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Où est l'âge insouciant où l'on ne fait que rire,
Où se cache, en mon cœur, l'enfant gaie et sans ire,
L'enfant curieuse et ses regards émerveillés,
Ses premiers pas qu'elle ne doit qu'à sa volonté ?

Mes souvenirs sont tristes et pleurent chaque jour,
Ma vie semble s'enfuir comme un compte à rebours
Et je reste à l'écart, parmi tous mes regrets,
Sans savoir qui je suis, sans rien savoir jamais...


Les petits pieds nus et pâles effleurent à peine l'herbe des plaines que le givre a recouvert de son manteau poudré. La nuit est tombée et les lueurs de la lune, blafarde, inondent l'entrée de la cité, pénètrent les cristaux de glace par l'une de leurs facettes, comme autant de diamants déposés au sol étincelant. Loin, la bataille, les corps, les charognards et les vestiges de feu. La nature a essuyé ses plaies et arbore fièrement des tons calmes que seuls les pas de la jeune Nymphe perturbent... et encore. Qui est-elle ? Ah ! Elle... D'où vient-elle ? De la forêt, peut-être, de l'Artifice, plus sûrement. Nul ne sait de quelle manière elle en est sortie, seule, accompagnée, et nul encore ne saurait vous dire en quel état. Sa colère semble s'être apaisée, une hérésie, lorsque l'on connaît l'énergumène... et pourtant.

C'est presque avec tendresse qu'elle frôla la pierre azurée, sur la porte puissante. Elle avait hésité, immobile une seconde. Elle les détestait tant. Elle les détestait tous. Avait-elle changé ? Oui et non. Pour tout dire, à présent, elle les méprisait. Claquement lugubre dans la nuit, plaisant aux oreilles de la jeune fille. Le loquet venait de céder, la magie aussi, et la porte s'ouvrit lourdement, offrant sa protection et son intimité. Un sourire satisfait éclaira le visage de Coralline, comme si elle découvrait pour la première fois le pouvoir qu'elle possédait. Le vent joua dans ses cheveux et dans les pans de sa robe. Une robe qu'elle ne portait pas la dernière fois. Alors ? Son propriétaire originel n'en avait plus besoin, mort qu'il était, croupissant au fond des Marais. Le sourire s'était effacé, et elle avança, entra sous l'invite de la Cité elle-même.

Non, elle n'a pas tué, si telle est la question que vous vous posez. D'autres étaient passés avant elle et les Marais n'avaient plus tellement l'apparence qu'ils avaient pu offrir autrefois. Ils avaient débordés, d'eau, de Démons aussi. Leurs habitants – fallait-il avoir toute sa tête pour habiter un lieu pareil – s'étaient rapidement retrouvés désemparés. Beaucoup étaient morts. Dommage. Une aubaine, en vérité, puisqu'elle avait pu se servir dans les garde robes, guidé par son seul désir de se changer. La morale ? Les principes ? La culpabilité ? Non, rien de tout cela ne l'avait effleuré. Elle se contentait d'agir sans réfléchir, mollement, comme l'ombre d'elle-même.

Elle s'arrêta au milieu de la grande avenue principale. Où aller ? Aucune idée ne lui vînt en tête. Il était tard et sans doute que Lorelaï n'apprécierait pas sa visite à pareille heure. L'école n'était pas ouverte, la bibliothèque... sans doute pas plus... Il lui restait les lieux extérieurs. Le bar de Clad ? Sans-doute plein et elle n'avait pas envie de se mêler à la foule nauséabonde. Le parc ? Le lac ? Juste au-dessus de sa tête, un chuintement attira son attention. Quelqu'un arpentait les chemins de garde, silencieux dans sa vigilance, et tout à coup, cette idée de pouvoir observer les alentours depuis les hauteurs des remparts lui plu. Elle se remit donc en mouvement, bifurquant à droite jusqu'à trouver un escalier qu'elle gravit au moins aussi mollement qu'une enfant anémique...

Son esprit encore embrumé frémissait à peine et elle alla s'asseoir sur un morceau de mur, laissant le vent frais de l'hiver lui caresser le visage.


Dernière édition par Coralline le Ven 4 Sep 2009 - 9:40, édité 1 fois
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 6 Juin 2009 - 9:34

C’est une nouvelle nuit.
AIDES MOI !
C’est une nouvelle lune.
AIDES MOI !
C’est un nouveau refrain.
FRAPPES MOI !



Le lendemain si loin, engage son refrain plain d’entrain comme un enfant à qui on tend la main. C’est dans sa peau, il chante à l’aide, au peuple de demain. Ce serra un nouveau jour où tout recommencera encore et encore, la même rengaine, la même sornette qui jamais ne relâche sa course effrénée malgré la haine engendrée.

C’est un chemin, un sentier pris et repris, essayant de changer de route et qui de ce détour, mène au même point d’arrivée. Encore à tout jamais. L’herbe verte de la journée se voulait noire et sombre dans les coins d’ombre, blanche et lumineuse où la lune y faisait un clin d’œil. Les quatre pates de la bête écrasaient la terre lentement, c’était un tour de ronde comme chaque nuit, chaque jour, toujours mais à une différence près… la ronde, cette nuit, ne se déroulait pas le long des rempares mais bien plus loin. Les pas qui claquaient le sol sur la pierre froide de cette nuit d’hiver n’étaient autres que ceux d’un garde.

C’était une monture comme vous n’en avez encore jamais vu, où la seule que vos yeux puissent connaitre. Ses quelques zébrures peu nombreuses, dotées d’un bleu luisant s’évaporaient autour de la chaleur corporelle que la créature dégageait. Elle avait de la grâce, de la douceur, et des dents de sabres meurtrières qui déchiquetaient la chair sans l’ombre d’un remord lorsque son maître lui laissait s’en repaître. Il en faut peu… tellement peu pour basculer de la grâce à l’horreur. C’était une sentinelle qui laissait son corps se balancer à chaque mouvement de la bête. Dans sa main, une immense lance se dressait tel un étendard, rappelant l’identité du cavalier. Sentinelle. Voulait-il dire. Sentinelle, protecteur de la Cité.

Sur la blancheur de sa peau, scintillait la lune aux reflets dorés. Sur la raideur de ses quelques cheveux laissés à l‘air libre, soufflait le vent qui a entendu tous les secrets les plus troubles que le monde puisse connaître. Le regard est droit. Droit devant, plongé dans le noir qui s’écrase à l’extérieur de la cité, là où le danger est un mot que trop bien connu. L’extérieur, là où autrefois, une bataille fit rage, était-ce la grande guerre ? Sûrement, seul un souvenir douloureux est resté dans la tête de la Sentinelle aux aguets. Vêtu d’une cape violette, protégé d’une large capuche, armé à la ceinture de deux sabres bien assez étranges pour qui oserait y attarder son regard un peut trop indiscret. Ce n‘était d’ailleurs pas les seules lames qu‘il portait sur lui. Un masque blanc osseux pendouillant contre la gorge, la bouche s’en était dégagée il n’y a pas même deux minutes afin de respirer cette fraîcheur nocturne qui n’a pas de prix. De belles jambières, de longues bottes ornées de protèges tibias possédant au niveau des genoux, une lame rendant les coups tranchants, meurtriers… ravageant. La cape n’était pas la seule à connaître la fureur du vent, un drapé partant de la taille jusque sous les genoux, devant et derrière, telle une jupe coupée sur les côtés, flottait contre les jambes. Au centre du croisement des lanières sur son torse qui venait retenir sa cape, on pouvait distinguer un petit crâne plat en métal couleur argent, claquant sur un magnifique plastron articulé afin de facilité chaque mouvement. Ses avants bras étaient eux-mêmes protégés par de longs brassards en métal finement armés de lames. Dans la continuité du gauche, c’était une unique dague utilisée comme une longue griffe qui longeait la main.

Un homme aux allures d’un combattant. Il donnait tout son temps pour protéger les habitants, les élèves, vagabonds en tout genres. Il les protégeait tous, du plus beau au plus moche , du plus grand au plus petit, du plus bête au plus intelligent, féminin comme masculin, sans aucune discrimination quelconque. Une pluie, fine et discrète, s’installa pendant un court instant, rafraichissant la bête cachée sous son armure. La monture stoppa sa marche, humectant l’air, la gueule tournée vers le ciel, à demie ouverte, recueillant les quelques goûtes précieuses venant de ce ciel aux milles et unes étoiles. Puis elle secoua son arrière train, son dos, son encolure, terminant par sa tête. Il avait l’habitude, il avait de la poigne et tenait droit sur sa monture. Elle racla le sol de ses griffes, trifouilla la terre humide, engouffra sa gueule, cracha la terre, souffla l’air de ses narines qui se transforma aussitôt en petite buée hivernale, puis à la demande de son maître, repris sa marche docilement en direction de l’entrée de la Cité afin de reprendre son poste. Il venait de retirer sa capuche, la laissant tomber sur sa nuque. Y avait-il du repos pour lui ? Non. Lorsqu’il dormait, sa monture prenait la garde de son corps. Lorsqu’elle dormait, il en faisait de même. Un duo parfait. Quand il faisait froid, il savait réchauffer son corps et celui de sa monture, bien que ce soit un homme n’aimant pas son élément, l’utiliser pour les choses basiques… ou belles, était une chose bien différente.

La sentinelle l’avait vu, cette porte se refermer de loin, avant de retirer sa capuche, avant cette petite pluie passagère. Il l’avait vu, l’immense porte de la Cité. Il était tard, et peu nombreux étaient les habitants de la cité à être encore à l’extérieur. Il l’avait vu se refermer, mais il était bien trop loin pour l’avoir vu s’ouvrir. Dans l’arène, c’était vide, comme chaque nuit, là-bas. Vide ? Oh non, il savait…

Il savait que certains aimaient s’y balader, réfléchir, laisser ses idées vadrouiller dans l’immensité de la nuit. Pourquoi ici ? Parce que la journée, c’était un lieu de foule qui se vidait la nuit tombée, un changement brusque qui en intéressait plus d‘un. Oui, il le savait, mais il se contentait d’y aller le jour, répétant inlassablement les mouvements d’attaque, une danse dangereuse. Il l’aimait cette arène. Un jour peut-être, s’y attarderait-il de nuit ? Un jour peut-être qu’il tombera nez à nez avec un ennemi juré, bien que tout démon soit classé comme ennemi. Vengeance… vengeance et protection. Voilà de quoi était faite sa vie maintenant. Mais il allait de l’avant tout en reculant d’un pas avant d’en refaire deux nouveaux dans le présent. C’était une nuit assez calme. Par ici du moins. Plus loin, montagnes et forêt, qui sait ce qu’il s’y passait ? Demain il s’y baladerait. Demain il ira vider sa tête de tous souvenirs, une fois de plus et sans doute une fois de trop encore. Mais cette forêt était parfaite pour encaisser son passé. Histoire d’amour et de pertes, de douleurs et de peurs, de regrets et de remords. Histoire comme tant d’autres finalement…

S’approchant des remparts, de cette porte fabuleuse, il leva la tête. Ce qu’il vit ? Un garde qui venait de s’assoir, fatigué par son travail. Son nom ? Il ne le connaissait pas, où ne s’en souvenait pas. Mais il remarqua une silhouette plus fine, plus petite… plus discrète. La porte n’était plus qu’à quelques pas, et avec la délicatesse masculine, il descendit de sa monture. Lorsque ses pieds touchèrent le sol givré, un bruit sourds suivit l’action et quelques goutes s’éparpillèrent autour des bottes métalliques. Il posa sa main sur le symbole du feu, on pouvait voir chaque veine défiler sous la peau, cherchant à se frayer un chemin entre les muscles, les tendons… et une fois de plus en peu de temps, cette nuit, la porte s’ouvrit, raclant le sol, écrasant les quelques petites pierres qui avaient du mal à se dégager du passage. La sentinelle s’engouffra dans la Cité, la monture suivit sans broncher. Puis il monta les petits escaliers en pierre. Avant d’atteindre le haut des remparts, la sentinelle porta la main à son masque, afin de le caler sur son visage. Vous serrez peut-être étonné, mais la bête suivit son maître. Elle était peut-être grande, mais agile, rien à voir avec un cheval.

Il ne s’était pas trompé, c’était bien une enfant qu‘il avait aperçus tout à l‘heure. Son regard la dévisagea rapidement des pieds à la tête, puis il se posa près d’elle, sans mot dire, les bras sur les genoux. Il venait de reprendre son poste et vit plus loin le garde, dans l’ombre, très peu visible à vrai dire. Quelle race ? Aucune idée… puis le voilà partit dans son regard interminable qui visait à scruter l’horizon, alerte. Le moindre mouvement et il serrait sur ses deux pieds, prêt à bondir et prévenir. Que faisait-elle ici à cette heure-ci ? Seule ? Toutes ces questions venaient combler son temps, un petit passe temps qui n’était à vrai dire, pas comme les autres. Puis il remarqua après quelques minutes qu’elle n’était pas très couverte. Pour un homme comme lui, habitué au froid, ce n’était pas un problème, ses muscles étaient une barrière contre le vent. Mais un corps si petit, si fin… il soupira. Quel était son devoir déjà ? Protéger. Ses mains vinrent défaire les lanières de sa cape puis il la lui tendit. Prêter n’est pas donner.

Il avait tout du buveur du coin, peu recommandé et pourtant qui combattait pour le bien… si le bien existait vraiment. Son œil gauche clignait rapidement, c’était le muscle fatigué qui sautait. Les nerfs qui tiennent, le corps qui suit. La bête s’était couchée à droite de son maître, le laissant entre elle et cette fille qui accepterait peut-être cette petit gentillesse passagère.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 6 Juin 2009 - 11:36

Elle, n'avait pas bougée, comme désintéressée par le monde qui l'entourait. Le mur n'offrait pas une assise des plus confortables mais il faisait l'affaire. En réalité, de cela aussi, elle se désintéressait, préférant laisser vagabonder ses regards, son esprit, sa raison qui semblait rétive à revenir l'habiter. Elle écoutait, d'une oreille distraite, les mélodiques inattendues du vent. Tantôt grave et aux prises avec les remparts inébranlables, il s'engouffrait soudain dans les meurtrières et partait à l'assaut de la cité sans défense, en sifflant, aigu et menaçant. Sur les chemins de garde, la poussière tournoyait parfois avant de retomber au même endroit. Il arrivait également que quelques nuages de sable soulevés choisissent de prendre une autre direction, s'éparpillant au bas des murs protecteurs. Là, plus loin, celui qui faisait sa ronde paresseuse s'était assis à son tour, fatigué, las, ou détendu peut-être. Sérieusement, les Démons pouvaient-ils encore attaquer ? Les paupières de la jeune fille battirent subrepticement... et la cité, pourrait-elle encore se défendre ?

Elle délaissa le garde, ennuyeux. Plus loin encore, sur ce qui semblait être une place d'armes, un couple observait les étoiles, dans les bras l'un de l'autre. Que se disaient-ils ? Bof... ennuyeux également.

Une rafale plus violente failli arracher la jeune Nymphe de son pan de mur. Ses pieds nus glissèrent en cherchant à reprendre leurs appuis, et puis se fut le silence à nouveau. Ses regards sombres s'étaient fait larmoyants, brûlés par les gifles glaciales du vent. Elle s'était de nouveau tournée vers l'extérieur et fixait un point d'horizon indistinct. Il n'y avait rien à observer par là-bas, mais l'appel du vide l'attirait et apaisait ses pensées, trop vides. La vue, splendide pour tout Elamentien, décevante pour elle. Que cherchait-elle à observer ? « Regarde ». Son attention relative venait de lâcher prise, délaissant les hauteurs du ciel nocturne pour se laisser retomber vers le sol étoilé de givre. Il y avait, en bas, une créature tout à fait étonnante. Enfin, un semblant d'intérêt la gagna et elle la suivit des yeux, détaillant les pièces luisantes de son armure, son allure puissante, son cavalier fantomatique.

Quelques nuages se déplacèrent, laissant l'occasion à la lune pleine d'irradier encore la scène surréaliste qui se déroulait en bas. Le garde n'avait pas bougé. Dormait-il ? Non. Même rituel, mêmes sons. Le « clac » de l'imposant loquet, le grincement sourd des gonds. Cavalier et monture avaient disparus aux regards de la petite indolente et tout juste parvînt-elle à s'intéresser à leur entrée que déjà, un faucon de cristal avait détourné son attention plus loin. Elle entendit passivement, comme lorsque l'on émerge à peine d'un mauvais rêve, les pas gravissant les marches, les cliquetis du métal, le claquement des tissus malmenés par le vent. Elle ressentit, présence effacée dans sa torpeur, le souffle bestial à quelques pas, l'individu s'asseoir à ses côté, faisant barrage aux rafales incessantes. Elle sentit, odeur de musc chaud, effluve âcre de prédateur, arôme de sang qu'il lui sembla presque goûter, suave et aqueux sur la langue. Elle vit, enfin, la cape tendue vers elle. Et rien de tout cela ne suscita de réaction.

De nouveau, elle observait. La traîne de cheveux argentés, le visage, à demi dévoré d'un masque effrayant, les yeux magnifiques, aussi purs et lumineux que l'astre nocturne. Rien d'autre pour l'instant, car elle l'interrogeait muettement. « Qui es-tu ? » Sa main se mit à trembler sous la pression du regard blafard et pénétrant. « Réveille-toi ». Et de nouveau, le même chemin. Le ciel, le sol, la porte, l'escalier... le garde, le couple, le ciel, la créature. Elle frissonna.

« J'ai froid... » parvînt-elle à constater avec stupeur.

Elle ferma les yeux quelques secondes, cherchant à reprendre possession de son propre corps. Sa peau, rougie par le froid, arborait quelques marbrures violacée comme autant de morsures du gel environnant. Encore une seconde, la chair de poule s'estompa et son corps redevînt pâle et froid, sous sa volonté consciente. Attention, l'enfant refait surface... ses regards se voilent de défiance et refusent, avec mépris, la cape si généreusement offerte.

« Qui êtes-vous ? »


Dernière édition par Coralline le Sam 6 Juin 2009 - 13:17, édité 1 fois
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 6 Juin 2009 - 12:13


La cape revint à son porteur qui plongea sa tête sous sa capuche avant de recroiser les lanières, et de fixer la cape. Il soupira une fois de plus, mais le vent avait une voix bien plus forte que la sienne. Les enfants sont étranges, capricieux à souhait, ou à la recherche d'un semblant de grandeur adulte, une solitude, et avant toute chose... l'indépendance. Elle grelottait, ça en était presque amusant de voir le refus de chaleur proposée. Les êtres sont parfois bien étranges et têtus.

Le visage masqué se tourna afin de voir la jeune fille qui, bien que capricieuse, osa lui demander son identité après avoir avoué être frigorifiée, mais sans accepter la capte. De sa fine voix loin d'être grave, bien qu'on puisse s'y attendre, il se présenta à la gosse.


" - Sentinelle, suffisant à savoir mademoiselle."

Il répondit avec une pointe d'amusement, ne se prenant pas pour une divinité mais un simple être vivant faisant son travail foireux jours après jours. La bête toussa à côté, comme si sa salive avait été ravalée part le mauvais conduit. Elle grogna d'énervement, puis reposa sa tête entre ses pattes avant.

" - N'y a-t-il rien d'autre à faire pour une jeune fille, que de rester ici dans le froid à ne pas dormir durant des heures si tardives ?"

Il disait juste, mais il était moqueur. Rien de méchant, mais il difficile à cerner, dur de savoir s'il était ironique où s'il disait vrai. Il avait déjà lâché son regard pour le replongé à l'extérieur de la cité, il n'était pas payé à rien foutre, et ne pouvait pas se permettre de laisser passer une erreur. Sa main droite se posa sur la patte de la monture après avoir raclé la pierre de la lame en guise de griffe fixée au bout du brassard. Le garde était prêt à crouler sous son poids, gagné par un profond sommeil interdit. Fallait pas lui en vouloir, les temps étaient rudes. Depuis la grande guerre, il fallait travailler sans relâche, surveiller et protéger nuit et jours. Dur de tenir un tel rythme essoufflant, fatiguant. Les temps se faisaient durs, et la peur d'une nouvelle guerre était plus que présente. Tout le monde redoutait le moment qui reviendra au galop, le temps du sang, des pleurs, du massacre... il l'avait connu, et nous voulait pas le connaitre de nouveau. Mais ça se produira, ça doit se produire, la vie est faite ainsi, un combat perpétuel. Les enfants qu'il protèges, combien de temps vivront-ils sans revoir, ou voir pour la première fois la Cité en feu, dévorée, rongée par la cupidité, la haine, la violence.

" - Retournes chez toi."

Ajouta-t-il. Dans un semblant de murmure...
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 6 Juin 2009 - 12:59

Silencieuse, elle l'observa remettre sa cape, notant avec quelle classe. Elle lui serai sans doute bien plus utile qu'à elle, car Ruby lui avait enseigné l'art de ne pas craindre le froid. Pourquoi, alors, s'était-elle laissée allée ainsi jusqu'à s'en découvrir frigorifiée à son réveil ? L'Artifice, sans-doute. Qu'y avait-elle laissé ? Qu'en avait-elle emporté ? Elle chassa ses pensées d'un geste las, cherchant à se soustraire à des souvenirs pénibles et embrumés. L'homme avait parlé. Elle sourit, surprise par les tons clairs d'une voix qu'elle avait imaginée plus grave.

Sentinelle. Bien. Suffisant à savoir, comme il l'avait souligné. Elle n'avait aucune idée de ce que pouvait bien être une Sentinelle, s'il s'agissait d'un métier, d'une guilde comme il en fleurissait tant à Elament ou d'un loisir au moins aussi stupide que celui de se bécoter sur une place d'armes. Elle se contenta de cligner des yeux, signifiant qu'elle avait assimilé l'information. D'accord. Se moquait-elle de savoir ? À l'observer, vous diriez oui. En réalité, la gamine est loin d'être aussi fermée qu'elle veut bien l'admettre. Plus tard, elle se rendrait à la grande bibliothèque d'Elament. Celle-là même dont elle en connaissait tous les recoins pour l'avoir si longtemps arpenté, comme une ombre légère papillonnant d'un livre à un autre et en absorbant le contenu avec un intérêt singulier. Oui, elle irait se repaître de chaque détail concernant ces « Sentinelles », si tant est qu'un seul livre ou parchemin poussiéreux en fasse mention. Pour le moment, elle se contentait de hocher la tête, comme si la réponse était une vérité universelle à elle seule, indiscutable et, somme toute, suffisante.

Elle inspira de nouveau, savourant l'air pur – quoi que l'haleine de la créature ai pu l'altérer légèrement. Elle tournait le dos aux plaines, dardant les toits de ses regards fatigués. Calme. Plus pour longtemps. Elle avait tressailli et ses doigts s'étaient immédiatement crispés, les ongles éraflant la pierre. Comme une gifle, les paroles s'étaient jetés sur elle, faisant monter le sang aux joues, la colère au cœur, la haine aux yeux. Il parlait trop. Il parlait mal. Un Armand Sulimo, encore un, qui se permettait de lui dicter ses actes comme à une gamine ou prétendait vouloir la protéger... et pourquoi pas l'éduquer ?!! La dernière phrase, invective placide, acheva totalement de la rendre furieuse. Chez elle ? Elle n'avait pas de chez elle ! Ce simple constat avait suffit à faire ressurgir la douleur dont la haine se nourrissait afin d'éclater.

« N'y a-t-il rien d'autre à faire pour Monsieur Sentinelle, que de rester ici à m'assommer de sa prétention mielleuse ? »

Ironie, provocation, mais pas seulement. Le ton était froid et coupant. Son doigt se leva et elle désigna le garde, assis un peu plus loin.

« Lui, sans doute, apprécierait vos conseils douteux ou les écouterai, dans son demi-sommeil de garde harassé, heureux que l'on se penche sur son cas. Eux, continuait sa voix tranchante tandis qu'elle pointait le couple d'un hochement de menton, très certainement, auraient besoin d'être remis à l'ordre et renvoyés chez eux, chez lui, ou chez elle, tant qu'ils disparaissent avant de se jeter l'un sur l'autre au milieu de la place d'armes. Mais moi, fichez-moi la paix ! »

Rallumé, le regard venimeux, l'esprit vindicatif, l'impatience chronique et cette si curieuse inconscience de ce que pourrait lui coûter la provocation.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyLun 8 Juin 2009 - 8:11





La voix de cette insolente se fit suivre d’un lourd silence qui plana autour d’eux. Seul le vent violent était présent, lui, la seule grosse voix forte, imposante, incontrôlable, incontournable aussi. Quand le vent parlait, on l’écoutait… elle avait parlé, et ses paroles n’avaient évidemment pas été appréciées. L’homme esquissa un rire peu sonore, saccadé, machiavélique, presque ironique. Sa lance se dressa dans sa main droite, pointée vers les nuages tel un appuie, canne de vieillard ou flemmard. Jouer le jeu de la moquerie avec cet homme n’était pas une très bonne idée. Il largua doucement, lentement, de sa bouche, des mots peu sympathiques. Une voix monotone, une voix presque calculée, et qui d’ailleurs, bien que toute fine, avait toujours était posée dans un tempo.

«  - Non. »

Aucune résonance, sa voix était de celles qui ne duraient pas, sèche, glaciale malgré l’élément contrôlé, et vide, inexpressive.

«  - Vient pas grailler la haine sur mon ch’min de garde. T’aime pas les gens, c’est ton droit. _ Il était imperturbable, ne déviant pas son regard de l’extérieur de la cité _ C'est ici et maintenant que je boss. Tu m'excuseras alors de faire ce pourquoi je gagne ma vie. Et qu'est-ce que j'en ai à battre d'un garde et de deux amoureux qui paraissent déjà plus adultes que ton âge tendre ? »

Aucune trace de mépris, ce n’était qu’une manière de parler, un m’enfoutisme total des autres et de ce qu’ils peuvent bien penser. La grande à côté s’était déjà dressée sur ses quatre pattes. Oh, elle puait peut-être le sang, elle était peut-être effrayante de par ses griffes et ses crocs, mais elle était belle et douce. Un mélange bien étrange.

«  - Si tu veux qu'on te traître en tant qu'adulte, alors ne recraches pas l'erreur dans la gueule des autres, mais dis leur simplement que tu n'es pas une enfant stupide qui a besoin des autres pour vivre. Là, ils t'écouteront. Mais si tu réagis avec les autres comme tu viens de le faire avec un parfait inconnu, tu d’vrais p’t’être t’faire d’la bille ! »

Sa capuche se gonflait et dégonflait selon les vas et viens du vent, ses cheveux se chamaillaient, se nouant, dénouant inlassablement. L’homme la regarda rapidement, et remarqua une peau douce, qui semblait moins froide que tout à l’heure. Il ne s’en étonna pas. Oh, cette fille devait être le genre à démarrer au quart de tour. Le genre à rester dans son coin tant elle n’aimait pas les autres, ou inversement. Les deux peut-être. Mais on a tous nos difficultés. Parfois c’est lourd, d’autres un peu plus léger. Aucun concours, pas de comparaisons. La vie tout simplement. Parfois elle est injuste, nous met des épreuves que certains ne surmontent malheureusement pas. D’autre y arrivent, et la vie est faite ainsi, d’obstacles, de défit. Défaites et réussites.

«  - Alors dis moi ton nom, peut-être que je te dirais le mien. Dis moi ce qui trotte dans ta tête cette nuit, pour t’éloigner de la foule. Dis moi. »

Il soupira comme s’il était lace de quelque chose. Aucun mot ne vint s’ajouter aux autres. Oh, il avait la parole facile, ce n’était pas un muet comme on peut en trouver un peu partout, éparpillés dans ce monde affaiblit par les guerres, la haine, la douleur. Un monde dévasté et pourtant, où la nature reprend toujours le dessus. Le cycle interminable de la création suivie par la destruction. Renaissance, oh qu’il est beau ce mot, doux et rond comme une bulle toute belle, toute neuve, et bientôt toute plate sur le sol gelé. Liquide, solide… gazeux. Sa longue réponse à la provocation de la gamine avait pris fin, et il repartit dans son silence comme s’il avait déjà zappé l’instant passé, qu’il venait d’effacer la présence de la jeune fille, très belle cela-dit, mais ce n’était pas le genre de jugement qu’il s’autorisait à faire lorsqu’il s’agissait d’un où d’une jeune individus. Normal. On l’aurait pris pour un pervers. Il ne l’est pas. Quand dehors, le silence était grand, muraille contre l’excitation de la foule, une musique s’incrustait dans sa tête. Douce au départ, et folle avant le terminus, des notes timbrées et vibrantes. Manière de s’éclipser un peu. Il attrapa une vieille gourde en tôle tenant dans un sac de cuir attaché aux sangles de sa monture. Tout en continuant à faire sa vie, son travail, oubliant la présence de la fille, il apporta la gourde à ses lèvres, laissant un doux liquide dégouliner le long de son œsophage. De l’eau ? Pas vraiment, mais c’était un liquide incolore. Un fin filé dégoulina le long de ses lèvres. Ce n’était pas un manque d’hygiène. On bavait tous un peu à côté des coins. Ses yeux… elle avait de grands yeux qui parlaient bien plus qu’elle ne devait le penser. Elle avait connu la peur, aucun doute là-dessus. Un petit, tout petit fou rire s’installa soudainement chez la sentinelle. Un rire qui, avouons-le, détenait de cet animal rieur qui n’est autre que la hyène. Pourtant, toujours rien à l’horizon, rien de nouveau, pas de bruit. Oui, vraiment rien. Qui sait quelle blague lui était passée en tête ? Quel souvenir pouvait laisser place aux rires ? Qu’avait-il donc en tête ? A première vue, rien de bien important. Souvent, c’était comme ça, un passage, un rire inattendu, et un silence sans aucun besoin de justification. La gourde avait été posée contre le petit mur de pierres, le bouchon revissé avec soin. La langue était déjà passée recueillir les goûtes en trop sur ses lèvres. Lorsque ses yeux passaient sous la lumière de la lune, c’était un vert très pâle et une pupille entourée de bulles bleues qui scintillaient. Ce soir, son humeur était flottante. De toute manière elle était très changeante. Il savait, que dehors, ils ne tarderaient pas à intensifier leurs petites attaques. Il savait qu’ils trouveraient une brèche. C’était inévitable, ça arriverait tôt ou tard et sa longue vie ne lui épargnera sûrement pas la venue d’une nouvelle guerre. C’était devenu une obsession. Alors oui, son travail était rude et fatiguant, mais il le prenait à cœur, il en faisait plus qu’on ne lui en demandait, il donnait tout son cœur, et engouffrait dans un coin, pour l’heure venue, toute sa haine et sa rage.

La fille, finalement, qui était-elle pour s’énerver aussi rapidement ? Qu’est-ce qu’elle cherchait, la solitude et le calme ? Ici ? Mieux valait pour elle qu’elle reste loin de lui si c’était effectivement ce qu’elle cherchait, sauf si mademoiselle répondrait gentiment et la bouclerait pour ne pas lui donner l’envie d’aller lui faire voir ailleurs. A vue d’œil, elle n’était pas lourde, alors la convaincre ne serrait pas difficile. Il ne se gênerait pas pour la porter et la poser plus loin si besoin est. Mais c’était en dernier recours. Le monde ne le dérangeait pas, d’ailleurs il se plaisait dans la foule. Les chieurs par contre… c’était une toute autre affaire.

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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyLun 8 Juin 2009 - 16:12

Spoiler:

Orgueil. Doute. Colère... et puis ?

Le silence était retombé derrière les mots de la gamine, comme si tout Elament avait honte pour elle et retenait son souffle, tant persuadé qu'une main allait se lever, s'abattre, et remettre les idées en place dans la tête de la sale gosse. Elle pourtant, resta immobile, tout à coup étonnée par l'absence de réaction de son interlocuteur.

Orgueil. Était-elle parvenue à l'asseoir ? Curieux et pourtant, l'espace d'un instant elle y crut. La non-réponse de Monsieur Sentinelle prouvait qu'il n'avait rien à répondre, sans-doute parce qu'elle l'avait remis à sa place. Non mais. Son regard n'avait pas décoléré – si l'on peut s'exprimer ainsi – et elle toisait l'autre avec un mépris assez surprenant pour une gamine de son âge. Galvanisée quelques secondes, elle avait entendu quelque chose comme l'écho d'un conseil que Ruby lui avait donné il y avait déjà longtemps, lors d'un cours Aqua. Elle ne put retenir un sourire en coin, sourire que ne remarqua évidemment pas KöH, tant occupé à garder le silence. Elle aurait donné cher pour vivre cette expérience avec Armand Sulimo ou même Shinreï. Les regarder se taire, se délecter de leur surprise face au ton acerbe qu'elle parvenait à déployer. Oui. Ce devait être assez savoureux à vivre. À moins que...?

Doutes. À l'instant, ne venait-il pas d'esquisser un semblant de rire ? Le sourire s'effaça du visage presque angélique. Les enfants sont mignons au premier abord, mais peuvent se montrer particulièrement exécrables à l'approche. Pourquoi riait-il, au juste ? Amusement, ironie, ou tout autre sentiment suffisamment fou pour ne déclencher en lui qu'un semblant de bonne humeur. Déstabilisant. Coralline, jusque là redressée en signe de défi, se relâcha soudain. Elle paraissait plus petite, plus chétive, plus fragile.

Vexation. Sa haine n'avait pas atteint son but. Elle avait ricoché sur l'armure étincelante, l'éraflant à peine, à se demander même si elle avait ne serait-ce que toucher une seule particule de métal. Déjà, le vent l'avait emportée, loin de l'homme à la chevelure d'argent et, curieusement, loin de la petite Nymphe elle-même. Elle se retrancha une seconde, cherchant autre chose, plus tranchant, plus puissant, capable de bousculer celui qui lui avait volé un morceau de son mur et la totalité de sa solitude. Il fallait faire vite, car pour l'heure, elle se sentait ridicule et cela lui déplaisait. Oui. Cela rejoignait assez le premier point : orgueil.

Colère. Elle n'avait pas même eu le temps de dénicher une autre réplique qu'un « non » était tombé comme un couperet, tranchant net toute envie de se maîtriser, si tant est qu'elle en ai eu la moindre envie... Elle fronça les sourcils, mimant l'incompréhension. Et quoi ? La réponse ne tarda pas à se faire sentir. Le ton était froid mais curieusement calme et, la tempérance qu'il y mettait lui donnait d'autant plus de force. Menaçant, sans l'être. Quant aux propos débités, c'était une toute autre histoire. Une chose était sûre, ils ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout. Rien que l'évocation d'un hypothétique « âge tendre » avait suffit à la remettre sur les rails de la fureur. De nouveau, le sang s'était remis à bouillir dans ses veines, la brûlant au point de la faire trembler. Sous la pression de sa mâchoire serrée, les dents avaient grincé et le goût âcre de la haine s'était déversé en elle. Plus que la colère, c'était une sorte de démence qui la possédait peu à peu, lui soufflant de se lever, de sortir les ongles, de griffer la chair mise à nu entre deux pans d'armure, d'arracher, par poignées, ces maudits cheveux argentés ; et les yeux, magnifiques astres éteints ; et l'étrangler, avec sa cape ; et le pousser au bas des remparts...

Là, en toute logique, vous assisteriez à un curieux épandage de violence jusque là jamais atteinte... et bien non. Pas ce soir. Ou peut-être pas tout de suite, car des gestes suggérés, elle n'avait esquissé que le premier avant de se prendre une volée de remontrances en plein visage. Comme un soufflet sortit du four, toute colère l'abandonna au profit de la stupeur. Ses yeux sombres s'étaient écarquillés, et elle s'était immobilisée tout à coup. En elle, fourmillaient mille émotions, comme si les lucioles de l'Artifice ne l'avait jamais quittée et qu'elles s'agitaient dans son propre corps. Elles luttaient, bestioles indésirables, cherchant à la soumettre comme elle l'avaient fait plus tôt. « Assieds-toi. ». Et elle s'était rassise, devenue impuissante devant l'impassible vérité.

Son cœur s'était serré. Oui, elle avait mal. D'une douleur bien différente de ce que peuvent procurer la vexation ou la colère. Oui, elle était susceptible, mais ce n'était décidément pas de cette douleur dont il était question. Sa fierté venait d'être salement amochée mais, plus encore, la voix avait appuyé là où ça faisait mal, comme on dit. Longtemps, elle garda le silence, n'écoutant que les hurlements du vent, un millier de fois plus menaçants que sa petite colère passagèrement ridicule. Non pas qu'elle tentait de revenir au calme, ce dernier s'étant imposé à elle avec une force inattendue, mais elle réfléchissait. Sentinelle avait raison. Sentinelle avait planté sa lance où jamais personne n'avait encore soupçonné la présence d'un cœur. Sentinelle devenait subitement intéressant, voir indispensable. Mais il y avait encore des remparts opulents, des barrières à défaire, des obstacles à déblayer. Devait-elle le laisser aller à l'assaut de sa forteresse absurde, l'y encourager, ou bien devrait-elle en dégager elle seule la voie ? « Dis-lui, puisqu'il te le demande. » Et la prudence, dans tout cela ?

Elle le détailla silencieusement, laissant les images, parfois fugitives, souvent incohérentes, défiler dans son esprit et aiguillonner ses émotions. Juste encore un peu...

La chevelure, fils de soie blanche, légère, comme le sillage d'un navire dérivant sur les flots paresseux de la nuit. Shinreï. Brève montée de colère, engloutie aussitôt : Sentinelle parle intelligemment, il n'a pas la prétention sans borne de l'Elfe noir, sa vanité, sa déloyauté. De nouveau, le doute. En quoi cela l'intéresse-t-il, ce qui lui trotte dans la tête depuis si longtemps que des tranchées en ont été creusées ? N'est-il pas bêtement curieux et désintéressé ? Doucement, Coralline changea de position. Préférant offrir moins de prise au vent, elle fit pivoter son buste et alla s'appuyer sur la tour de garde, derrière elle, tout en restant assise près du bien curieux personnage. Ce faisant, elle regretta presque son mouvement qui l'éloignait finalement de lui. Ses pensées, brièvement interrompues, reprirent leur cours... Désintéressé, et c'était précisément ce qui lui donnait confiance. Les curieux montrent bien trop d'engouement pour vos petits soucis personnels. Ils ne s'en désintéressent que plus tard, après vous avoir obligé à prostituer vos douleurs les plus refoulées, les plus secrètes aussi... Pourquoi pas ?

Second dilemme : par quoi commencer ? Il y avait tant à dire, dans le désordre, la hâte, la prudence... la pudeur. Elle hésitait, refusant encore de se livrer, incapable de briser le silence. Mais KöH l'aida, malgré lui sans-doute, laissant parler sa patience. Il n'était manifestement pas pressé et elle avait encore le choix de se lever et de partir sans lui adresser le moindre mot. Au revoir, merci, ou toute autre insulte que même les adultes sont réticents à employer. À son tour, elle soupira. Lasse de ce qu'elle ressentait, du rôle qu'elle jouait, du masque qu'elle portait, plus hideux encore que celui de l'homme assis à ses côtés, lasse d'elle-même.

« Coralline. »

Bon début. Elle frissonna, se sentant tout à coup mise à nue d'avoir osé dévoiler quelque chose d'aussi intime que son prénom... avant de réaliser que ce seul mot échappé de ses lèvres venait de lui procurer une sensation curieusement agréable. Elle observa, distraite, le liquide incolore qui tentait d'échapper à son triste sort, perlant à la commissure et, contre toute attente, elle l'appela mentalement. Après tout, c'était un liquide. « Viens par là. » Et il vînt, petite perle frémissante malmenée par les vents contraires. L'hiver semblait de mauvaise humeur. Coralline tendit la main, paume vers le ciel.

« Je n'ai pas de nom de famille, parce que je n'ai pas de famille... ou bien parce que j'en ai trop eues. » lâchait-elle sans même y penser.

Sa voix s'était apaisée. Plus rien à voir avec le filet aigri de la gamine capricieuse. Tout l'un ou tout l'autre, bien que personne à Elament ne puisse témoigner qu'elle ai justement jamais été l'autre... Le liquide avait rejoint la paume et s'y était déposé avec légèreté. Un Papillon doré s'y échoua au même moment. Rien, ce soir, n'avait l'air « normal ».

« La foule, reprit-elle rêveusement, ne s'attarde pas dans les rues la nuit, et moins encore sur les remparts. Là. Il n'y a que des gardes absorbés par leur pieuse vigilance. Je ne les intéresse pas, et c'est pour cette raison que je suis ici. »

Sans-doute qu'il avait déjà compris tout cela, mais pour elle, le dire lui faisait du bien. Ses regards se posèrent de nouveau sur KöH, réalisant qu'elle ne lui avait pas encore laissé l'occasion de se présenter. Elle prit une inspiration, savourant une sérénité qu'elle n'avait plus connu depuis longtemps. Le papillon s'était envollé, ou avait-il été emporté par une rafale, elle n'y avait pas prêté d'attention particulière. Doucement, elle porta le liquide à sa bouche, goûtant avec curiosité.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyMer 17 Juin 2009 - 8:06

Spoiler:



Ça se sentait à plain nez, comme l’odeur du miel lorsqu’on l’extrait de sa ruche. Oui, ça se sentait, elle changeait d’humeur. C’était presque comme un cheval piétinant le sol. Frustré, énervé. Cherchant une prise afin de rebondir et d’avoir le dessus avant de s’éloigner de son adversaire. Les yeux écarquillés telles deux billes noires aux reflets luisants sous une lumière lunaire passagère au milieux des nuages, ne lâchant pas de vue le rival de l’instant, celui qui pose problèmes, celui qui laisse des doutes, des questions. Des tas de questions sans attendre de réponses, tout simplement parce qu’elle ne sont utiles que pour son interlocuteur. Le cheval bronche, souffle dans le vide, fouette l’air de sa queue. Puis le calme vient en lui, une vague de confiance. Il n’ose plus revenir sur ses pas, inquiet. Mais il est calme.

Oui… elle était dans cet état, du moins, c’est-ce que cet homme ressentit ce soir-là, la voyant s’éloigner douter, presque serrer ses muscles de frustration, reculer. Puis, enfin… laisser un bout de sa personne s’échapper d’une cage trop bien confectionnée. Oui, c’est dur de parler, tout simplement parce qu’on met en jeu notre parole, nos désirs, nos pensées, nos avis… on ose, et le simple fait d’oser, est risqué. Mais sans risques, on ne peut avancer, comme ce cheval qui piétine sur place, désireux d’avancer mais trop engouffré dans sa bulle protectrice.

Il venait de prendre une petite gorgée, et cette petite goûte, qu’il pensait déjà perdue avant même qu’elle ne touche le sol, partit se réfugier au creux de la main de cette jeune fille, avant qu’elle ne s’engouffre dans la petite, toute petite bouche envieuse d’y goûter. Oui, mais il ne regardait pas. Il avait seulement sentit cette douce magie, cette force physique qui vient agripper la perle incolore. On sent, ces choses là… lorsqu’elles sont si proches et qu’elles éraflent le visage. Il laissa ses yeux la dévisager une nouvelle fois, la goûte à la bouche, dérapant sur les ailes d‘un petit papillon faisant un bref passage dans les mains de la damoiselle. Nouveau sourire caché sous une dentition osseuse, et il retomba dans son regard visant à protéger cette magnifique Cité qu’est Elament. Puis, une voix presque nouvelle se joint au vent, une ritournelle des plus douce. Il lui fallait du temps. Il fallait toujours… du temps, sans quoi, tout irait trop vite, et tous les risques serraient pris. Ce qu’elle disait, était totalement compréhensible, et en effet, il en était conscient. C’était d’une logique imparable. Du moins, pour le besoin de solitude. La famille, c’était une tout autre paire de manche. Mais ça arrive à tout le monde, d’ailleurs, peu ici, sont encore en famille. C’était à ses yeux, presque un privilège et certains s’en vantaient. Ils se disaient nobles, de sang pure, pouvant presque prouver leur lignée, leur origines sans aucun sang mêlé… balivernes ! Elle avait parlé, et c’était tout ce qu’il attendait. Il se foutait pas mal de ce qu’elle dirait, bien que préférant évidemment ce genre de paroles plus que des insultes en tout genre. Mais il n’en aurait pas été vexé si telle aurait été sa réaction. Il avait écouté chaque mot, chaque intonation même. Il ne la regardait certes pas, mais il n’était pas de eux qui parlaient et écoutaient avec les yeux. La bouche et les oreilles lui suffisaient empalement, et d’ailleurs, c’étaient bien leur fonction. La politesse, c’était tout autre chose. Il bossait. Point.


" - Sève d’Ouchkia. On en trouve au nord, à Kalmastre. Plaine Glaciale. C’est doux n’est-ce pas ? "

Il était comme ça. Préférant répondre à la curiosité de la fille plutôt qu’à son douloureux passé qu’elle venait de dévoiler partiellement. La douleur n’avait plus vraiment de place dans ses paroles, il l’écoutait, mais la déviait judicieusement. Rempare contre ses propres souffrances, puisqu’il était de ce monde, comme tout un chacun, oui, il était souffrant. Ce liquide dont elle venait tout juste de prendre connaissance, n’avait pas vraiment de goût, il venait après, juste après l’avoir laissé réchauffer la gorge. C’était presque pétillant, mais pas nocif.

" - Je n’ai jamais compris l’utilité de ce liquide… parait qu’il est totalement inutile."

La gourde était déjà rangée, la bête était calme, ronflant presque de bonheur, un sommeil bercé par deux voix et le vent. Il plongea ses yeux dans ceux de la curieuse, contre la tour de garde, un peu plus loin que tout à l’heure, avant qu’elle ne se décide à faire un petit mouvement de recule. La distance… c’était un chose qu’il appréciait. La face gauche de son visage était bleuté par la lumière nocturne tandis que la droite se voyait chaude sous la lumière superficielle de la Cité endormie. Il ne retira cependant pas le masque, bien qu’il se devait à son tour de donner son identité, car le nom de son métier n’avait rien de très intime. Après avoir révélé la nature du liquide, il donna un nom, le sien.

" - Ha… appelles moi KöH."

Sous un masque, un nom. Il pencha sa main gauche au sol, laissant de sa droite, reposer sa lance qu’il avait fermement tenue droit au ciel. Une petite pierre ronde bien polit, roula dans la main tendue au sol. La main et la pierre suivirent pendant un instant, la même trajectoire qui s’accéléra, avant d’entamer des adieux. Une main calme, une pierre filant droit dans l’air, droit sur le Garde plongé dans un lourd sommeil. Trop lourd sommeil d’ailleurs, car l’impacte le remua sans le réveiller, moustique microscopique.

" - Son monde n’est qu’ennuie, tabac, ronde, baise, bouffe…  _ ajouta-t-il sans gêne entre ses dents. Faible moquerie, faible vérité _ et viendra la chute de son histoire. "






Puis il resta dans un silence de mort, sans un rire. Il se doutait sans en être certain. Ce n’était pourtant pas chose possible… et encore moins elle, une gamine. Gamine mais pas stupide. Pourquoi alors ce doute plainait-il soudainement ? Elle avait l’odeur des bas-fond, l’odeur crieuse du lieu tisseur de toiles, celui qui invente et accomplit de sombres destins pour qui ose s’y aventurer. Si c’était le cas… si elle en revenait, bien qu’en revenir était quasiment chose impossible, alors elle courrait un danger plus grand qu’elle ne pouvait l’imaginer, encore fallait-il qu’elle le sache. Car l’adorateur des insectes, tel est l’un de ses multiples surnoms courant dans le monde, n’oublie jamais un visage. Ce lieu lui appartient depuis qu’il y a posé les six pates. Ce lieu est sien et parlerait presque en son nom. Au milieu d’un doute, une petite tâche toute nouvelle, toute sombre… un nouveau doute qui prenait naissance vint taper dans le crâne de la Sentinelle. Et si elle avait déjà dépassé le stade de la petite fille innocente et chieuse qu’elle était ? Si cette enfant avait pris un fil, et l’avait suivit jusqu’au fin fond de la toile ? Qui sait alors quels sombres désirs pouvaient alors danser en elle. Heureux soudain, de n’avoir pas encore retiré son masque, il passa la main à sa nuque dans un soupçon de réflexion. Il avait toujours été un homme prudent, sans parler de ce jours funeste. Tous doutes et toutes peurs n’avaient pour lui, aucune stupidité. Ce sont eux qui pouvaient sauver des vies et des secrets. Il ajouta, après un long silence, longue absence.

" - Mmm… ce n’est pas de l’alcool, mais possible que la sève nous rende l’esprit plus volatil pendant un moment."

Mais il était un homme qui bluffait aussi souvent qu’il en avait l’occasion si le besoin pointait son museau vers lui.

" - La rumeur qui tourne, viendrait dire qu’il existerait quelques unes de ces plantes sauvages dans la Forêt Dark… et qu’elle attirerait les plus gourmands des insectes."

Une ruse simple comme tant d’autres, mais elle avait ses chances. Du moins, il tentait ce chemin. Peut-être se trompait-il. De nombreuses questions sans réponses. Bien sûr, ce n’était pas un lieu fréquenté, très peu connu. Mais il l’avait à l’œil… c’était peu dire pour une Sentinelle ! C’était un soir pas comme les autres, mais pourtant si similaire sur certains points. Il avait envie de se saouler la gueule comme jamais. Ha ! Comme jamais ? Ses limites avaient-elles étaient repoussées ? Comme toujours plutôt ! « J’buvrais dans le bar d’en face » qu’il disait… et c’est-ce qu’il a fait ! C’est-ce qu’il fait sans cesse d’ailleurs. Valait-il le coup d’être écouté ? Sa tête tournait un peu, ce liquide le rendait toujours un peu saoul, bien qu’il préférait émettre l’hypothèse que ça n’avait rien de ressemblant avec l’alcool. Pourtant, c’était une ivresse comme tant d’autres. La différence ? Il se battait beaucoup mieux avec cette étrange ivresse que sans ou qu’avec de l’alcool des chopes. Ce liquide lui donnait l’impression d’être invulnérable, et il tenait debout. Il n’en avait pas honte, et d’ailleurs, il ne fallait pas en avoir honte ! Ce monde était hostile, et seuls ceux qui s’y accrochaient arrivaient à survivre et peut-être… vivre. Coralline, car tel était son nom enfin dévoilé, devait être surveillée. Le doute était trop important pour passer à côté. Mais il garda son aptitude de départ, celle de tous les jours. Celui qui écoute si la personne parle, et qui oublie si dans le cas contraire elle ne répond pas.

L’eau… soudain, ce mot vint s’encastrer comme une baffe dans la gueule. La goûte… l’eau. Il haïssait cet élément, rien d’anormal pour un Igni. Il avait mis du temps à réagir, trop plongé dans l’odeur de ce lieu… peste ! Infâmes ténèbres ! Sa tête bascula vers l’arrière, comme ensorcelée par l’ivresse, mouvement fluide, légèrement exagéré, les yeux se fermèrent, les mains reculèrent pour prendre appuie sur le sol, un mouvement de bascule. La capuche pendait, tendait vers la pierre, verre l’enfer, tandis que les yeux tiraient vers les nuages et les quelques creux laissant apparaitre de temps à autres la lunes et ses étoiles. Le mouvement s’amplifia jusqu’à ce que les coudes prennent à leur tour, appuy, piliers pour son corps. Le vend donnait sa fraicheur à son cou. Et elle, grande gourmande, grande carnivore et douce, avait l’œil… bien qu’elle était affalait comme une bête en manque de sommeil, elle gardait un œil sur la petite. L’instant présent, semblait totalement normal, dissimulant cette incertitude… et KöH découvrirait de toute manière si elle était allé dans ce lieu au nom peu cité, mal écrit par peur des représailles. La Sentinelle attrapa une autre petite pierre qu’il laissa s’écraser contre l’armure du garde. Sans réaction. En général, il lui en balance des plus grosses… puis, les souvenirs, la fureur, l’envie de vengeance. Il chantonna sans musique autre que la rage de mère nature. C’était à mis chemin entre le chant et le parlé, de toute manière, il faisait comme si elle n’était déjà plus là. Comme si… semblant…


Mais je suis désolé si j’étais beau, et que mon visage c’est échoué.
Je suis désolé si mon âme reste dans l’ombre de la tienne.
Que mes yeux verts sont trop clairs face à tes yeux d’ébène.
Mais je suis désolé si je ne t’ai pas oublié, et que mes larmes ce sont échouées,
Sur les rivages… ta fuite. Désolé si mon corps n’a pas été un mur,
Que ma bouche n’ait pas avoué mes sentiments sans gêne.
Mais je suis désolé de ne pas t’avoir oublié, de chanter pour ne pas pleurer.

Ce n’est qu’un mauvais rêve ou ma plume serrait tombée dans un gouffre d’amertume.
Je suis si noir sous mes cheveux d’argent. Si sombre derrière ma protection.
Je suis beau mais aimerait être fort. Je n’ai pas oublié…
Pardonnes mon ignorance ce jour-là.
J’ai tout pris dans ma face, et dans ma tête je suis devenu fou.
J’écris des mots invisibles, des mots sans prononciation.
J’écris sans rimes sans phrases et sans couplets.

Glauque voix rappelle ton odeur contre ma peau…


Tous les mots dits, ne s’entendaient peut-être pas, par chance, grâce à la fureur de la colère de mère nature qui se préparait. Il faisait comme s’il était seul, et dans ces moments, KöH se permettait de laisser ses douleurs s’échapper avec des mots. Il était bien loin d’être poète, flemmard de devoir compter le tempo, les rimes et tout ce qui s’en suit. Mais il alignait les mots comme ils venaient, même si à l’arrivée, les phrases n’avaient plus vraiment de sens et se ressemblaient toutes.


Dernière édition par KöH le Sam 11 Juil 2009 - 12:52, édité 1 fois
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyMar 23 Juin 2009 - 11:16


Spoiler:
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Sève d'Ouchkia ? L'espace d'un court instant, la jeune fille pensa qu'il s'agissait là d'une insulte ou d'un juron et resta un peu étonnée, son regard soudain braqué vers les deux pierres de lune qui ne la regardait pas. Le masque, blafard. L'armure, éblouissante. La cape, agitée. Le corps, indolent. Les mots lâchés, brefs, pondérés. La voix, monocorde. Non. Il parlait du liquide, cette petite perle rare comme la lie d'une ambroisie et qu'elle venait de porter à sa bouche. Fade au premier abord. Insipide. Chaud tout à coup. Elle en avait avalé en trop petite quantité pour en apprécier tous les arômes mais la sensation de sécheresse sur la langue était bien là. Breuvage aussi curieux que son consommateur. Elle sourit, amusée. Amusée ? Amusée ! Une boisson inutile. Peut-être. À quoi servaient-elle sinon à étancher la soif ; la douleur pour certaines. L'alcool, elle n'avait jamais essayé, parce qu'elle méprisait tous ces imbéciles trop soûls pour arborer ne serait-ce qu'un semblant de dignité. Ah ! Comme ils faisaient pitié à voir et à entendre lorsqu'ils ne maîtrisaient plus même leur voix, hurlant plus qu'ils ne parlaient, trébuchant sur les mots dont ils étaient bien incapables de déterminer l'utilité, la signification, la portée. Ils devenaient vulgaires, grossiers, postillonnaient à vous en remplir un seau à crachats. Ils en perdaient pudeur, fierté, honneur, se pavanaient, ridicules et pour finir, ils puaient l'alcool et le mépris.

Allait-il finir ainsi, le dénommé KöH ? À l'observer, à l'écouter, il semblait en prendre le chemin et l'enfant curieuse observait, silencieuse spectatrice. Pourquoi ne l'agaçait-il pas ? Pourquoi se couchait-elle à ses pieds, sa haine indicible ? Elle suivit le vol parfait de la caillasse jusqu'au garde. Elle aussi, eut envie d'essayer mais elle n'en fit rien. Sentinelle l'intriguait et le regarder faire ou ne pas faire, dire ou ne pas dire, l'apaisait. Comme s'apaisa le vent, un court instant, juste le temps de laisser aux mots le loisir de se perdre entre les meurtrières. Deux, deux seulement, provoquèrent un frisson sur la peau de la petite, comme une griffe glaciale qui traîne, s'attarde le long de la colonne vertébrale, menace de déchirer la chair. « gourmands insectes... » Alerte, main froide se refermant brusquement, serrant les doigts sur votre être.

Comment n'avait-elle pas fait le rapprochement avant ?

Immobile, Coralline resta figée quelques secondes qui semblèrent des heures. Elle esquissa, par réflexe, un mouvement de recul qui lui fut refusé par la tour de garde. Plaquée ainsi contre le mur, elle se sentit soudain prise au piège. La crainte l'avait de nouveau gagnée, quoi que plus douce qu'à son habitude. Oui. La crainte peut être douce. Entre ses lèvres entre ouvertes, un souffle, dernier soupir d'un mourant, sans que personne ne meure cependant, mise à part la quiétude elle-même. L'Aasimar avait bougé, doucement, indifférent, si loin et si proche à la fois. Le vent était revenu à la charge, bousculant la petite Nymphe, défaisant, dans ses cheveux, un nœud rose d'enfant coquette qui alla se perdre dans les rues sombres de la cité. Lui, remuait encore les lèvres comme s'il se parlait à lui-même, presque inconscient de ce qu'il venait de réveiller. L'écoutait-elle ? Peut-être. L'entendait-elle ? Sans doute. Comprenait-elle ? Ses yeux sombres ne vous le diraient pas.

« L'Artifice...? » suggéra la voix, éteinte avant de s'être élevée contre la fureur du vent.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyMer 24 Juin 2009 - 13:27

Elle connaissait le nom de ce lieu, elle venait même de le prononcer. Et même si le vent lui avait tendu une perche afin de lui clouer le bec, elle avait forcé sa voix, insisté. Ce n’était pas très intelligent, où au contraire, une preuve de franchise. Les sourcils se crispèrent, signe qu’il réfléchissait. Le mot danger battait comme un cœur affolé dans sa tête. Il fallait agir vite, agir en sachant de quel côté elle était. En danger, ou un danger… ? Il porta la main à sa gorge, se grattant, toujours le regard au loin. C’était le silence le plus long qu’il lui donnait en guise de réponse avant d’enchainer sur ses mots.

"- Les livres parlent trop, à moins que tes yeux n’en aient tout simplement trop vu. J’espère que ta curiosité ne t’a pas collé d’insectes à tes trousses…"

Ses deux pieds ne tardèrent pas à recevoir le poids de son corps. Debout, il la regarda. De haut, il la contempla. Un dilemme. La plus petite chose peut cacher les plus belles immondices. C’était que trop bien connu. Un insecte n’a jamais de mal à trouver un foyer… en espérant que Coralline n’en avait pas été l’objet.

" - Tes yeux… ne peuvent mentir. Tu l’as vu."

Ce qu’il espérait avant toute chose, c’est qu’elle ne soit pas porteuse d’une Khash‘… c’était un présage des plus funestes. Quiconque acceptait d’en porter une, pouvait voir le fil de sa vie se terminer en échardes… la vie n’en était pas moins longue, mais beaucoup plus douloureuse, des obstacles terrifiants, une souffrance à la limite de la mort. Les Khashs’ ne sont connues que de très peu de monde, et en général, des malfaiteurs. Des yeux malveillants. KöH avait feuilleté un vieux journal âgé de 200 ans tout juste. Il se souvient bien de cette page. Ce n’était pas la dernière du journal, certes, mais la dernière qui précédait les pages blanches. Sûrement le début d’une lente mort. Celui qui avait tenu ce journal, n’avait plus rien écrit depuis son article sur les Khashs’. Et sa dernière phrase elle-même, ne comportait pas de point. KöH s’en souvenait très bien, mot par mot.

«  Il m’entend respirer, tout est si noir que je n’ai p… »


L’encre avait presque éternisé la dernière lettre gravée sur la page. Les tâches de sang on été projeté sur le grain du papier. Oui, KöH s’en souvient bien et d’ailleurs… La Sentinelle dirigea tout son corps vers sa monture, ses mains cherchèrent quelque chose dans une poche arrière de la selle. Il sortit enfin un bloc rectangulaire entouré d’un tonne de chiffons et de cordelette jaune. Il défit les nœuds avec patience, enleva le tissu comme on retire une bande autour d’une blessure. Et dans ses mains, un dernier chiffon supportait un journal. Le journal. Il l’avait gardé depuis sa trouvaille. C’était fragile, c’était moyennement vieux, mais ça avait beaucoup d’importance à ses yeux. Ici y figuraient des belles petites trouvailles. KöH se retourna, le journal ouvert à la page fatidique, les doigts pinçant le centre des pages encartées. Pas trop loin, pas trop proche des yeux de la fillette, devant, pour une bonne visibilité. Elle ne devait pas connaître les Khashs’, sont état n’avait rien d’alarmant. En revanche, si elle l’avait croisé, où plus encore, elle ne tarderait pas à les connaître, du moins, c’était une possibilité, bien que rarissime, elle ne pouvait pas être négligée. Une fois est toujours de trop.

[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} Khashs


L’homme referma les pages d’un seul mouvement, un seul claquement qui fouetta l’air, la laissant fuir. Il enchaîna sèchement sur une mise en garde.

"- ‘Vaudrait mieux pour toi que tu ne connaisses pas ça."

Il avait pensé retiré son masque, mais depuis ce doute, il lui faudrait plus de temps. Il était debout, et n'observait à présent, rien d'autre qu'elle. Non pas qu'il s'égarait de son poste, bien au contraire. Il le faisait, ce travail, il y tenait, et passer à côté de cette fille serrait manquer à son devoir. La cape flottait, énervée et agacée par le vent. Les cheveux faisaient de même. Il fallait qu'il saches, mais qui dit que ce corps d'enfant lui dise la vérité, toute la vérité ?!


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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 27 Juin 2009 - 14:29

Pas de réponse, ou pas immédiatement. Elle épiait le moindre mouvement de l'homme qui s'était arc-bouté sur les reins, le visage et la gorge offert au ciel étoilé. Ses coudes lui assuraient de solides appuis contre le vent qui jouait à faire rage et à s'apaiser tour à tour, faisant virevolter la chevelure de soie pâle. L'avait-il entendue ? Avait-il connaissance de ce lieu ? S'en moquait-il ? Autant de questions qui restaient suspendues dans une insupportable sursis, au bord de se faire emporter par les bourrasques cruelles. Le silence l'aida à reprendre peu à peu le dessus sur ses angoisses et son pouls descellera doucement, revenant à un rythme moins soutenu... plus soutenable aussi. Dans l'incertitude, elle jeta un regard sur la bête, la considérant enfin après l'avoir longuement ignorée. Elle ne la détaillait que paresseusement, s'obligeant à revenir au calme plus qu'à analyser quoi que ce soit. Bref subterfuge en vérité, car déjà la main de l'Aasimar avait remuée, rappelant à lui toute attention.

Elle frissonna, effrayé par un souvenir qui revenait vers elle. En soit, l'Artifice n'était pas si effrayant. Il était même plutôt agréable de s'y laisser dériver. En sortir par contre, et se retrouver écrasé sous le poids de l'amère réalité était plus douloureux que tous les maux de ce monde. Pour preuve, elle en était revenue apaisée et absente. Ses souffrances, elle les devait au froid hivernal auquel elle n'avait pas pris garde immédiatement, et à la voix coupante de l'inopportune Sentinelle. C'était par ailleurs précisément cette dernière qui avait déchiré la toile parfaite de sa sérénité, laissant libre le passage à tout un éventail d'émotions pénibles qui s'immisçaient par l'accroc ainsi ouvert. Alors, pourquoi l'évocation seule de ce lieu avait-elle suffit à l'effrayer ? Alerte ? Menace ?

Coralline observa l'homme remuer tandis que son esprit assimilait doucement les paroles qu'il avait prononcées. Il la mettait en garde. Contre quoi ? Elle l'ignorait, mais pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait rassurée par la bienveillance tendue vers elle. Elle appréciait l'attention donnée et demeurait attentive aux conseils prodigués. Tout comme elle acceptait avec reconnaissance les recommandations de Ruby, elle buvait celles de KöH, brusquement persuadée de sa loyauté, de sa franchise aussi. Les anthracites de ses yeux effleurèrent la page du carnet. Ça ne lui rappelait rien, ce truc, mais le sang et l'inscription inachevée parlaient de manière suffisamment explicite pour comprendre d'un seul regard. Ses lèvres se refermèrent sur son souffle retrouvé et elle secoua la tête en signe de négation, réfléchissant encore.

« Je ne sais pas... hésita-t-elle un instant, J'y suis restée longtemps, mais cette chose ne me dit rien. »

La crainte avait reculé, laissant tout de même la marque froide et pesante de son sceau dans son sillage. La petite Nymphe darda l'Aasimar, entre curiosité et inquiétude. Debout devant elle, il la dominait de sa hauteur, sans défiance.

« Comment savoir ? »
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 18 Juil 2009 - 11:31

Comment savoir ? Comment savoir qu'elle disait. Stupide question. KöH ne cachait pas la voix de son rire.

" - Comment... tu n'es pas aveugle, si tu l'as vu, tu l'as. On te donne, tu acceptes. Et si tu acceptes, tu demandes sans le vouloir une mort certaine. Tu n'en a pas vu, alors tes craintes peuvent se calmer."

Où elle mentait. Le mensonge n'était pas du tout utile ici mais il pouvait venir apaiser la peur, pour en savoir plus sur ce qu'elle aurait peut-être accepté. Mais à en juger ses yeux, ce n'était pas un mensonge. A moins qu'elle ne soit une très grande actrice ! Non... elle n'avais pas vu, ne connaissais pas. Loin d'un danger qu'elle pourrait probablement connaître dans l'avenir.

" - Tu y es allé, et tu me parles. Comment en es-tu sortie vivante ? Et, si j'puis m'permettre, n'écoutes pas les belles paroles du fou qui dors en ces lieux... elles te conduiront à ta perte _ ses yeux se posèrent sur sa monture, pour les éloigner du regard de la jeune fille _ peut-être plus."

Le fou... était bien capable de la prendre sous ses ailes, qu'elles soient de chair ou de brume. Les démons étaient actifs, très actifs, et il ne fallait rien laisser passer, pas même le regard innocent d'un enfant malin. Car le malin est partout ces temps-ci plus que jamais. Et lorsqu'il frappe, il peut faire beaucoup plus de mal qu'une mort soudaine. KöH faisait mine de s'en aller, montant délicatement sur sa monture qui venait de se remettre sur ses pattes après un repos agréable dans le vent. La créature gratta le sol comme un cheval pourrait le piétiner en piaffant. La sentinelle n'attendait pas vraiment de réponse, mais elle en aurait sûrement. Le couple homme animal n'allait rien faire d'autre qu'un petit tour de garde. La bête fit les premiers pas...
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyLun 27 Juil 2009 - 18:49

D'un hochement de tête, elle acquiesça, signifiant qu'elle comprenait ou – plus simplement – qu'elle écoutait. Non, elle n'en avait pas vu et n'avait par ailleurs aucune idée de ce à quoi cette bestiole pouvait ressembler de près, mis à part sur le dessin griffonné sur le carnet. Mais un schéma entre deux taches de sang, ça ne lui disait rien qui vaille la peine d'aller y frotter sa curiosité. Elle ferma les yeux un moment et pencha un peu la tête en arrière, cherchant à faire revenir à elle quelques souvenirs encore embrouillés. Des lucioles, elle en avait croisé une certaine quantité, chaleureuses puis oppressantes, tourbillonnant autour d'elle avec tant d'insistance qu'elle avait fini par les fuir, comme pourchassée par un essaim de guêpes furieuses. Mais ÇA, non. De ce dont elle se souvenait, personne ne lui avait rien proposé là-bas. En réalité, elle avait été bien seule. Si seule même, qu'elle en avait regardé le temps passer sans y prendre garde, oubliant de compter les heures, puis les jours. Dehors, en ce temps là, il faisait chaud. L'été et sa canicule. Déplaisant. Effrayant. Alors elle était restée, et s'était parlée à elle-même, s'observant, extérieure à son propre corps, à son esprit même.

Effleurant sa conscience, les paroles de KöH la tirèrent hors de ses pensées molles. Cette voix, curieuse, l'apaisait et l'invitait, comme une âme attentionnée, à se confier. Pourquoi ? Il ne tentait pas de la réconforter. Pas de paroles fichtrement hypocrites et dénuées de sens, pas de fausse sympathie, de compassion feinte. Juste la promesse qu'il écoutait, et que cela lui suffisait. Il n'allait pas chercher en elle les détails pour en tirer de hâtives conclusions et d'affligeants jugements. Il ne lui faisait pas la morale. Il ne lui parlait pas comme à une gamine, ne s'empressait pas de la remettre sur le droit chemin de l'insouciance enfantine, ne se permettait pas de décider de son comportement pour elle. Non. Il se contentait d'apprécier, objectif et franc. Froid mais sincère. Sûr de lui mais sans vanité. Et il était loin, bien loin de l'image arrogante qu'elle s'était faite des adultes. Ils pouvaient se pavaner, du haut de leurs conseils prétentieux, alors qu'ils pensaient tellement tout savoir et être si sage que rien ne leur échappait. Qu'ils voient, ce qu'elle avait vu. Qu'ils vivent, ce qu'elle avait vécu. Qu'ils souffrent, ce qu'elle avait souffert.

Elle se redressa tout à coup, chassant de ce mouvement les pensées noires qui remontaient vers elles, comme les ténèbres se répandant sur les collines. Elle n'aimait pas ces souvenirs. Au devant d'elle, Sentinelle était remontée sur sa créature inquiétante. Comme s'il se désintéressait de la réponse, ou l'invitait à les rejoindre. Alors elle se leva, le regard vague de ceux qui ne parviennent pas à se défaire d'un mauvais rêve, les images d'angoisse collées à ses paupières. Elle jeta un coup d'œil vers les plaines. Le vent se calmait doucement et les cimes des grands conifères, plus loin, remuaient bien moins que quelques minutes plus tôt. Où s'en allait l'orage ? Vers d'autres cieux, au-dessus d'un être à l'esprit plus furieux que le sien, sans-doute. Les nuages s'estompaient, la lune scintillait, fière de sa beauté sans fard. Coralline cligna des yeux et sauta souplement sur le muret de pierres. La monture carnassière occupait toute la largeur du chemin de garde à elle seule, alors elle suivrait, en équilibre sur le rempart coupant, sautant au-dessus des excavations régulières.

« Non. Swanector m'y a mené la première fois, mais il a disparu sans mot dire ensuite. La seconde, je m'y suis rendue seule. J'ignore comment j'ai pu en retrouver le chemin. J'étais seule. » Répondit-elle avec paresse.

Et son regard s'obstina à surveiller chaque pas qu'elle faisait, veillant à ne pas glisser, sans crainte, sans l'enthousiasme des enfants jouant à des exercices d'équilibre sur les bancs et les murets des fontaines.

« Avez-vous déjà ressentit cela, n'être que spectateur de vous-même ? Comme si vous aviez été tiré au dehors de votre corps et que vous pouviez explorer chaque infime recoin de votre âme ? Et tout ce qui vous révoltait vous semble futile. Et tout ce que vous haïssiez n'est plus que chimères. Et vous ne souhaitez plus regagner ce réceptacle de chair et de sang, parce que ce qu'il renferme, comme un écrin sordide, vous effraie. Comment j'en suis sortie, je l'ignore. J'ignorais jusqu'au fait que j'en étais sortie avant que vous ne me tendiez votre cape. Quant à dire si je suis vivante, peut-être. À vrai dire, j'ai pitié de moi. »

Avec précaution, elle enjamba le buste du garde, avachi dans son sommeil de veilleur harassé. Toujours debout, mais pas plus éveillé que ces dragons millénaires profondément assoupis sur un trésor inestimable. Elle s'arrêta, parant au mieux une bourrasque tardive, puis repris sa marche aux côtés de Sentinelle et sa monture. À y repenser, peut-être était-ce d'une compagnie aussi discrète qu'imposante dont elle avait besoin. Un animal capable de survivre seul, ne nécessitant pas sa constante attention. Indépendance et affection. Quelque chose entre les deux. Et si possible, susceptible de supporter ses sautes d'humeur sans que l'idée lui vienne de la dévorer... Ils arrivaient près de la première place d'arme et le couple s'était ostensiblement séparé à leur approche, moins inquiétés à l'idée d'être découverts que par la créature marchant dans leur direction. Oui, au juste. Pourquoi les détestait-elle autant ? Et le regard alla se planter sur ses pieds, surveillant la régularité de ses enjambées.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyJeu 30 Juil 2009 - 14:41

Spoiler:


Elle parlait plus facilement désormais. Avait-elle juste, un manque de confiance en elle, ainsi et surtout, aux autres ? Tout est-il qu'elle venait de faire la plus longue phrase jamais dite depuis leur rencontre. C'est à dire, depuis pas plus d'une heure cisaillées par des mots et des silences. Elle était rigolote, cette fille, à sautiller avec attention, le muret, faute de ne pas avoir de place à côté de la monture. Oh, il lui aurait bien tendu la main, mais chaque chose en son temps. Un jour peut-être, il la laisserais prendre plaisir du balancement de la bête. On pouvait s'endormir sur son dos, à force d'écouter le chant de sa marche, des froissements de tissus, de métal, de lanières, le claquement de la gourde et le liquide qui s'y balançait à l'intérieur. Mais pour l'heure, il était trop tôt, et le danger pouvait toujours exister.

Elle avait utilisé une nomination bien amusante, d'ailleurs, cette appellation n'était plus correcte depuis peu. En effet, la bête s'était désencombrée de ce Chiroptéran trop loquasse.

Soudainement, elle changea de sujet comme ont peut changer de chaussette. Elle passa d'un sujet épineux, à un sujet des plus humain. Un sujet que peu de jeunes gens arpentent. KöH se mit à réfléchir du haut de sa bête, il n'avait pas ce sentiment, il en avait d'autres. La haine n'était toujours pas une chimères, sinon, il ne serrait plus sentinelle depuis belle lurette. Il ne serrait peut-être plus... tout court. Mais inutile de se complaire dans son malheur, c'était un chemin bien trop simple. Il préférait aller de l'avant, avec les hauts et les bas, se regarder de haut un instant, se foutre de sa propre gueule, comme si souvent, mais revenir à lui même bien vite.


" - Les effets de l'Artifice ne se prennent pas à la légère. Les toiles tissées t'entraînent dans la folie. Elles prennent tout ce qu'il y a de bon en toi, afin d'y laisser sous terre, là où personne n'ose et ne peut s'aventurer. Et voilà ce que ça donne. Regardes donc ce que tu deviens. Tu ne t'aime pas. Comment vivre si tu n'a pas d'amour pour toi ?"

La bête avançait, les pas s'accumulaient, et les doutes s'estompaient lentement. Après-tout, il ne lui fallait qu'une chose, de l'amour pour elle même. On ne peut pas aimer les autres et ce monde, s'en se mettre avant les autres car après-tout, si nous n'étions pas là où la vie nous a posé, nous ne pourrions rien apprécier. S'aimer, c'était se respecter, et si on se respecte, alors on pouvait s'aventurer à donner et recevoir de ce monde. Ce n'était pas chose facile, mais il n'y avait pas d'autres chemins pour une âme libre et assez heureuse. Le bonheur, il y en a, même dans les moments les plus lugubres. Il suffit de le vouloir, d'ouvrir les yeux sur la vie sous nos pieds.

" - Je suis souvent mon seul spectateur, et pour ça, je m'admire de loin, tout comme je me crache de près. Je suis mon juge, mon bourreau. Mon propre assassin. Mais j'ai un but... plusieurs... et c'est suffisant pour rester dans cette enveloppe, suffisant pour garder ma force, ma volonté. Sans volonté, tu recules."

Il baissa les yeux sur le couple dérangé par leur présence. Il n'avait pas manqué d'observer le regard que Coralline avait lancé avec violence sur ces deux tourtereaux. C'était un regard venant surement de la jalousie refoulée. Elle ne nierait sûrement, par crainte d'avouer qu'elle assis, comme tout être sur cette terre, avait un cœur, et même la créature la plus sombre, la plus ignoble, en avait un, même s'il n'était pas fait de chair et de sang. Mais beaucoup l'ignoraient, où voulaient l'ignorer, oubliaient... ne voulaient pas savoir, beaucoup préféraient dévaster toute chose. C'était bien trop compliqué d'avouer cette faiblesse, alors on la dissimulait, on se l'arrachait, on se la bouffait jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un grain de sable perdu dans un désert.

La monture elle, semblait vouloir aller plus vite, elle avait faim, et elle pouvait détecter un oiseau mort caché derrière plusieurs rangées de baraques. Encore fallait-il que le vent souffle vers elle évidemment. KöH la retenait, elle faisait parfois des caprices pour rien, c'était une grande nerveuse. Peut-être aussi, juste le bruit d'un rat qui fouinait non loin de là.


" - Pour ce qui est de ton... Swanector. Ne prononces plus son nom, même dans la Cité. Certains yeux malveillants pourraient alors vouloir te convertir. Où au contraire, d'autres, te faire taire à jamais, par crainte de ce que tu pourrais être. On ne ressort pas de l'Artifice sans élever des doutes, mademoiselle. Oui, je peux te l'assurer, tu est vivante."

La tête se tourné vers l'extérieur de la cité, avant de revenir vers le chemins que la bête empruntait.

" - Si tu en est sortie seule, alors tu dois être dotée d'une grande force morale, où encore d'une trop grande folie compatible à ce lieu... mais il y a une autre possibilité encore. Le lieu pourrait aussi te laisser t'échapper afin que tu reviennes."

Mieux valait prévenir que guérir... dit le dicton. Elle prendrait cette réélection comme elle l'entendrait, de toute évidence, elle semblait moins soucieuse qu'elle l'était à leur rencontre. C'était un bon point. D'autres choses le préoccupait. Le monde se détraquait, plus violant qu'une grande guerre, plus lent et silencieux qu'un chat, plus coupant qu'une lame des plus affutées... les multiples complots, les chemises retournées, les vas et vient de certaines personnes, assez suspects. Il en voyait des choses, il en voyait des capes à large capuche, passer les rempares de nuit comme de jour. Et il avait une mauvaise impression, l'Artifice devenait plus virulent ces temps-ci. Comme si la légende disait vrai... malheureusement, il se doutait bien, que Senector poserait une nouvelle fois ses pattes sur cette fille. Elle était douce et sombre, assez incertaine de ses désires pour cracher sur ce monde qui bien que beau, pouvait être des plus horrible. Devait-il poser ses yeux sur elle, afin de l'éloigner d'un tel danger ? Plus elle parlait, plus il était certain d'une chose. Coralline n'était pas encore prête à démolir toute chose, et encore moins, obéir à des ordres donnés par un démon, même si un ordre peut être enrobé de flatteries, et cacher sa véritable nature. Il faut toujours amadouer, faire croire à la personne, qu'elle agit de son plain gré... mais le jour viendra sûrement, et il fallait éloigner cette date qui approchait à grands pas...
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyVen 31 Juil 2009 - 15:53

Elle s'était arrêtée, l'air pensif, le regard perdu vers le scintillant horizon, puis avait repris sa marche attentive en se hâtant de rejoindre Sentinelle et sa monture. Arrivés sur la place d'arme, elle avait tout l'espace nécessaire pour descendre et marcher tranquillement auprès de KöH, mais elle s'y refusa. Dans quelques mètres à peine, les chemins de garde se rétrécissaient à nouveau et il lui aurait fallu grimper sur la pierre des traverses une seconde fois. Et puis ? Peu lui importait. Elle s'amusa, lorsqu'elle du grimper sur l'arcade surplombant la grande porte, au bord de glisser et de faire une chute fatale. Là-haut, elle était bien, comme si personne ne pouvait l'atteindre. C'était un lieu inhabituel et elle se promit de revenir, au moins pour avoir l'occasion de revoir cet homme qu'elle commençait à apprécier. Elle perdit son sourire, le souvenir de ses déceptions lui revenant tout à coup. Et si elle ne le revoyait plus jamais ? Et bien, tant pis. Ce soir au moins, elle profiterait de sa présence tranquille et de sa voix apaisante.

Elle ne lui prêtait plus tellement attention, se concentrant d'avantage sur ses paroles que sur ses attitudes et ses gestes qu'elle ne pouvait pas voir, trop occupée à ne pas glisser. Elle hochait parfois la tête, signifiant qu'elle l'avait entendu, et relevait les pans de sa robe – qui ne lui appartenait pas vraiment – afin d'éviter de s'y prendre les pieds. Elle se sentait curieusement sereine, comme si le fait de parler la libérait d'un poids trop lourd à porter. Les paroles de KöH lui firent tourner la tête vers lui, intriguée tout à coup. Oui, c'était vrai qu'il se cachait derrière un masque et une armure. Pourquoi ? Mais elle n'osa pas poser la question, parce qu'elle haïssait qu'on lui en pose et qu'elle se voyait mal revêtir le rôle de l'abject voyeurisme. Alors elle garda les lèvres serrées sur sa question, se contentant d'écouter la suite qui coulait mollement vers elle. Et lorsqu'elle fut à peu près sûre qu'il n'avait rien à ajouter, elle garda encore le silence, réfléchissant à ce qui avait été dit.

« Oui, sourit-elle soudain, j'ai cru devenir folle. Vous dites que l'Artifice a prit ce qu'il y avait de bon en moi, mais y avait-il quelque chose tel que vous le décrivez à prendre ? Je ne m'aimais pas avant d'y entrer, ça n'a pas tellement changé. Pour dire la vérité, je n'aime pas grand monde... » Conclu-t-elle après un silence.

Elle s'arrêta de nouveau, un peu essoufflée par son ascension par dessus l'entrée de la cité. Encore une fois, son regard se reporta sur les plaines, puis sur Elament elle-même, endormie à cette heure tardive – ou matinale, c'est selon. De sa position, elle vit le serpentement curieux des ruelles entre les bâtisses, le toit de l'école, la tour des vents, luisante comme la nacre, phare à l'attention des âmes égarées, sans-doute. Elle n'avait jamais remarqué à quel point cet édifice était beau. Elle reconnu, également, le dôme de la bibliothèque, la grande tâche émeraude du parc et l'opale du lac. Elle se sentit traversée d'une émotion bizarre, comme si le fait de connaître ainsi chaque lieu lui rappelait à quel point elle pouvait y être attachée, malgré ce dont elle tentait de se persuader. Elle prit une inspiration et sauta d'une traverse à l'autre en redescendant de l'autre côté de la porte, suivant toujours KöH qu'elle rattrapa avec agilité.

« Alors, admettons que je ne soit jamais allée là-bas... Si cela peut les rassurer et me préserver de leurs jugements hâtifs. Suggéra-t-elle d'un haussement d'épaules. Je n'y retournerai pas. Trop longtemps, j'y suis restée, pensant que mes pensées y étaient plus claires, parce que plus détachées. Mais, je me rends compte que ce que j'y ai appris n'est... N'est qu'artifice... » sourit-elle de nouveau, amusée par le jeu de mots.

À quelques mètres, elle s'arrêta de nouveau. Devant eux, une bifurcation leur laissait un choix vaste. Le chemin de garde, en haut des remparts, avec la vue que cela offrait à la fois sur l'extérieur et l'intérieur de la cité. Le chemin couvert, un peu plus en contrebas, avec sa longue enfilade de colonnes et une vue plus restreinte sur Elament, ou bien encore les rues elles-même, bien plus bas, où flânait encore quelques ivrognes ou élèves imprudents et elle ne savait quelles créatures de la nuit. Coralline se tourna vers KöH, l'interrogeant du regard. Après tout, c'était lui la Sentinelle et le choix lui appartenait. Elle, se contenterait de suivre.
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptySam 1 Aoû 2009 - 18:36

Il mima le même haussement d'épaules.

" - Ho, ho, ho... si... tu y retourneras ! "

Répondit-il lorsqu'elle n'avait, à son tour, rien à ajouter d'autres, que l'attente d'une réponse. Il en était convaincu, ce lieu avait ce petit côté magique. On dit non avec la bouche, mais oui intérieurement, c'était tout simplement incontrôlable. Et bien qu'elle puisse, finalement arriver à se défaire de cette toile... lui... il ne l'aura pas oublié. Il n'oublie jamais un visage... il reviendra à la charge lorsque l'envie lui titillera les babines, que son temps libre le soit un peu trop. La Sentinelle s'était déjà jurée protection envers cette fille. Quoi qu'elle soit, il avisera, mais ne jamais laisser une seule chance au mal ! Puis il tira sur la bride, la monture s'arrêta sans broncher. Il tourna son visage masqué, afin de plonger ses yeux dans les sien.

" - L'Artifice n'a fait qu'aggraver ton jugement déjà trop sombre à ton égare."

Le ciel était déjà moins sombre, le matin allait montrer le bout de son nez, et la bête s'affolait. Elle piétina le sol, cracha un ronflement grave dans l'espace. En bas, l'odeur toute nouvelle était fraiche, mais forte. Un corps venait de quitter ce monde éphémère, pour partir dans une éternelle somnolence qui n'est autre que la mort. Elle repris sa marche avec plus de vitesse, et KöH ne la retient pas le moins du monde. Elle était son guide, autant la suivre. Il se dirigea plus bas, loin des hauteurs où il pouvait contempler la cité ainsi que ses alentours. En bas, le corps attendait. La petite les rattraperait, elle semblait vouloir les suivre, ce regard interrogatif le lui prouvait. L'énervement se mit à couler dans ses veines, comme si, ce soir et tous les autres soirs, KöH était le seul à scruter l'horizon. C'était un ange, pas de doute. Comment avait-il pu passer à côté de ça ? C'était impossible, inimaginable, carrément impensable !!! Et là, au milieux de ce silence insultant voir accablant, un cri déchira le ciel, les cordes vocales s'entrechoquèrent, un râlement qui déferla le long des ruelles comme un éboulement suivit d'une foule d'échos tous aussi grave les uns que les autres. C'était lui, sur sa bête, presque au bout de sa lassitude des nuits qui s'enchaînaient les unes après les autres sans laisser le temps, ni à la lune, ni au soleil, d'étendre leur douceur sur terre.

" - RhhhHHHHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaa !!!!!!"

Il pestait sous son masque, crachait presque d'incompréhension. Mais il n'avait presque plus envie d'aller reporter cette funeste nouvelle sur le champs. Après-tout, le monde se détraquait... c'était un adulte fort, qui avait eu sa chance. C'était raté, pas de chance. Mais qui en était sortit gagnant... ? Voilà la seule question qu'il se posa. Les pieds claquèrent le sol lorsqu'il mit enfin pieds à terre. Son regard visa sa bête. C'était un non stricte ! Un non voulant tout simplement dire _ pas bouffer ! _ Il entendit Coralline au loin. Il avait bien quelques minutes après tout... maintenant qu'il était mort, celui-ci avait l'éternité devant lui, et l'autre n'était déjà plus là, dans le cas contraire, il l'aurait remarqué. Il resta là, debout, silencieux. Et attendit...
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Message[TERMINÉ] - Sur les chemins de garde {pv KöH} EmptyMar 4 Aoû 2009 - 10:10

La suite par ici : Retour à la maison.
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