots, des douleurs, des épreuves traversées. Qu'importe le passé ? Rien. Sauf s'il laisse sa trace, vive, éternelle, sur la peau, et que l'on ne possède aucun moyen de l'effacer. Comme sa propre odeur.

Un démon a trouvé bon de me suivre à la trace.

Un démon. Dans le passé. Un démon. Plus aujourd'hui. L'acte était donc accompli, ou la douleur recueillit. Le jeune homme devant elle avait donc t-il été une proie ? Une proie terriblement facile à avoir. Qui peut ne pas frapper quelqu'un qui a les yeux fermés ? Une proie difficile à pister. Quand on a le pouvoir de la terre, seul voler peut nous aider...

Elle ne lui posa pas plus de question là dessus. Pourtant...

Pourtant, dans son nez, l'odeur froide des reptiles lui chatouilla le cerveau, lui donnant la nausée, nouant une rude boule de peur dans ses entrailles. Un mauvais pressentiment lui tenailla les sens une seconde à peine. Juste de quoi laisser le temps au vent de balayer ses cheveux, de faire le ménage dans ses craintes.

Futilité. Tout cela n'était que futilité.

Mais lorsqu'on était un prédateur, et une proie, on accordait de l'importance à la moindre de ses sensations. Et à ses yeux, derrière ses paupières closes, revinrent les images d'un froid plus puissant encore que le plus terrible des hivers et enfouie sur tout cela, la douleur. Bien plus atroce que tout ce que l'imaginaire pouvait créer...

Ruby déglutit une salive qui lui sembla de pierre. Elle comprenait ce que c'était que de rencontrer certains démons, même si elle ne savait pas qui était celui que le jeune homme avait prit pour proie...

" Que sa chair nourrisse les charognards et les vers et que ses os pourrissent sous terre. " [i]pria la Louve dans un murmure.

Puis elle se retourna vers le chemin qui menait à la Cité. Serpent de terre, langue de poussière, tout cela à la fois. Elle pouvait gober les distances comme un oeuf avec son pouvoir. Flocons, neige et eau à la fois, voletant comme un oiseau, emportée dans le vent, si les vents appréciaient de se plier à ses désirs. Sinon, elle se perdait, loin, bien plus loin encore qu'on ne pouvait l'imaginer. Nuage en perdition.

Elle crispa ses orteils, emprisonnant de la terre entre eux, creusant de mini-sillons sur le sol. Sa peau blanche se tâcha d'ocre.

Oui, il y avait cette voie aussi.
Celle des nappes d'eau sous-terraines, celle des rigoles, entre les herbes. Fondre, se diluer, se perdre, mais rester une, entière, entité douée de raison. S'insinuer dans la terre, aspirée par elle. Puis tomber, encore et encore, et rejoindre des lacs si grands, si profonds, que la cité à côté prenait l'air d'îlot, prenait l'air d'un noeud sur la surface dure d'un tronc d'arbre. Glisser, ou dériver, vers les cours d'eau, remonter enfin, une fois la voie trouver. Mais là encore, on ne pouvait ressortir que dans une flaque, que dans de l'eau. L'entrainement apportait le reste.


" As-tu besoin d'un guide vers la Cité ? "

N'avait-elle pas juré de ne plus y retourner ...

Ciel... Les promesses n'engageaient donc véritablement que ceux qui les recevaient. Elle s'était menti à elle-même, encore. Mais, après tout, n'avait-elle pas laissé flotter une possibilité, si infime soit-elle, qu'elle puisse revenir ? La Louve avait attendu un signe, un simple signe, qui se trouvait finalement incarné dans un jeune homme...

C'était un jeu d'enfant...
S'il me pleut sur la main, je lui dirai que je l'aime, mais que si elle met le pied sur cette dalle. Si l'oiseau s'envole avant qu'elle ouvre la porte, j'irai la voir plus tard...
C'était des jeux d'enfant qui dictaient la vie des gens.

Mais c'était également les scènes impossible qu'on aurait bien voulu qu'il se passe.
J'aurais du lui dire ça et là, elle m'aurai frappé puis j'aurais riposté comme j'ai vu Layna le faire pendant la bataille. Puis je serais rentré et tout ce serai bien passé et je ne me poserai pas plein de questions là. j'aurai du faire ça, je le savais...


" Sauf si tu ne comptes pas réellement y retourner... "

Dans sa voix perçait une lente mélancolie qui puisqu'elle avait le dos tourné, ne se remarquait pas - pour elle. Ruby se retint de soupirer. Allait-elle le regretter ? Qui sait... Pourtant, elle avait envie de retourner dans cette prison de pierre et de terre, de s'enfermer dans les murs de marbre de ces salles de classe sentant le renfermé. Elle voulait vivre sur les remparts, cheminer toute la nuit sur la muraille, aux agets, prête à pourfendre, à défendre, à recommencer. Et à redonner sa vie s'il le fallait, pour cette meute qui, de toute façon, la rejetterai encore.
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyDim 29 Juin 2008 - 22:59

Thème musical

Les erreurs. Elles constituaient l’essence même de notre passé et l’aboutissement de notre présent.


Tout cela aurait pu être tellement plus lumineux… Un monde paisible, un monde sans crainte. Oui, aujourd’hui nous aurions pu simplement nous délecter de la chaleur du soleil en marchant sur l’herbe humide, heureux par la simple sensation des caresses sous nos pieds, et celles du vent sur nos visages aussi, vivant juste pour cette seconde. Comme un papillon de nuit qui se ravit de la lumière éblouissante durant une seconde, une décennie… Avant de se brûler. Les idéaux ne sont pas pour nous. Pour notre monde, les bains de sang et les amas d’os ont été réservés depuis la nuit des temps, semblables à la roue qui tourne, lentement, inlassablement…Puis, la charrette s’arrête, s’enfonçant dans la terre battue et gluante, avant d’en être arrachée pour reprendre sa course infinie. Un cycle irrévocable dont chacun est un rayon qui peut en croiser un autre. Voilà le lot, voilà l’héritage.

Voilà ce que l’on offre. Et Dwenyös songea à la cruauté des lois de l’ascendance. Prendre ce qui vient sans se plaindre, ne pas protester et faire avec, et pourquoi ? Parce qu’à l’heure où nous pouvons goûter les mets naturels de l’existence, où elles se dévoilent à nos yeux de nouveaux nés, nous sommes justes trop faibles. C’est un songe fugace et merveilleuse qui dure assez longtemps pour que l’on en rêve tout le reste de notre existence, et après vient la douleur. La douleur de vivre avec ce fardeau qui s’appelle l’héritage. Il la revoit, celle qui lui a mis de force dans les mains. Dans les bois, dans l’ombre des grands chênes aux feuillages impénétrables, ils sont confinés ici, et lui, il ne peut pas s’échapper de cette prison de bois et de lierre, bordée par des ronces plus griffues que des bêtes. Non, il faut rester, il faut rester près de celle qui lui a offert ça… La vie. Pour ce court moment d’extase quand il a vu le jour, elle lui fera payée pour sa propre douleur, son propre orgueil…

C’était ça, le présent de l’existence. Evoluer sur cette Terre où chacun avait en main les armes léguées depuis des générations. La haine. La colère. Le meurtre. Au fond, si son chemin avait croisé celui d’un démon, était-ce vraiment le fruit du hasard ? N’y avait-il pas là le résultat de toute une décennie de félonie, de destruction accumulée ? En mettant au creux de ses mains sa propre douleur, ne l’avait-elle pas tourné sciemment vers la voie de la vengeance, lui enfonçant le goût cuivré dans la bouche ? La guerre des hommes, leur fourberie… L’étrange cadeau qu’était celui de la génétique ne lui offrait-il pas les clés prédéfinies de son existence ? Qui donc faisait avancer la charrue à travers les champs de verdure ? Qui tenait les rênes ? Qui donc en avait décidé ainsi ? De nos vies dont nous aurions pu aimer chaque jour passant avec tellement de candeur… Qui avait lâché la goutte du sang sur la feuille blanche ?

C’était pour ça. C’était pour ça qu’il fallait y aller.
Dans cette Cité.
Si belle Cité en dehors des querelles du monde.
Régie uniquement par les éléments.


Un vent passa sur eux, et quelque part, une roue tourna, poussée par un courant d’air qui dura le temps d’un souffle. Près de lui, il la sentait, la louve, l’être des neiges inatteignable et tellement redoutable. Quel était donc son fardeau à elle ? Qu’est-ce que le destin lui avait placé entre les mains ? La glace, le sang, l’odeur de la meute…Ah, tant de puissance en une seule personne, pensa t-il, et un frisson le parcourut, entrevoyant dans un bref éclair tout ce qu’elle représentait, tout ce qu’elle était. Dos à lui, elle le questionnait sur sa propre vie, comme si leurs deux liens n’avaient fait que se nouer pour l’unique jeu du hasard, un simple embranchement dans leurs existences… Leur rencontre s’était-elle vraiment faite sans action de la part du meneur de charrette ? Le visage du non voyant se tourna vers la fille des glaces, de ses paupières vides, que voyait-il d’elle ? Tout ce que les iris regorgeant de vie ne pouvaient percevoir…


« Où pourrais-je aller sinon ici ? »

Alors, son attention se reporta sur la route menant jusqu’à Elament, seul foyer possible pour lui à ses yeux. N’était-ce pas le seul endroit qui lui tendrait jamais les bras ? Quel autre refuge avaient-ils, lui et elle ? Pour ceux de leur espèce, ceux en communion avec la nature environnante, à part se livrer à elle, y vivre inlassablement, il n’y aurait jamais pour eux un accord aussi parfait avec les éléments que là-bas, au creux de ces remparts au loin. Entre les bras de la Cité, les lueurs s’allumaient, faible lumière dans la nuit tombante, mais pourtant bien présente, témoignant de la vie grouillante à l’intérieure. A l’heure actuelle, les habitants se couchaient, se laissant envahir par l’intimité des rêves, ou d’autres sillonnaient les rues, montaient jusqu’au sommet des tours, peut-être dans les rues des saltimbanques étaient en train de danser ou de chanter une quelconque chanson venue d’ailleurs…Cet univers représentait pour le nymphe les siens, ceux entre qui il avait sa place. Entre les murs d’Elament, il n’était plus le fils de ceux qu’il avait tant détesté, il était Dwen, aveugle, certes, mais Dwen tout simplement. Là-bas, il pouvait oublier le sang royal coulant dans ses veines, se mêlant à celui de la haine, puisque les autres n’en avaient pas conscience.

« Il serait inutile de faire marche arrière. Une route est faite pour être suivie. »

A la proposition de celle près de lui, il acquiesça, un sourire venant orner ses lèvres par le simple plaisir de finir son voyage avec de la compagnie.

« Je veux bien, oui. »

Ses pieds nus se mirent alors en marche, épousant les contours de la terre, contournant les cailloux, se posant sur les bosses. L’écho rocheuse sous la plante de ses pieds amenaient jusqu’à lui l’activité permanente des animaux les plus minimes dans les recoins feuillus, lui prodiguant une sensation d’harmonie dont il ne pourrait jamais se lasser. Un instant, l’odeur qu’il avait sentie en arrivant sur les lieux lui revint à nouveau. Les cendres encore fraîches de la guerre…L’éclat des armes et le chant du fer sifflant dans les airs.

« Après ne pas avoir été présent lors de la lutte contre les démons, je suppose qu’il est normal de revenir pour aider dans ce qu’il reste à accomplir… »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyLun 21 Juil 2008 - 20:14

[ Bon, autant pas le cacher, ces deux mois sans rp m'ont un peu traumatisés u_u .... contente toi donc de ce message baclé à la va-vite parce que ça m'énervait de le faire moche en attendant que je retrouve un peu la forme et l'habitude du clavier xD désolée ! ]

Tant de sagesse dans la voix d'un enfant.

Savait-il qu'en parlant, il répondait aussi aux questions que l'être de neige et de sang se posait à elle-même ? Aller là parce que, de toute façon, il n'y avait aucun lieu où elle pourrait aller. Pas totalement louve, mais pas totalement humaine, incapable de vivre avec les animaux comme de cohabiter avec les humains... Elle était l'unique représentante de sa race. Non pas qu'il n'existait plus de cristalléen sur terre, mais aucun n'était passé par là où elle était-elle même passée. Personne n'avait senti le fil acéré de la faucheuse autant de fois qu'elle.

Une survivante ? Oui, mais pas comme ceux qui affrontent le courroux d'un pair et se disent " j'ai survécu, ce n'était pas si horrible ". Non, sa survie à elle s'entendait au sens propre du terme. Passer au travers de la mort. Ou plutôt en revenir. Et de là, nulle part où aller. Mais, inflexible, la jeune fille au teint blanc réprima fermement la peine, les regrets et la douleur derrière une muraille insurmontable et avança du pas léger des fées, du pas inaudible des loups, les mots cadenassés derrière sa bouche, maniant le silence avec la force de ceux qui en savent la puissance.

Tant d'étoiles sur la voute du firmament, tant de lumière offerte par elles. Et au dessus de tout cela, une lune invisible, l'obscurité partout, mais pas pour elle. Nyctalopie, un don que ne pourrait jamais connaître le jeune homme, étouffé par la noirceur pour toute sa vie... Son baton caressait le sol avant que ses pieds ne se posent, bien trop bruyant aux oreilles sauvages de la jeune femme dénudée. Son esprit se tendit alors dans la transe méditative qui prend ceux qui ne s'occupe plus de la vie.

Puis l'odeur collante de la triste humanité parvint jusqu'à ses narines.

Que dire de plus ? Comment décrire une odeur pareille ? Mélange d'égout, de sueur, et l'odeur entêtant de la fumée du bois. Le feu. L'été n'approchait-il pas ? Ruby s'en moquait et de ce fait, écarta cette pensée de son esprit pour se diriger vers le jeune garçon à côté d'elle. Son odeur à lui était autre. Fragrances de bois, de menthe et de la poussière des chemins, avec celle des sous-bois. Etait-ce propre à sa race ? Mais, bien en dessous, il y avait l'effluve sombre du mal. Une effluve que Ruby connaissait mais dont son esprit ne voulait pas se remémorer l'origine. Cela lui rappelait l'oppression, comme un poids sur son corps, un poids désagréable, et au fond de son estomac, le vide de la faim. en parlant de nourriture, les alentours de la cité ne devait plus être aussi giboyeux qu'autrefois, qu'avant la guerre, qu'avant le tapage barbare du métal contre du métal.

D'ailleurs, quel plaisir prenaient les humains à extraire du sol du métal et à le fondre pour en faire des armes ? Leurs seuls attributs naturels n'étaient-ils donc pas à la hauteur des combats qu'ils voulaient mener ? Puis combattre ne servait à rien. Il y en avait assez de combattre et de faire des chasses qui ne rapportent pas de viande, oui oui oui ! Des chasses qui insensibilisent le coeur et font de l'esprit une alcôve à la stupidité. certes, être idiot n'avait jamais tué, mais il ne s'en était fallu que d'un cheveux, avant.

Des cheveux sombres, des cheveux blancs. Des cheveux d'hommes qui l'enviaient et la désiraient de façon tout aussi torturées et étranges qu'était torturé et étrange le fait de chasser sans rapporter de viande... Le sang. La chaleur. La chaleur du sang sur sa peau ou d'une peau contre la sienne. Que dirait Shin lorsqu'il apprendrai qu'en fin de compte, elle n'était pas partie ? " Je le savais" ? Oui, ce serai sûrement ça, la Louve avait été tellement prévisible... Faire une promesse qu'elle ne pouvait, en tout était de cause, pas tenir... Mais bon, elle pouvait toujours sortir de la cité quand bon lui semblerait, mais elle était également sûre que, de toute façon, sa vie à l'intérieur de cette vaste demeure de pierre changerai du tout au tout.

Ou pas.

Devant les portes, elle ne héla personne, ne justifia ni n'affirma sa présence en ces lieux, comme si, de tout autre endroit, c'est ici qu'elle devait se trouver. Quoi de plus "normal", comme il avait dit, quelques instants auparavant. Ou quelques heures. Baste, le temps n'avait pas d'importance. Elle ne toucha pas plus l'insigne qui représentait son élément : les portes avaient été endommagées et ne répondaient pas toujours aux touchés salis des visiteurs. A la place, elle ouvrit largement on esprit, diffusa tout autour d'elle une vague de puissance et, la cité, la reconnaissant pour ce qu'elle était comme elle ne l'aurait pas fait pour un autre, obéit et l'accueillit.


" Suis-moi avec confiance, je te mènerai là où personne ne s'intéressera à ta vie, ou là où tout le monde voudra connaître tes origines. " Elle ne lui fit pas l'affront de lui conseiller le silence au question, comme il répondait l'aveuglement à la curiosité.
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyMar 12 Aoû 2008 - 12:42

Après les combats, après le sang versé, après le repos…

Le silence. Tout simplement.


Il la laissa venir à lui. Ses pieds, sans protection contre la rudesse du sol, vêtus de leur simple peau, stoppèrent quand, sans la voir, il la sentit s’approcher de lui, celle qui se proposait comme guide dans son obscurité. Pendant un souffle, un instant, mille ans, parvint à ses narines une odeur fraîche, une sensation de glace, un parfum de bois et de henné, mêlé à la plus subtile des fleurs, ainsi qu’un nuage de poussière, de crocs et de cuivre. Vestiges de guerre qu’elle portait en permanence sur elle, sans doute. Une caresse éphémère sur son bras. Un de ses longs cheveux dont il ne pouvait que deviner la couleur de l’épiderme, à défaut de la voir. Elle le dépassa, sans s’arrêter, et elle continua, sans lui prêter plus d’attention maintenant que l’échange était terminé.

Un autre lui aurait peut-être pris la main, de crainte qu’il ne se perde ou ne s’y retrouve. L’aqua devant lui échappa à la règle, filant sur la route menant vers leur unique foyer, sachant qu’il la suivait sans qu’il y ait besoin de contact ou d’appel, et, en effet, il la suivit. Rien de plus simple pour ce prince déshérité, dont les seuls joyaux se limitaient aux cailloux de la terre, que de percevoir les ondes venant du sol et allant effleurer la plante de ses pieds. Son allure, son pas, le rythme auquel chacun de ses doigts de pieds venait épouser le chemin, il pouvait tout savoir. Et si par fatalité, il ne s’y serait plus retrouvé, comme dans les premiers jours où il avait appris à apprivoiser sa cécité, alors, l’être des glaces l’aurait su, et l’aurait attendu. Peut-être la louve aurait grogné, impatiente, mais qu’importe, nous ne le saurons jamais. Car cet être au sang royal et perdu était trop fier pour avouer une quelconque faiblesse. Alors, ses pieds bardés de minuscules cicatrices, souvenirs de chutes et d’incertitude, allèrent dans les traces laissées par celle qui le devançait, et ainsi la suivirent.

Le silence entre ces deux êtres reliés par une simple dette.

Pour seule musique, la rumeur de la Cité.

Les éclats de voix. Les rires.

Comme un retour à la vie.


Et à quoi songeaient-ils ? Lui passait en revue tout ceux qu’il allait voir, et tout ceux dont il ne pourrait plus jamais entendre la voix. Combien étaient tombés au combat ? Combien d’os pourrissaient sous la terre en ce moment-même ? Et puis vint la pensée la plus sombre en son esprit… Combien étaient morts par les griffes du Marcheur de l’Ombre ? Dans sa bouche, un goût amer parvint, lui rappelant ce qu’était le sentiment d’impuissance et de souffrance… Le deuil… Combien d’amis lui avaient été arrachés ? Sa main autour de son bâton, fidèle compagnie de ténèbres, se resserra instinctivement alors que sans relâche, il continuait d’avancer. Iblîs… Allait-il le croiser ? Deux ans… Deux ans de répit où il avait cru pouvoir échapper à ce démon, où il avait eu l’audace de croire qu’il pouvait se construire une nouvelle vie. La naïveté ne sera jamais assez grande. Comment peut-on espérer échapper à son passé, à ce que l’on est ?

La paix n’existe pas. Tôt ou tard, il devrait l’affronter.


L’écho de la marche de celle qui était devant lui cessa, alors, il refit surface dans le présent. La porte. La porte d’Elament. Deux ans auparavant, après lui avoir volé ses yeux, l’Ombre le déposait devant. Et pourquoi ? Pourquoi l’offrir en pâture à ces lieux où il allait connaître enfin un sentiment équivoque à celui de posséder une famille, d’être apprécié… Mais pas pour ce qu’il était réellement. Sans mot dire, la louve ouvrit la porte, leur permettant l’accès à la Cité. Un battement de cœur lui manqua quand, surgit de son obscurité, il palpa tout le pouvoir qu’elle jetait négligemment hors d’elle, pour l’envoyer frapper la muraille qui faiblit sous le coup. Puis, sa voix s’éleva, une seule phrase qu’elle lui adressa, unique et simple, mais débordante de sens pourtant. Malgré lui, un sourire lui échappa, mélange d’ironie, mais envers qui ? Il ne le savait pas.


« Qui voudrait connaître les origines de Dwen l’aveugle ? Les connaît-il réellement lui-même au moins ? Mais si tu connais quelqu’un pouvant me renseigner sur ce point, quelqu’un qui peut savoir et se moque de savoir, alors je te suis… »
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MessageAu crépuscule... { privé Ruby } EmptyVen 15 Aoû 2008 - 20:03

La blessure qui l'habitait pouvait presque être palpable.
C'était une sorte de mélange de douleur, de peur et de regret. Et avec en dessous, une sorte de mépris pour ses propres croyances. Mais, sur quoi peuvent bien se fonder les mortels si ce n'est sur leurs croyances, maintenant que les dieux sont morts ? Le sourire que le jeune homme livra à la Cristalléenne aurait pu lui fendre le coeur, pour peu qu'elle en posséda un.

Aussi, à sa question non formulée, ou à ce que Ruby prit comme tel, la jeune femme garda le silence, songeant tout bas.


* Mère Louve... Si je connaissais autant de gens que de gens me connaissent... *
Et il n'y avait dans cette pensée aucun narcissisme, seulement la constatation froide et sincère d'un prédateur.

Il y avait Mickael, qui avait quitté la cité il y a quelques années, puis Sélène, maintenant disparue, Shin, Archael, Lorelaï, éternelle nostalgique ... Mais à part cela... Les professeurs de la cité ? Certains commerçants ? Ruby se rappelait vaguement avoir acheté un diadème en argent à un homme étrange, possesseur d'un haut de forme, voila près de trois ans. Argent et diadème n'étaient maintenant que des morceaux de matière éparpillés sur les Falaises.

Oh, et puis, bien sûr, il y avait Iblis le Sombre, Kaho Long... Et les centaines de carcasses polies par les éléments qui faisaient des abris pour les touffins, dans la forêt...

Ca oui, elle connaissait plein de gens. Mais combien de ces personnes étaient encore en vie ou l'appréciaient ? Bien moins, certes.


" On dit qu'il existe une ermite dans les Monts décharnés. Elle possèderai le pouvoir de lire l'avenir."
murmura la voix métallique de la jeune femme. " Certains l'appellent 'La Marquée' car son corps serait recouvert de runes féériques. D'autres encore l'appellent la Sans Aile, car on raconte que ses deux ailes auraient été arraché, l'une par les démons, l'autre par les habitants eux-même. "

La Cristalléenne ferma les yeux.
C'était très probable, oui, que les habitants aient fait pareille chose. Et dans l'obscurité de cette nuit sans lune, sur son flanc, une cicatrice dorée sembla luire doucement.


" Mais il n'y a que les fous ou les désespérés qui osent aller s'acheter ses faveurs, car on la dit impitoyable envers ceux qui profanent son territoire. "
Ruby émit un rire soufflé. " Ce doit être une fée très charmante, pour avoir des réactions si logiques ! " Mais il n'y avait pas d'ironie dans sa voix. " Mais reprenons. Tu ne trouveras pas de toit pour dormir si nous n'avançons pas."
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