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 Retrouvailles [privé]

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Ruby
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Ruby
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MessageRetrouvailles [privé] EmptyDim 30 Aoû 2009 - 11:01

Arrow Bureau des Professeurs.

La truffe d'un Aile d'Argent vint lui chatouiller la joue, recouvrant sa peau d'une micro pellicule d'humidité qu'elle essuya en ricanant du dos de sa main, avant que celle-ci ne gèle, grommellant par principe. Il faisait nuit, le ciel était clair et la lune était pleine, cette fois encore. Il devait y avoir un charme étrange, pour que ce lieu soit le lieu de toutes ses rencontres. Il était difficile d'accès et ancien, mais l'architecture en était belle et solide, malgré les failles énormes dans les murs de pierre, héritages de la Bataille. L'animal revint amicalement à la charge, et elle l'éclaboussa doucement. Il s'ébroua, lui renvoyant son attaque et s'en alla voler avec ses pairs un peu plus haut dans le ciel, si loin du sol. Mais la jeune femme, elle, restait accroupit sur les merlons du sommet de la tour, le vent à peine tiède de cet été sans fin balayant sa chevelure coiffée - pour une fois.

Des deux tresses qui formaient sa couronne d'une blancheur immaculée, quelques mèches s'étaient échappées, fouettant doucement son crâne sans qu'elle ne s'en rende compte. Sous les étoiles, elle semblait la chose la plus pure au monde, la plus fragile aussi. Mais les images n'étaient que des mensonges, naturellement. Cela, vous vous en étiez doutés. Dans les rues, loin sous elle, le calme régnait, seulement troublé ça et là par des éclats de rires d'ivrognes ou des insultes de bagarreurs. Dans l'ensemble, la cité dormait, les marchés nocturnes ne supplantant pas les marchés diurnes, malgré la diversité des produits vendus. L'astre lunaire était le gardien des échanges douteux et illégaux, mais c'était ainsi que tournait le monde. Elle soupira. Pourquoi donc usait-elle les quelques heures de repos qu'elle pouvait glaner dans ses journées si charger pour courir après un rêve, après une impression ! Elle avait sentit, quelques heures plus tôt, alors qu'elle était le nez dans de la paperasserie administrative, comme un tiraillement au limite de ses sens pourtant développé, un soupir sur la peau de sa nuque. La chair de poule lui en était venue, souvenir d'une ancienne sensation.

Tellement ancienne qu'elle semblait venir des Origines même.
Elle avait alors fouillé dans sa mémoire à la recherche d'une sensation similaire, de poussée et de tiraillement. Seules les ombres lui avaient répondu. Puis elle avait eu un flash : des plumes recouvertes de sang, et le déclic s'était fait... Combien de temps s'était-il écoulé depuis leur dernière entrevue ? Presque un an, non ? Entre-temps, elle était morte, fauchée dans la fleur de l'âge par Shin. Sa mâchoire se contracta à ce souvenir, alors que ses yeux - éclats de feu et de sang - jetaient des éclairs en direction des ténèbres des ruelles. Une ligne d'or parcourait son flanc, doux souvenir de ce délicat instant. Mais elle lui avait pardonné plusieurs fois de suite, aussi, il ne servait à rien de lui en vouloir. Il n'y avait là qu'une stupide erreur de jeunesse, pour elle et pour lui.

L'absence de sang dans ses mollets commença à lui faire mal. Cela et le manque de sommeil l'accusait de cernes noirs, et ses mains tremblaient lorsqu'elle devait faire un effort soutenu - comme monter les millions de marche de cet édifice. Elle changea donc de position, ses jambes pendant maintenant dans le vide. Sa jupe, plus longue derrière, recouvrait le merlon comme une cape, alors que l'avant, plus court, couvrait difficilement ses genoux. A son front, sa tiare brilla d'un éclat mât, lueur pâle de l'argent sous les rayons de la lune. C'était sur sa peau comme une ligne définitive.

Mais que faisait-elle ici... Qu'attendait-elle réellement ? Qu'Archael vienne ? Il devait être retourné à Otulin, et, dans le feu de sa bonne humeur, ne pas se rappeler du lien qui le liait à Ruby. Elle soupira. Il valait mieux qu'elle rentre, manger quelque chose et dormir quelques précieuses heures avant de se remettre à l'ouvrage, avant de poursuivre son mensonge : faire croire que la directrice était malade et qu'elle-même ne faisait qu'assurer une régence temporaire, alors que al dite Directrice avait disparu depuis deux mois. Deux mois... C'était un miracle que les démons n'aient pas attaqué pendant ce laps de temps. Mais ils devaient être encore en train de dompter les guerres intestines dans les enfers, trop occupés à se décapiter les uns les autres pour le pouvoir. Les habitants étaient parfois un peu plus civilisé, mais il s'en fallait de peu pour que ça ne soit pas le cas.

Tiens, si on reparlait de l'Humaine ? Cela faisait à peine trois jours que Ruby l'avait laissé à la Garde de Mélian. La jeune femme réfléchissait toujours à un moyen de faire disparaître cette Sans-Don de la cité, en toute discrétion. Elle pouvait très bien charger un ange ou une autre créature volante de l'emmener par ciel vers sa terre d'origine, qui n'était séparée d'Elament que par un si petit et si mince océan... C'était la chose la plus morale à faire... Oui, c'état la seule solution envisageable, elle en parlerait demain aux conseillés de la ville, sous le nom de Naciniah.

Ses yeux glissèrent de l'infinité du ciel, pour venir caresser la ligne déchiquetée du paysage des monts, situé plus au Nord, puis elle toucha de ses escarboucles l'épaisseur sombre des arbres de la forêt pour venir enfin juger de la muraille claire... Les petits points noirs qui se déplaçaient dessus étaient les curieux et les sentinelles, les Gardiens et les soldats de faction... Les Gardiens... Il faudrait aussi qu'elle fasse arrêter cette gardienne coupable de haute trahison. Pour elle, il n'y aurait qu'une seule chose : la mort par décapitation dans l'Arène. La lettre d'arrestation attendait les premiers messagers de l'aube, sur son bureau, cachetée de son sceau personnel : un arbre à la ramure de flocon rouge, sur fond blanc. Impossible à contrefaire, il était issu de sa magie et d'une cire spéciale qui luisait dans le noir qu'elle avait commandé exprès à un mage de la Cité...

Il y avait tant à faire et elle ne faisait rien, assise au bord du vide, jouant avec la sensation de vertige. Elle était pleine d'une énergie induite par le manque de sommeil, et elle ne chassait pas pour manger. Elle avait de la haine à revendre, et ses pas ne s'étaient pas approchés des Enfers de près ou de loin depuis plusieurs mois. L'inactivité la rongeait aussi sûrement qu'un ver ronge une pomme, et cet état la poussait à un point de nervosité tel qu'elle devait réfléchir à chacun de ses actes en public avant de les faire, de crainte de se montrer trop agressive ou trop brutale, trop méprisante ou trop douce... Tout n'était affaire que de paraître.

Elle s'apprêta à faire demie tour, à descendre, retourner dans son bureau pour se pelotonner dans la glace fraîche qu'un glyphe gardait intacte pour dormir et embrasser de ses lèvres pâles l'oubli pendant quelques heures, lorsque le bruit délicat, le frottement de la peau sur du tissu, attira son attention....
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Archael
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MessageRetrouvailles [privé] EmptyJeu 3 Sep 2009 - 9:33

Il avait passé l'après-midi sur une des tours d'Elament, reposant son organisme fatigué par le vol, tout en s'imprégnant à nouveau des rumeurs de la Cité. Elle lui avait manqué, d'une certaine manière. Différente de la façon dont les grands espaces lui étaent nécessaire - ce n'était pas une soif ardente, un désir inassouvi, mais plutôt la sensation de rentrer où était sa place. Il semblait, obscurément, qu'il s'accordait avec les mille cris de la ville, comme s'il était une pièce d'un immense puzzle. Les voix des élèves se rendant en cours, les cris du marché plus bas, les tintements métalliques des lames de deux Ignis occupés à un duel amical, les cris excités des Nonames dans le parc ... tous distillaient une vague bienvenue, inchangés depuis son départ.

Il avait pris le temps de savourer le soleil qui se couchait, bien quele spectacle soit gâché par une barre de nuages à l'horizon. Même à la cité de magie, les heures du soir n'étaient pas forcément des tableaux de peintres tous les jours ...

Et puis était venu la nuit. Comme chaque jour, alors que les premiers astres allumaient leurs points d'or, la sensation au creux de son ventre se faisait plus forte. A cette heure, généralement, fut-il aussi loin qu'Otulin, ou sur l'île de Sharantyr dans les mers occidentales, il ne pouvait s'empêcher de se lever et de regarder à l'Est. Les Elfes se taisaient alors, échangeant leurs lents sourire comme détenteurs de quelque ancien secret. Devinaient-ils quel appel traversait l'espace, depuis l'autre côté du globe, pour troubler ainsi celui qu'ils avaient nommé Aramë?

Mais ce soir, il était près, tout près. Et jamais l'appel ne fut aussi fort, aussi suave. Il n'était pas dépendant de la volonté de ceux qu'il liait, il n'était pas plus puissant lorsque les pensées conscientes étaient tendues vers l'autre .. non - le Lien avait sa propre existence, se manifestant plus ou moins discrètement selon des lois par nul connues. Pas plus que celui qui reliait subtilement Lén et Tranlthanas, il n'était possible de le définir. Tels étaient les Liens de Vie ... et c'est à cause de lui que l'Ange avait à nouveau décollé, décrivant une large spirale autour de la Tour des Vents. Lorsqu'il se posa au faîte de l'édifice, aucun bruit d'ailes ne se fit entendre - elles ne battaient jamais, se contentant de briller. Mais le vent passait, agitant le bleu manteau de voyage de l'Ange.

Il leva la tête, évaluant les nuages qui courent au-dessus de la Cité. Non, il ne pleuvra pas ce soir. Ni orage, ni pluie, ni brouillard. La nuit ne sera pas semblable à celle qui les a vus seuls ensemble pour la dernière fois, au sommet de cette même tour ... quand la brume les avait isolés au milieu du noir, quand la colère du ciel avait fait écho à celle qui grondait dans leurs coeurs. Aujourd'hui, le ciel est immense et dégagé, un coin de lune levé à l'Est, le bleu du jour s'effilant doucement à l'Ouest. Et le vent qui passe toujours en ces lieux est étrangement calme, le souffle puissant et régulier d'un des grands alizés qui règnent sur le ciel. Dans le dos d'Archael, les deux grandes ailes opalescentes frémissent, comme douées d'une vie secrète. Elles frissonnent, ces fines dentelles de cristal, à la caresse du vent qui les fait résonner - impatientes de s'ouvrir et de gonfler leurs voiles vers cet En-Haut que les attire.

Mais il reste là. Peut-être y a-t-il ici un appel plus puissant encore que celui du ciel. Quelque chose qui l'enchaîne à ce sol dallé, à regarder une silhouette lunaire assise sur le parapet. C'est une vision bien étrange que celle-ci. Vue de dos, l'autre personne présente sur la tour a quelque chose d'irréel. Vue de dos, elle semble une enfant vêtue de blanc, aux longues tresses artistement mêlées. Aussi transparente qu'un flocon posé là, elle est assise, regardant l'espace, sa peau blanche et lisse sur le moellon dur qui cimente la tour. Ce ne peut être qu'une vision... que ferait une enfant ici, en pleine nuit, exposée aux rafales sur la plus haute tour de la Cité? Oui ... et non. Il n'a pas besoin de la voir de face pour savoir que cette personne n'a plus rien de l'enfant. Il le sait depuis la dernière fois où ils se sont rencontrés - non, depuis leur toute première rencontre. La stature n'a pas d'importance. La vie, aveugle gouvernante, préservait certains êtres et en vieillissait d'autres avant l'âge...

Etrange .... alors qu'il avait tout attendu, tant redouté le moment où il retrouverait l'ombre blanche qui hantait sans cesse les abords de sa mémoire, les choses se passent si facilement. C'est à peine s'il ressent une légère nostalgie. Les souvenirs tourmentés de leur dernière rencontre ne le hantent même plus. Son regard se baisse sur le Chanteciel qu'il porte en bandoulière. Est-ce l'instrument réparé qui lui rend la paix de l'âme? Ou peut-être, tout simplement, le temps se montre-t-il le plus grand des médecins? Qu'importe .... il est devenu si facile de s'approcher, de se tenir debout derrière celle qui ne s'est pas encore retournée. A un mètre de distance, il ressent déjà le froid permanent qui émane de la petite silhouette blanche. C'est, pour un Aera, un toucher presque physique. L'air autour d'elle est plus qu'une températeure. Il a la dureté et l'extraordinaire transparence de l'atmosphère des cimes ou des pôles, le froid cristallin des trois mille mètres d'altitude ...

Lentement, l'Ange vient s'accouder aux moellons, juste à côté de la jeune fille. Il ne l'a pas regardée immédiatement. Son regard bleu erre quelque part sur l'horizon, et côte à côte, ils semblent tous deux veiller sur quelque chose sous eux, quelque chose d'infiniment fragile. Et quand la voix de l'Ange vibre, elle aussi est différente d'autrefois - aussi douce, mais plus profonde et plus riche d'inflexions.

"Elament est-elle à nouveau en guerre, pour que tu guettes si tard sur la Tour, Maîtresse de l'Eau?"
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Ruby
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MessageRetrouvailles [privé] EmptySam 5 Sep 2009 - 15:29

Elle aurait aimé pouvoir dire qu'elle savait qui se trouvait derrière elle, avant qu'elle ne se soit retourné, qu'elle avait reconnu entre mille l'odeur qui ne lui parvenait pas - elle était à contre vent -, ou le bruit léger qui lui était parvenu malgré la tourmente, mais s'aurait été mentir. Aussi avait-elle tourné son visage de Madone, offrant à ce nouveau venu son profil plus tranchant qu'une lame d'acier, orné qu'une prunelle plus rouge encore que le sang, qui disait "Va-t-en, ne me dérange pas". Son oeil, légèrement bridé, trahissait une origine étrangère que bien peu connaissaient. L'éclat d'un morceau étoile épinglé sur un front lui donna un pincement au coeur, et la lueur diffuse d'ailes de cristal, aussi transparente que l'eau, finit par l'achever, effaçant de son seul oeil visible la lumière carnassière. Soudain, tout son être cria vers cet "autre" apprécié, vers ces traits aimés. Elle le désirait. Non de la façon dont une femme désire un homme ou l'inverse, mais comme une soeur aspire à embrasser son frère après une trop longue séparation.

Mais elle tenta de n'en rien montrer, se figeant dans une attitude surprise de pure politesse, se voulait à la fois dure et froide, et l'étant pour cette raison et pour bien d'autres. Pourtant, ses yeux, avides traîtres, le détaillait, jugeait sa taille, sa corpulence. Il avait prit un peu de poids depuis la dernière fois, la joie de vivre lui était-elle revenue ? Le vent agitait ses cheveux, les rendant vivant, oriflamme de combat derrière lui, aussi blancs que le sien, mais plus court en comparaison de leurs tailles. Ils étaient libres de s'envoler vers ce ciel qu'il aimait tant, de s'enrouler sur eux-mêmes, s'emmêler et briller, luire... Lentement, elle se força à détailler de nouveau les ombres, les petits points de pure obscurité qui cheminaient cahin-caha dans les venelles plus sombre encore. Un frisson lui parcourut l'échine. Toutes ces ténèbres n'étaient rien en comparaison de l'Etoile Noire, d'Iblis. Elle se surprit à se demander où il était, ce qu'il faisait, s'il représentait une menace. Aurait-elle le cran de le tuer, s'il le fallait, ou se rappellerait-elle toujours la posture dans laquelle il l'avait vu, son vomi qu'il avait nettoyé ?

Ses pensées revinrent enfin sur la personne présente. Ciel, il était maintenant tout près, et elle pouvait sentir son odeur, cigüe sauvage et tourmente, l'odeur enivrante de l'orage et des éclairs et celle, mortelle, du plus noble des poisons. Tentation et ivresse, cocktail explosif. Il parla, et sa voix prit les inflexions colorées des gens sages, chaudes, glissantes, murmurantes et silences, faite pour sermonner et louer à égales mesures. Elle le hait pour cette évolution, pure jalousie, alors qu'elle-même, elle le savait, ne parlait que d'une voix tranchante, ronces inextricables et aiguilles de tisseuses, plus solide que la glace, plus implacable que l'hiver. Tout ceci n'était du qu'au froid qui se dégageait de son corps, recouvrait, à un mètre de distance autour d'elle, le sol de givre. Le feu de sa jalousie s'éteignit aussi rapidement qu'il était venu, car elle n'était que trop heureuse pour lui.


" N'as-t-elle jamais été en paix, cette Cité ? " lui répondit-elle laconiquement, ne prenant même pas la peine de détacher ses yeux des ombres sous eux.

Elle eut ensuite l'impression d'un craquement, d'une zébrure, et en même temps d'un ajustement. Il était là, elle était là, et elle se rendit compte qu'elle était bien en sa présence, qu'elle était calme et détendu. Sa tension précédente n'était dûe qu'à la fatigue, qu'à de trop longues heures de veilles, qu'à de trop nombreuses journées de pourparlers. Ce visage d'icône verglacé l'épuisait autant qu'il l'aidait dans sa tâche, et il ne servait à rien de faire perdurer l'artifice ici-bas. Etait-elle réellement un miroir, un bloc de marbre ? Ceux qui répondait oui étaient des ignorants. C'était, sous cette couche de vernis, une créature douce et aimante, pleine de patience. Mais il fallait, pour s'en rendre compte, être capable de percer l'émail de sa carapace, et cet acte demandait autant de temps que de puissance...

Elle soupira, lasse de ce jeu de faux-semblants qui la suivait jusqu'ici, dans l'intimité trompeuse d'un lieu isolé. La surface du lac glacé se brisa, elle se retourna vivement et, d'une impulsion, sauta au cou d'Archaël. Le contact de la peau tiède de l'ange lui enleva toute force. Il n'y eut plus, pendant quelques secondes, qu'un voile de cheveux de lune s'emmêlant dans leur course, que le toucher parjure d'une peau vierge contre une peau millénaire. La saveur de ce blasphème lui plut, et elle s'y laissa engloutir toute entière, murmurant, comme une prière euphorique :
" Oh, Archaël... "

Son propre épiderme dut être une torture, pour lui, trop froid, aussi brûlant qu'un ciel d'hiver. Elle aurait pu, en poussant son pouvoir un peu plus, laisser sur cette peau aimée, des bleuïssures et des gercures, laisser la trace de son passage. Mais elle ne le désira pas.

Ses pieds ne touchèrent plus le sol, il supportait tout son poids - si dérisoire. Mais elle le lâcha et retomba souplement sur les dalles anciennes. Elle allait toujours pieds nus, malgré qu'elle occupa l'une des plus hautes fonctions de cette cité. Rester en contact avec la terre était pour elle important. Quelle chemin aurait prit sa vie si elle avait été une aera ? Aurait-elle tué quelqu'un en découvrant son pouvoir ? Et si elle était née homme, que serait-elle devenue ? Aurait-elle eu plus de crédibilité dans cette cité ? Ou l'aurait-on fait exécuter dès son retour de la Forêt ? Comment se serait déroulée cette guerre ?

Cette guerre. Veillait-elle, du haut de cette tour, ou ne venait-elle chercher qu'un hypothétique apaisement de cet inlassable Appel qui martelait les murailles de sa conscience ? Elle tendit son esprit hors de son corps, alors que ses yeux, pétales de coquelicot, vinrent s'ancrer dans ceux infiniment bleu de son comparse. Elle du sembler absente quelques instants, le regard vide. Il n'y avait plus ce tiraillement. Enfin. Elle revint à elle, un sourire doux sur les lèvres. Au dessus de ses cernes, des flammes commencèrent à s'allumer.


" Oh, mon Frère... " Elle posa ses deux mains à plat sur son torse. " Mon coeur s'allume de savoir que la joie est revenu dans le tien. "

Plus bas, l'essein de Voix d'Argent s'éloigna...
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MessageRetrouvailles [privé] EmptySam 26 Sep 2009 - 21:45

Nous sommes ce que nous sommes … aussi fallait-il qu'ils attendent un instant, tous deux. Avant que les mots trouvent leur vraie place, il fallait ce silence riche, empli de ces mille choses que la langue ne peut pas dire. Il sentit le regard rouge le dévisager étrangement, avec une intensité telle qu'il n'osa pas tout de suite tourner la tête. A la place, il se força à regarder par-delà la tour, un horizon qu'il ne voyait pas vraiment. Et maintenant?

S'attendait-il à ce qui suivit? Ruby avait bondi comme une enfant, s'accrochant à lui. Quelque chose de bourdonnant l'envahit, invisible, mais si puissant qu'il en oubli la morsure de sa peau glacée. Elle lui est chère, et ce lien dépasse la puissance d'une chaîne magique créée par un rituel. Le Lien de Vie ne peut exister sans les sentiments, qu'il nourrit et renforce. Est-ce de l'amour? C'est quelque chose de moins violent. Est-ce de l'amitié? C'est quelque chose de plus intense. Il attendait ce revoir comme l'on attend une amante, et pourtant ne désirait pas les lèvres fines et leur baiser glacé. Leur étreinte ne comportait ni désir ni jalousie. De Ruby venait la puissance de leur lien, comme deux loups de la même meute. L'ange, de sa présence, adoucissait le contact parfois cruel de ces animaux, les dispensant des mots aux hommes nécessaires. Tels sont-ils désormais, le Voyageurs des Vents et la Vierge de Glace - frères et sœur de sang par le sang séparés, par le sang réunis, comme deux cartes du même jeu, comme la Dame et le Cavalier!

« Ruby... »

Nous sommes ce que nous sommes … Le nom n'avait été qu'un écho du sien propre, comme si en cette heure, il n'y avait rien de plus importants que leurs deux noms, et qu'eux seuls pouvaient, d'un pouvoir secret, anéantir le temps et la distance qui les avaient séparés. Les deux bras se détachèrent, et quand il rouvrit les yeux, Ruby le regardait. Son regard semblait s'être fait plus rouge que jamais. Le créateur semblait avoir pris de sa forge deux brandons incandescents, et leur donnant la brillance des blocs de glace, les placer au fond de ses orbites. Ces yeux qui le dévisageaient gravement happèrent les siens, et il ne put plus s'en détacher. Ruby le contemplait, et toute sa vie semblait s'être concentrée dans ses yeux. L'espace d'un instant, il s'en effraya presque. Obscurément, il savait que quelque chose n'allait pas. Qu'avait-t-elle dû faire? Que s'était-t-il passé pendant son absence, pour la rendre plus blanche et plus rouge encore?

Et par tous les vents de l'aube, elle avait été légère, si légère …


Certes, jamais la jeune fille n'avait pesé bien lourd. Mais en cet instant, il lui semblait presque qu'elle n'était réellement plus que givre et flocons, tissés pour l'espace d'une nuit par l'hiver et destinés à retourner au néant avec le lever du soleil. Avec d'infinies précautions, comme s'il redoutait de la brise, il étend ses ailes. Comme jadis, délicates et nerveuses, elles ondoient un instant, puis comme une caresse, elles se referment sur eux deux. A les voir, elles paraissent lourdes, comme deux morceaux de quartz portés sur le dos, mais leur toucher est aussi léger qu'un brin de coton. Et sous cette arche qui réchauffe, qui protège, résonne le chant mystérieux du vent qui passe et tinte entre chaque plume cristalline. De leur radiance douce, née de l'Air et la Lumière, elles tempèrent sans briser le charme de la glace, comme les rayons de la lune viennent lisser les vieux glaciers hargneux, pour les changer en champs de blancheur dignes du lit d'un dieu las.

Il ne peut faire que cela pour la protéger, comme elle l'a fait jadis. Il ne peut lui dire de déposer ce diadème qu'elle porte désormais, ni lui dire ce que toute personne normale lui dirait. Il sait déjà ce qu'elle répondrait. Certaines choses doivent être portées, parce que personne ne les portera si vous ne le faites pas. L'Aigle qui porte ses petits sur ses ailes, quitte à mourir d'épuisement à l'arrivée ; à la Louve qui donne à ses jeunes, à l'espoir de la meute, la dernière portion dont son corps aurait tant besoin …. leur direz-vous, à ceux-là, « arrête, tu te fais du mal? » … Fou! riraient-ils. Ils le savent. Tout comme ils savent que rien ne pourrait les en empêcher. Même s'ils savent aussi qu'ils y laisseront la vie.

Nous sommes ce que nous sommes, murmurent les pierres de la tour, qui portent encore les traces de la guerre passée.

Nous sommes … ce que nous sommes … disent les milliers de bougies d'Elament, qui s'allument dans l'ombre...

Nous sommes ce que nous sommes, pense le Trône avec un léger soupir, en posant un genou en terre. Ses ailes les entourent toujours de leur anneau de clarté. Sérieux, ses yeux bleus viennent dévisager l'Aqua. Rompant enfin la chaîne qui lié leurs regards, ils glissent doucement sur le diadème porté par la jeune fille. Lentement, sa main repousse une mèche de cheveux qui s'est échappée, la lissent et la rangent. Par quoi commencer, quels mots dirent en premier, quand le temps a passé? Peut-être simplement l'essentiel ...

« En vérité, j'ai parcouru la route du grand bleu loin vers le levant et le midi, pour apporter à Elament les nouvelles d'un monde qui change. Mon cœur peut-être a pu s'y apaiser... » ajoute-t-il doucement, et la main descend se poser sur l'épaule de Ruby. « Mais le tien, petite sœur, porte un fardeau plus lourd que jamais. »
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MessageRetrouvailles [privé] EmptySam 17 Oct 2009 - 15:09

[Bon, j'avais écrit un rp la semaine dernière mais j'ai paumé la feuille, du coup, je dois le refaire en entier et comme je me rappelle plus du contenu, je suis super frustrée... ]

Son attention lui avait plut, cette façon si douce et si subtile de se poser en protecteur, en défenseur, dans ce lieu qu'il avait défendu avec sa vie. Un souvenir la percuta, alors qu'atour d'elle se déroulait l'armure des ailes de l'ange, de son frère : lui seul au milieu de pierre éboulée, de la poussière en suspension dans les airs. Du sang lui maculait le front, coulait le long de sa mâchoire. Elle n'avait jamais su si c'était le sien ou celui d'un adversaire, elle ne se rappelait que le mouvement lent et infiniment sauvage du loup noir sous ses cuisses, dont les muscles roulaient sous son pelage.

Elle ne se rappelait que d'elle, saisissant la tignasse hirsute d'une démone souriante, avant de l'égorger à même ses crocs et de relâcher son corps inerte duquel un jet de sang sortait à gros bouillons. Et au loin, deux saphirs irradiaient. Etaient-ce les yeux d'Archael ? Elle n'avait jamais pu le vérifier, n'avait jamais pu acquérir cette certitude. Elle l'avait cru mort, puis blessé, puis enfuit, jusqu'à ce que l'Appel ne résonne de nouveau, effaçant ses doutes : il était bel et bien vivant. Et il revenait.

Il s'agenouilla devant elle. Voulait-il lui aussi lui jurer fidélité ? Ils n'avaient pas eu besoin de ça pour se jurer loyauté, des siècles plus tôt. Et ils étaient aujourd'hui au dessus de ça, des mots prononcés. A la place, il se limita à la recoiffer avec énormément de douceur et de soin, comme on caresse un objet précieux. Mais en ce faisant, il ne la regardai pas, il ne faisait que jauger l'argent qui lui ceyait le front, qui ornait ses cheveux et sa peau blanche.

Elle redouta un instant la réprimande, comme une petite fille aux doigts recouverts d'encre, des millénaires avant aujourd'hui, mais il ne lui adressa qu'un regard lourd, plein de peine, qui ne lui était pas adressée directement. Sa main descendit et se posa sur son épaule, poids supplémentaire qui pourtant n'alourdit pas le plus important de tous.

Ruby détourna le regard. Elle qui avait affronté la mort deux fois reculait face à la réalité et à la sollicitude d'un frère. Elle aurait pu pleurer. Quelqu'un de moins fort qu'elle l'aurait probablement fait, quelqu'un de plus fort aussi, probablement. Là n'était pas le problème. Ce n'était ni le lieu ni le moment, elle n'était pas encore prête à craquer comme une brindille trop sèche. Elle le fixa de nouveau, raffermissant son pouvoir sur sa peine et les limites de sa volonté et lui prit la main.


" Ne t'en fait pas pour moi, mon frère. Je pense d'abord aux habitants de cette cité. Certaines choses doivent être faites, car personne d'autre ne les ferait à ma place. "

Elle lui adressa un sourire triste. Inconsciemment, elle savait qu'il s'attendait à cette réponse, qu'aucune autre n'était plus appropriée. Il devait savoir que son poste actuel, bien qu'inconnu aux yeux de tous, n'était pas le fruit d'une ambition sans faille ou d'un pur hasard : c'était un choix réfléchit, né de la nécessite. Il n'y avait personne d'autre pour le faire et il fallait que ça soit fait. A la base, ce remplacement n'était que temporaire, mais plus les jours passaient, plus Ruby se rendait compte que Naciniah ne reviendrait pas, qu'elle ne reviendrait plus et qu'elle devrait mettre quelqu'un à la place de la Maîtresse des 4 Eléments sur le trône de la cité. Armand, sans sa grande sagacité, lui avait presque dit de prendre la place des autres héritiers légitimes. Une petite voix perfide, dans sa tête, lui disait que c'était la meilleure chose à faire. Elle la tut à coup de talon et reprit le fil de sa pensée.

Elle le prit par les épaules et le fit se relever. Personne ne devait s'agenouiller devant elle, plus personne. Elle ne le méritait pas, elle n'avait rien fait d'extraordinaire pour cela. Pas encore. Elle était la source de nombreuses dissensions et en était épuisée, mais il y avait encore trop à faire pour lâcher les armes. Il fallait absolument que les espions qu'elle avait introduit dans les enfers lui rapportent des nouvelles.


" Quelles nouvelles du monde qui changent nous apportes-tu ? Comment vont les Plaines du Kalmanstre et les Terres d'Erestrées, quelles nouvelles des Humains de Nieta ? "

Il y avait bien d'autres dangers en dehors de la cité, sur les autres continents, mais la jeune femme savait qu'en comparaison des guerres élémentaires, les problèmes économiques d'une grande région d'ailleurs n'était rien. Il n'y avait rien de plus terrifiant et dangereux que les Osts des démons contre les armes brutales des élémentalistes.
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